Sous la direction de Marius Stieghorst, chef invité.
La phrase est plus que jolie et prononcée, ce vendredi, dans les coulisses de la salle Touchard du Théâtre d’Orléans. Il s’agit de celle de Marius Stieghorst, chef invité, assistant du directeur de l’Opéra de Paris: “Ce soir, j’ai voulu travailler sur la réverbération, je voulais que la note soit comme un écho”.
Vendredi soir, en réponse au concert donné par l’Orchestre d’Orléans, c’est un tonnerre d’applaudissements qui salue la prestation de l’ensemble et de son chef rivés dans une même vision, une même interprétation de l’œuvre. Rarement, et comme en janvier 2012, lors du concert Paganini Mascagni Strauss, il se dégage de la scène un climat de magie et de fête. A n’en pas douter, on le doit à cette enthousiaste et chaleureuse harmonie entre chef et musiciens. Vendredi, lors des ultimes rappels, c’est du reste au coeur des pupitres que reviendra saluer Marius Stieghorst.
Le violoniste Amaury Coeytaux force l’admiration
Marius Stieghorst.
En tout état de cause, voici un beau programme concocté par Jean-Jacques Kantorow, directeur artistique et chef permanent de l’orchestre. Que ce soit dans le concerto « A la mémoire d’un ange », de Berg, ou dans cette « Dante Symphonie », de Liszt, la sensibilité est ardente. En vérité, magnifique est l’interprétation du concerto par Amaury Coeytaux . Ce dernier, dans le plus pur respect du texte, fait admirablement sonner son Guadagnini de 1773. Tout est lisible, et le chant de ce violon, qui creuse merveilleusement son flux au sein de l’ensemble orchestral, fait montre d’une éloquence intimement vibrante et d’une tension de son d’une présence remarquable. Lors de ce concert, belle communion dialoguée entre violon et alto (Jean-Philippe Bardon, chambriste toujours aussi efficace). Simplement limpide et beau de profondeur est aussi ce Bach donné en rappel.
Marius Stieghorst saisit l’orchestre et le public
On aimera par ailleurs la « Dante symphonie ». A n’en pas douter, ce Liszt convient à merveille à l’orchestre et à un chef, qui, avec un engagement souriant, une puissante précision, révèle la dimension poétique et dramatique de l’oeuvre. En vérité, Marius Stieghorst saisit l’orchestre et le public avec une réussite absolue. Une fois encore, cordes, cuivres et petite harmonie, avec des soli emplis de lumière et inspirés (Charline Bonneville clarinette basse, Catherine Herot-Darves hautbois) séduisent. Toujours au chapitre de l’émotion, cette dernière est à son comble lorsque le choeur de femmes s’avance sur scène. Place, en effet, à une céleste conclusion avec ce “cordes à chœur”, ce “coeur à coeur” empli d’âme auquel se livrent, avec infiniment de délicatesse, les harpes et les voix.
L’Orchestre d’Orléans vendredi soir au théâtre.
Dans les coulisses du concert
Heureux de revenir diriger l’orchestre d’Orléans, Marius Stieghorst, lors de la répétition générale précédant le concert, ne boude pas son plaisir de renouer avec cette formation: « Nous avons fait connaissance . Entre nous cela relève de l’échange, simplement de l’humain. Ici, chacun est à l’écoute de l’autre, chaque pupitre se remet en question, chaque musicien assume la responsabilité, personne n’est installé et c’est ce qui me plaît ». Compliments également à l’adresse d’Elisabeth Renault : « Il s’agit d’une heureuse collaboration. Lors des répétitions, dès qu’elle a chauffé le chœur, elle a trouvé la couleur que je cherchais ». Quant à Amaury Coeytaux : « Nous nous connaissons, il a toujours une idée de la profondeur de son et ce n’est qu’un bonheur de jouer avec lui ».
« Je suis quelqu’un qui aime soutenir »
Impressionnant est en fait Marius Stieghorst qui ressent « comme un honneur » le fait de pouvoir travailler avec Philippe Jordan à l’Opéra de Paris. Celui qui participera dès avril à la célébration du tricentenaire de la danse française à Versailles et à Garnier, fait preuve, en effet, d’une écoute des plus rares : « J’ ai beaucoup de respect pour ces danseurs parce que la danse est un art extrêmement dur où l’on a que le corps pour installer sa technique. Pour moi, accompagner les danseurs relève du miracle. Il faut toujours rester ouvert, voir à chaque spectacle comment ils se sentent et être capable de changer tout de suite de jeu. C’est un système qui est très sensible. L’orchestre doit d’adapter. Une grande responsabilité incombe au chef qui garde le pouvoir tout en sachant que ce sont les danseurs et chaque interprète qui sont au centre de tout ».
Quant à la musique pure : « Mon idée de la musique ce sont les sentiments. Avant que l’on commence à jouer une note, il faut avoir sa couleur dans la tête et dans le cœur ».
Tels sont quelques-uns des mots d’un artiste sans cesse en quête de vérité. Un chef d’orchestre proche de chacun et qui, avec ces œuvres de Berg et de Liszt données à Orléans, invite les mélomanes à de beaux concerts. De la grâce du début jusqu’au ciel de la fin.
Jean-Dominique Burtin.
Prochains concerts au Théâtre d’Orléans , salle Touchard: samedi 12 janvier à 20 h 30, dimanche 13 janvier à 16 heures.