Alexis Michalik : du théâtre au roman

A 35 ans Alexis Michalik est un auteur de théâtre reconnu et consacré. Edmond la pièce qu’on a pu voir l’an passé à Orléans lui a valu une pluie de Molière et un succès phénoménal. Il est l’un des auteurs de théâtre contemporains, plutôt rares, que l’on nous envie ?

D’où vient cet ovni qui en plus est beau gosse ? Fils d’une Anglaise et d’un Polonais, Alexis Michalik est un enfant de la place Clichy et de Montmartre. Reçu au conservatoire de Paris, il n’y entre pas, devient acteur et metteur en scène, fonde une troupe. La suite on la connaît.

Actif, impatient et surtout curieux de tout voilà que notre auteur s’est lancé dans le roman ce qui nous vaut à cette rentrée la sortie de « Loin ». Premier roman qui est loin d’être inintéressant mais qui comporte quelques travers de jeune auteur.

De l’audace rien que de l’audace

Alexis Michalik à la Nuit des Molières en mai 2018.

Tout est hypermoderne dans « Loin », la mondialisation, la brassage des nationalités, les affres de notre jeunesse qu’elle soit plomb-plomb ou peine d’envies, à la dérive passagère plus ou moins profonde ou déjà rangée sans parler de l’éternel choc des générations et de l’impact des derniers avatars historiques.

L’histoire met en scène trois personnages qui à des degrés divers et à la façon qui leur est propre sont prêts à tout sauf à rester à la place qu’on leur a assignée, entendons par là celle que leurs parents leur ont tracée. Tout commence par l’arrivée tardive d’une carte postale signé de Charles, le père d’Antoine parti 20 ans plus tôt sans laisser d’adresse. Avec son meilleur ami, Laurent qui aimerait percer dans le journalisme et Anna sa sœur, totalement déjantée, Antoine se lance sur les traces de ce père fantôme pour une semaine pense-t-il….

En fait ils se sont lancés dans un marathon effréné dont chaque étape réserve son lot de surprises et de rebondissements. Trop parfois. Le lecteur feuilletonne comme à la télé. Faut-il voir là l’influence de notre époque, de ce que les média nous proposent ? On ne peut reprocher à l’auteur d’inclure le goût actuel dans la littérature. Il a également recours au quotidien de la langue, à ses facilités, à son laisser-aller, à la multiplicité des injures dont tout un chacun ou presque a pris l’habitude démailler ses propos. On aurait parfois envie d’un peu plus de tenue, de recherche dans l’écrit. Un livre comme « Loin »mérite mieux.

Dans son déroulé, Alexis Michalik donne sa propre philosophie : vivre, avancer, reculer, s’effondrer , renaître , ne jamais reculer. Se poser des questions quitte à ne pas recevoir de réponse dans l’immédiat, une règle de vie pleine d’allant qui est une richesse à laquelle chacun peut accéder. Le livre en donne sans cesse la preuve mais était-il nécessaire d’exposer cette règle en un premier chapitre de 19 pages avant de la faire découvrir dans les 620 pages suivantes ? L’écriture relève d’un artisanat qui se perfectionne tous les jours.

Françoise Cariès

« Loin »

Alexis Michalik

Albin Michel 643 pages 22,90 euros

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