Alors que la rumeur d’Orléans reste un événement marquant de la fin des années soixante qui illustre une forme ancestrale de circulation de l’information chargée des fantasmes d’un antisémitisme “populaire”, il existe très peu d’images de ce fait de société. Bien sûr le livre d’Edgar Morin et de ses étudiants apporte un éclairage très précieux (même s’il est parfois contestable), parce que justement s’appuyant sur des témoignages “à chaud” recueillis dès l’été 69.
© Pierre Muller
Mais le film de Pierre Müller et
du journaliste Luc Rosenzweig a cela d’essentiel, en comblant ce vide laissé par les médias d’alors, de proposer les seules images des témoins de cette histoire provinciale, à un moment où, douze ans après, si le recul affine la réflexion, le souvenir est encore vivace dans les mémoires des personnes rencontrées.
A ce titre
“Une vieille Histoire”, produit en 1981 par le département audiovisuel de la
Maison de la Culture d’Orléans constitue un document d’exception, qui malgré une qualité d’image dépassée par le téléphone portable le plus médiocre, apporte encore aujourd’hui, un éclairage particulier à l’histoire de la rumeur d’Orléans.
La diffusion de ce film, à l’époque hors télévision, si elle fut vivement contestée par les édiles locaux, n’avait pas manqué d’intéresser les médias nationaux.
“Une Vieille Histoire”
Projection en présence du réalisateur Pierre Müller
Jeudi 10 octobre 19 heures
Un film (52′) sur la « rumeur d’Orléans », réalisé par Pierre Müller,
sélectionné aux Festivals :
Jeunes Auteurs, Belfort, décembre 1981
Cinéma du Réel (Centre Georges Pompidou), février 1982
Perspectives du Cinéma Français, Cannes, mai 1982
« Les faits sont rappelés par de jeunes femmes, à l’époque lycéennes et victimes de la rumeur: elles ont vraiment cru que des femmes avaient disparu dans l’arrière boutique d’un magasin de vêtements. A partir de là l’enquête essaie d’établir avec d’autres témoins et acteurs de l’affaire qu’il y avait deux étages dans cette rumeur: un étage fantasmagorique qui embrayait sur les peurs et les désirs des adolescentes sans attribuer un contenu raciste à ces rêves, et un deuxième étage sciemment raciste, l’un nourrissant l’autre. D’où la difficulté à mettre fin à cette rumeur. Il fallait bien sûr en démontrer les fondements racistes (et c’est ce que fit la presse nationale, car la locale avait du mal à affronter crûment la situation, ne voulant pas parler d’antisémitisme) mais cela ne pouvait suffire à extirper les racines fantasmagoriques.
Et au hasard d’un sondage rapide dans les rues d’Orléans, on trouve encore aujourd’hui des gens qui prétendent qu’elle avait raison, la rumeur»
Jean Paul Fargier Les Cahiers du Cinéma Janvier 1982
La MCO
“Inauguré en 1975, le Centre d’Action Culturelle d’Orléans et du Loiret fut le premier établissement de ce type à être doté d’un surprenant bric-à-brac vidéo représentant quasiment l’inventaire du matériel disponible à l’époque, à l’exception notable des outils professionnels de la télévision et uniquement destiné à… la diffusion !
Pierre Müller
Nommé responsable du secteur « cinéma et vidéo » en janvier 1976, Pierre Müller s’empressa de détourner ces moyens techniques hétéroclites pour à la fois produire de la vidéo d’intervention sociale, initier les jeunes et les moins-jeunes au décryptage des messages audiovisuels et enfin, mais plus tard, montrer grâce aux « Buffets-vidéo » ce qui se produisait ailleurs dans les différents genres de la discipline : art vidéo, vidéo militante et même télévision (Jean-Christophe Averty) !
Une Vieille Histoire s’inscrivait dans la démarche initiale et militante d’intervention sociale en renvoyant aux Orléanais, pour les faire réagir, une image qui ne leur revenait pas…”
Henri Blanquet “La République du Centre” © Pierre Muller
Un événement Magcentre / Cinéma des Carmes