En ce dimanche pluvieux, deux films nous invitaient sur les bords de la Méditerranée, l’occasion de découvrir au travers du prisme du cinéma, les réalités contemporaines qui animent cette région du monde, au delà des clichés et des a-priori qui ont un peu trop tendance à brouiller notre regard et notre compréhension.
Self Made est un film israélien de la réalisatrice Shira Geffen, sous la forme d’une comédie dont le propos semble a première vue plutôt loufoque: deux femmes, l’une israélienne artiste connue, et l’autre ouvrière palestinienne “confondent” leurs identités, et le lieu symbolique de cette confusion est un check point entre Israël et la Palestine occupée, sorte de cage grillagée qui lave les identités pour en autoriser le franchissement.
Sur le principe du “Faites le vous même”, le spectateur est invité alors à essayer de construire une fiction en tentant de trouver les indices raccordant les récits des deux femmes, comme ces vis indispensables à l’assemblage des meubles “Etaca”, mais l’exercice devient kafkaïen lorsque l’on comprend que les autres protagonistes du film ne distinguent plus physiquement les deux femmes…
Étrange et forte métaphore qui nous introduit dans un monde où le récit devient impossible par la non-reconnaissance de l’autre, comme si l’univers mental créé par cette dislocation des personnages rendait toutes fictions invraisemblables… Du loufoque lourd de sens !
Férid Boughedir au cinéma des Carmes Orléans
Parfum de Printemps, film tunisien, était projeté en présence de son réalisateur Férid Boughedir. Cette comédie légère exploite le ressort comique somme toute assez classique, du rural candide débarquant dans la grande ville où se déroulent des évènements qui le dépassent et qu’il va suivre au gré de sa fantaisie, à la poursuite de sa Juliette.
Tiraillé de tous cotés, notre naïf de circonstance va nous dévoiler dans ses tribulations keatoniennes, les dessous sociologiques et idéologiques de cette révolution du peuple tunisien qui chassera du pouvoir le président Ben Ali et sa clique.
Et derrière cette légèreté, cette comédie populaire qui propose une lecture politique de la révolution du jasmin en Tunisie, n’est-elle pas la meilleure preuve qu’une démocratie se construit sur cette rive de la Méditerranée ?
Gérard Poitou