Ce n’est pas un hasard si la ministre de la Santé, Marisol Touraine, et la secrétaire d’Etat aux droits des femmes, Pascale Boistard, ont choisi vendredi 16 janvier, pour annoncer des mesures améliorant l’accès à l’interruption de grossesse (IVG)…
En effet, il y a quarante ans, exactement, la loi Veil rendait celle-ci légale en France, renvoyant aux oubliettes les aiguilles à tricoter et autres méthodes barbares. Oublié aussi les hauts cris poussés au parlement par la droite en juillet 2014 lors de la suppression de la notion de détresse pour les femmes recourant à l’avortement prévue par la loi Veil. Le temps a passé et plus personne ne nie que la décision d’avorter est toujours source de douleur pour la femme mais aussi pour l’homme qui en est informé, qu’il l’accompagne ou non.
Les nouvelles mesures
Marisol Touraine a présenté ses mesures comme une deuxième étape pleinement assumée par une équipe gouvernementale qui, dès son arrivée au pouvoir en 2012, a instauré le remboursement complet de l’IVG. Il s’agit maintenant de s’assurer que « ce droit peut être exercé simplement, qu’il n’y ait pas de différences de prise en charge sur tout le territoire et que n’y entrent pas des enjeux financiers ».
La prise en charge à 100% est étendue aux examens qui entourent l’IVG: rendez-vous, échographie, analyses biologiques. Les agences régionales de santé sont priées d’élaborer un « plan régional pour l’accès à l’avortement ». Les médecins qui exercent dans les centres de santé suffisamment équipés pour cela pourront réaliser les IVG chirurgicales. Les sages-femmes seront autorisées à assumer les IVG médicamenteuses bien que les médecins s’y montrent hostiles.
Ces mesures qui répondent aux demandes insistantes du Planning familial et de très nombreuses associations féminines seront examinées au printemps prochain par le parlement. Ne viendra pas en discussion la suppression du délai de réflexion de sept jours entre les deux premiers rendez-vous avec un médecin imposé par la loi Veil que réclame pourtant le Haut Conseil à l’égalité. Cette simplification a été jugée trop sensible et susceptible d’entrainer de violentes oppositions.
La contraception en question
Il y a quarante ans la moitié des femmes reconnaissaient avoir eu recours à l’avortement au moins une fois. Elles ne sont plus qu’un tiers ce qui est encore beaucoup. Encore 9,5% des femmes avortent deux fois dans leur vie, 4,1% trois fois, parfois plus. Les avortements sont pratiqués en moyenne à 6,4 semaines de grossesse. Le recours à l’IVG médicamenteuse l’est d’avantage par les femmes âgées de 18 à 25 ans qui construisent leur vie et n’ont souvent pas encore une vie stable.
Il semble aussi que la contraception puisse être mise en cause. Elle est parfois ignorée et d’autres fois inadaptée. Les pilules prescrites ne conviennent pas toujours ou leur prise est oubliée, d’autres hésitent à se faire poser un stérilet ou un implant contraceptif ce qui les dispenserait d’une prise quotidienne. Enfin les méthodes traditionnelles ne sont pas toujours fiables.
F.C.
Quelques chiffres
- Au moins 47 000 femmes et certainement beaucoup plus dans le monde meurent chaque année d’un avortement clandestin
- 213 000 IVG sont pratiquées en France chaque année. Leur nombre est stable depuis 10 ans.
- 27,5 ans : âge moyen auquel les femmes ont recours à l’IVG
- 55% des IVG sont médicamenteuses contre 36% en 2002