À un an et demi des prochaines élections municipales, en coulisses, les grandes manœuvres commencent à se dessiner. Tout le monde se jauge et dresse un inventaire des forces et faiblesses de chacun. A Tours, Christophe Bouchet, devra faire face à de multiples oppositions…
Photo d’archive Conseil Municipal Extraordinaire de Tours © Pascal Montagne
Pour les sortants, l’heure du bilan approche. À Tours, Christophe Bouchet, élu maire par ses pairs à la faveur du départ de Serge Babary pour le Sénat, le sait. Depuis son arrivée à la tête de la ville il y a un an, l’élu centriste n’a jamais caché ses intentions de profiter de ses deux ans de mandature comme d’un tremplin pour 2020. Dès son élection à l’automne 2017, le maire de Tours avait annoncé sa candidature aux prochaines municipales. Oui mais la prime au sortant est parfois difficile à porter, surtout quand les projets peinent à sortir de terre. Depuis un an, Christophe Bouchet s’active pourtant, il a restructuré en mairie, placé des femmes et hommes de confiance à des postes clés au cabinet ou à la communication, il a aussi fait des annonces et tenté d’imposer sa patte. Les résultats se font attendre néanmoins comme pour « Porte de Loire » où l’arrêt (temporaire?) du projet et les annonces de voir plus grand n’ont pas convaincu et en un an, l’impression générale est plutôt celle d’un certain immobilisme.
L’enjeu métropolitain en toile de fond
Christophe Bouchet, maire de Tours. (c) Pascal Montagne
Pire, pour celui qui avait mentionné sa volonté de replacer Tours au centre du jeu métropolitain, se retrouve de plus en plus isolé face à ses collègues des autres communes. Sa méthode peine à convaincre sur le fond mais aussi sur la forme. Christophe Bouchet a tenté le rapport de forces et si les premiers temps suivant son élection ont semblé lui donner raison (Tours a récupéré deux vice-présidences), depuis les revendications de la ville-centre de l’intercommunalité agacent et un front commun des villes voisines semble se dessiner petit à petit : « Christophe Bouchet veut que la métropole sorte les sous. Très bien, mais on est une métropole d’investissements, on est pas là pour payer pour les dettes de la ville de Tours », nous confie ainsi un maire de la métropole en référence à une réunion houleuse entre maires au cours de laquelle Christophe Bouchet aurait demandé fermement à la métropole de reprendre une partie des dettes de la ville…
Difficile de ne pas voir dans ce front, l’influence de Philippe Briand derrière, malgré la bonne entente qu’ils affichent publiquement. Dans la Nouvelle République ce lundi, le toujours très influent maire de Saint-Cyr-sur-Loire qui repart au combat en 2020 avec la ferme intention de conserver la tête de la métropole l’a ainsi exprimé : « Tours ne doit pas prendre toute la place ».
Oui mais les élections de 2020 vont rebattre les cartes, la nouvelle configuration (obligatoire légalement) donnera à Tours 38 sièges sur 82. Il faudra donc une alliance sans failles des communes voisines pour retirer le leadership à la ville de Tours et à son maire, quel qu’il soit…
Chez LREM : le casse-tête de la liste
Édouard Philippe et Philippe Chalumeau à l’aube et en short.
