Sophie Deschamps © GP
Chères lectrices et chers lecteurs de Magcentre,
Face au confinement imposé à la France depuis le 17 mars, j’ai décidé d’écrire un journal de bord pour y exprimer, jour après jour, mon ressenti face à cette situation inédite qui nous oblige à réfléchir et surtout à revoir nos priorités. Vous y trouverez au fil de l’eau des infos pratiques en tous genres, selon l’humeur des conseils de sites, de lecture ou de cuisine ainsi que des coups de cœur ou des coups de gueule selon l’actualité du coronavirus. Mais surtout restons solidaires et zen les uns envers les autres.
Merci pour vos commentaires et vos encouragements, continuez vous aussi !
#restezchezvous
Nous avons tous été bouleversés par la détresse de Jeanne, 97 ans, qui se plaignait il y a quelques jours sur France 2 de sa solitude forcée dans son Ehpad et de ne pas pouvoir « discuter avec sa voisine de chambre ». Pourtant, expliquait-elle avec bon sens, « nous ne sommes malades ni l’une ni l’autre ». Un témoignage qui résume à lui seul le sentiment d’abandon qui vivent de nombreux-ses pensionnaires des 7000 Ehpad de France, privé-es des visites de leurs proches et consigné-es dans leur chambre depuis maintenant plus d’un mois.
Une solitude pour certain-e-s plus mortelle que le virus. En effet, 7000 personnes âgées sont décédées en France depuis le début de l’épidémie (avec certains jours plus de morts en Ehpad qu’à l’hôpital, notamment les 4, 7, 9 et 15 avril). Et si notre région n’est pas la plus touchée, elle n’est pas épargnée non plus avec 33 morts dans le Loiret, 50 en Eure-et-Loir, 41 dans l’Indre, 36 dans le Cher, 22 en Indre-et-Loire et enfin 18 dans le Loir-et-Cher.
De plus, force est de constater que nos aînés ne sont pas tous logés à la même enseigne. Et ce ne sont pas les maisons de retraite les plus chères qui s’en occupent le mieux, loin s’en faut. On pense bien sûr à la récente polémique sur les 300 établissements gérés par le groupe Korian en France, accusé de graves négligences dans la prise en compte de l’épidémie avec une surmortalité due au Covid-19 avec notamment les terribles 36 morts de l’Ehpad La Riviera de Mougins (sur la Côte d’Azur).
Pire, ces accusations de négligence ne datent pas de l’apparition du coronavirus mais de plusieurs années avec les reportages édifiants fin 2018 d’Envoyé Spécial (France 2) et de Zone interdite (M6), suivis ensuite de pressions et de menaces sur les salarié-es comme l’a rapporté Télérama le 6 octobre 2018.
En effet, on (re)découvre ces jours-ci que ces établissements privés, censés apporter une fin de vie agréable et douce à nos aînés, sont en fait cotés en bourse, donc c’est le profit qui prime, l’économie et la finance avant la vie. Ainsi, BFM Business vantait, sans le moindre émoi, ce lundi 20 avril la « bonne affaire » Korian, l’action ayant chutée, à cause, selon le groupe, de la surmédiatisation de la (mauvaise) gestion de ses Ehpad. À ce stade de cynisme et d’indifférence, il n’est pas nécessaire d’attendre la fin de l’épidémie pour décider individuellement et surtout collectivement de changer notre modèle économique qui laisse trop souvent l’être humain au bord du chemin et pas seulement dans les maisons de retraite.
Alors, merci à tous ces soignants et directeurs de maisons de retraite qui ont mis leur vie privée entre parenthèses pour rester auprès des pensionnaires et merci à l’Ehpad Boisbelle de ma maman, près de Bourges, qui a créé une gazette sur Familéo où l’on peut déposer à volonté des messages et des photos et qui fait aussi circuler une tablette dans les chambres pour que nos aînés puissent nous voir quelques minutes par semaine. Enfin merci à nos gouvernants d’autoriser à nouveau les visites, même s’il faut laisser le temps aux établissements de se retourner pour les organiser en toute sécurité.
A demain.