La biodiversité est en danger. D’ailleurs depuis quelques jours on a assisté à la quasi disparition de “bêtes politiques”, un ancien président de la République réfugié dans son nid doré de Neuilly et un ancien Premier ministre qui s’est replié sur l’estuaire de la Gironde. Malgré ces graves atteintes à l’environnement politique, la terre devrait continuer de tourner. En revanche, de vraies agressions menacent l’existence même de la planète.
©Alain Canon
Ce ne sera pas un bidule
De la même façon qu’elle pilote désormais les politiques économiques, la région Centre-Val de Loire va bientôt coordonner les orientations en la matière. “Cela ne viendra pas d’en haut”, modère François Bonneau, “il faut que les choses remontent du terrain”.
Ainsi la Région va t-elle être la première à créer une Agence régionale pour la biodiversité. Cette Agence, qui n’est pas “un bidule de plus dans le millefeuille” comme l’a promis Barbara Pompili, la secrétaire d’Etat en charge de ce dossier crucial, viendra à l’appui de l’Agence nationale. Celle-ci, créée par une loi de juillet 2016, verra le jour début 2017.
Barbara Pompili et François Bonneau.
“L’attractivité de notre région repose aussi sur notre biodiversité“, explique Benoit Faucheux, chargé du dossier au Conseil régional. Dans le Centre-Val de Loire, ce ne sont pas les éléphants qui disparaissent, sauf quelquefois ceux du PS, mais les atteintes aux espèces sont nombreuses. Et pas seulement sur le balbuzard pêcheur.
Tous les citoyens concernés
François Bonneau qui, lundi, a apposé sa signature avec la Secrétaire d’Etat au bas d’une “déclaration commune d’engagement”, estime que “chaque citoyen et tous les niveaux d’intervention sont concernés”. Il s’agira de réunir le plus de monde possible autour d’une table. Lundi, les services de l’Etat ont assisté à ce galop d’essai avant le grand match pour la biodiversité, l’ONF (Forêt), la DREAL (environnement), l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, les associations comme France Nature Environnement…“Il faut que tout le monde vienne autour de la table, les chasseurs, les pêcheurs, les agriculteurs…”, ajoute Barbara Pompili. Car ils sont nombreux les leviers: l’urbanisme, la police, la réglementation, le génie écologique. Un peu comme cela s’était fait autour de Michel Barnier pour le Plan Loire Grandeur nature qui a sauvé le fleuve royal.
L’Ecopôle, première étape de l’Agence
Barbara Pompili sur les pas du balbuzard dans la région en mai dernier.
Précurseur, la région Centre ne part pas de zéro, elle a décidé en 2011 d’être une région à biodiversité positive. Un établissement public a été créé, l’Ecopôle qui sera sans doute dissout dans la nouvelle agence. Dans la même ligne, elle consacre dans ses contrats de solidarité avec les territoires 5% des financements à la biodiversité. Au total c’est un budget de 6,5 millions d’euros qui est consacré à la protection de notre biodiversité, avec par exemple des actions sur les nitrates et les pesticides. La région gère en outre 13 millions d’euros de fonds européens au service de la biodiversité.
Aux dires de la ministre et du Président de Région, les autres collectivités, surtout les départements, seront amenés à travailler de concert sur ces “politiques opérationnelles de biodiversité”. Pour Barbara Pompili, “… l’ARB est une démarche politique dans toute la noblesse du terme. Ce n’est pas seulement une entreprise technique, un mécano administratif. La dynamique de l’ARB est sans avenir si elle n’est pas sous-tendue par une volonté politique forte d’entraîner les citoyens, les collectivités à travailler ensemble sur la biodiversité, dans une même direction. L’ultime objectif est la mobilisation de la société”.
Ch.B
Interview de Barbara Pompili
“À la primaire de la gauche,
j’espère des discours d’une plus grande qualité”
La lutte pour la biodiversité n’est pas encore une priorité, dites-nous pourquoi c’est un danger grave?
“On a beaucoup avancé dans le cadre du changement climatique mais la conférence de Paris a montré qu’il y a une prise de conscience par la France mais aussi par les citoyens du monde entier. Sur la biodiversité, les gens ne savent pas bien ce que c’est. Cela se rapporte à tout ce qui est vivant, les plantes, les animaux, les gênes, ce qui nous permet de vivre, or l’on croit que c’est quelque chose d’acquis. On se dit la nature reviendra toujours. Lorsque l’on met du bitume sur de l’herbe, on se dit la nature s’en sortira, l’herbe va repousser. C’est une erreur parce que la terre nous l’abîmons trop vite par rapport à sa capacité de régénération et les rapports qui sortent les uns après les autres sur ce dossier sont alarmants.
Une comparaison: lorsque l’on monte dans un avion et qu’il perd un boulon on se dit ce n’est pas grave, un deuxième boulon, on peut s’en sortir, mais à partir de combien de boulons, l’avion va t-il se disloquer et tomber? Un ingénieur aéronautique sera bien incapable de vous répondre. Pour la nature c’est pareil. On perd une espèce, une ou deux ce n’est pas trop grave, à partir de combien d’espèces disparues allons-nous être gravement en danger? Face à cela il faut prendre des précautions et mettre en place des politiques adaptées.”
Qu’avez-vous pensé de la place de l’écologie en général dans la primaire de la droite et du centre?
“La place de l’écologie a été soit inexistante, soit, pour le peu qu’elle ait été abordée inquiétante. La vision qui a été développée lors de cette primaire est une vision années 70-80. J’aimerais que l’on ait des leaders qui nous poussent vers le 21 ème siècle, et le 21 ème siècle ne pourra pas se faire sans prendre en compte cette question absolument essentielle. J’espère que dans le cadre des primaires de la gauche, on entendra des discours d’une plus grande qualité, que tous les candidats sauront s’approprier cette question. Pour moi, la prise en compte de l’écologie, c’est ce qui fait la différence entre les politiques du 20 ème siècle et les politiques du 21 ème siècle.”