Si un temps, un rapprochement avec LREM avait semblé être possible pour Christophe Bouchet, les liens se sont distendus et le mouvement présidentiel devrait avoir sa propre liste aux municipales face au maire sortant. Chez LREM, le discours est clair : on reprend les méthodes qui ont fait leurs preuves. Les militants En Marche s’apprêtent donc à repartir sur le terrain pour aller faire du porte à porte et interroger la population. « Nous voulons faire remonter un projet, comme nous l’avons fait en 2017 », nous expliquait ainsi Philippe Chalumeau. Et si l’heure de l’incarnation de ce projet ne se pose pas encore officiellement à croire le député de Tours, les noms circulent, à commencer par le sien. Philippe Chalumeau ira-t-il briguer le fauteuil de maire ? Possible. Il serait alors obligé de démissionner de son mandat de député… Un cas de figure qui serait alors bien loin des intentions répétées depuis deux ans de renouveler les pratiques politiciennes…
Mais Philippe Chalumeau peut également être simplement sur la liste, comme pour apporter une caution à celle-ci, tout en restant en retrait. De quoi lui permettre de rester à l’Assemblée, tout en ayant un regard sur la vie municipale. Du côté de certains membres ou proches de LREM, on verrait bien ainsi dans ce cas promouvoir de nouvelles têtes. Celle de Benoît Pierre, le directeur du CESR (Centre d’Études Supérieures sur la Renaissance), est régulièrement citée. Ce dernier était d’ailleurs présent aux côtés des députés LREM à Tours, lors de leur séminaire de rentrée. Une photo publiée par Philippe Chalumeau, le montre même en compagnie de ce dernier et du Premier Ministre Édouard Philippe, partant faire un footing au petit matin à Tours… La décision se prendra certainement entre Tours et Paris, avec aval des instances nationales…
Pour remporter la ville de Tours, il faudra une tête de liste capable de porter un projet donc, mais aussi de fédérer des membres issus de divers horizons que parfois tout oppose au départ. A Tours, nombreux sont ceux s’étant rapprochés du mouvement présidentiel.
Parmi les élus actuels de la ville de Tours, citons Pierre Commandeur (ex-modem), à Nicolas Gautreau (ex-PS), David Chollet (Ex-EELV)… Françoise Amiot également, ancienne adjointe de la majorité (ex-LR) qui ne manque pas avec son association « Tours à Venir » à tirer à boulets rouges sur ses ex compagnons de la majorité, ou encore Thibault Coulon, issu de la droite conservatrice et de plus en plus proche de La République En Marche (il était également présent à la guinguette de Tours en compagnie des députés LREM…)
Jean-Patrick Gille ou Cathy Munsch-Masset pour mener la liste socialiste ?
Jean-Patrick Gille / Cathy Munsch-Masset.
À gauche, on se prépare également. Après une mandature difficile et un passage dans l’opposition qui aura été difficilement digéré, les socialistes sentent que malgré tout, le coup est possible. Bénéficiant d’une implantation locale qui reste importante au regard du désastre national, le Parti Socialiste croit en ses chances. Pour cela, il faudra certainement s’allier aux partenaires traditionnels de gauche à commencer par EELV qui gardent aussi à Tours une implantation si ce n’est importante, pour le moins influente.
Il faudra néanmoins composer avec les autres forces de gauche, à commencer par C’est au Tours du Peuple, l’association issue de la liste du même nom de 2014, regroupant des membres issus du NPA ou de la France Insoumise.
Pour mener le combat politique qui s’annonce, l’ancien député de Tours Jean-Patrick Gille est régulièrement cité. Aujourd’hui conseiller régional, Jean-Patrick Gille reste influent en effet, ne ménage pas ses critiques sur la vie municipale et vient même de créer une association pour faire émerger des idées et des talents… Malgré tout, dans l’entourage socialiste on l’affirme, si Jean-Patrick Gille est pressenti pour mener la liste, cela reste une option et une autre semble se dessiner également. La candidature de la vice-présidente socialiste de la région Centre-Val de Loire déléguée à l’éducation et à l’apprentissage, Cathy Munsch-Masset ne semble en effet aujourd’hui pas exclue, d’autant plus que cette dernière a emménagé récemment à Tours… Bénéficiant d’une bonne image, celle dont le travail à la région est quasi-unanimement salué, aurait l’avantage de porter une image de renouveau plus affirmé que l’ancien premier adjoint à Jean Germain…
Au milieu de tout ça, Christophe Bouchet repartira donc, mais avec quels soutiens ? Elu sur une majorité de droite et du centre, Christophe Bouchet n’a aujourd’hui pas que des soutiens chez les ténors des « Républicains ». Malgré tout, il repartirait avec une partie de l’équipe en place. Un cas de figure dans lequel les LR auront forcément une influence non négligeable : de Marion Nicolay-Cabanne, à Jérôme Tebaldi en passant par Olivier Lebreton… Pour LR, il s’agira alors, en cas d’élection, de garder un poids important à Tours via une garde rapprochée « maison » au côté du maire centriste… comme pour mieux contrôler son action sur la ville de Tours, mais aussi de la Métropole…
Mathieu Giua