Le conseil municipal d’Orléans ayant décidé dans sa majorité de créer une « délégation à la lutte contre l’immigration clandestine »cela choqua les oreilles des autorités préfectorales qui enjoignirent au dit conseil de ne pas poursuivre dans cette voie.
Le service de com de la mairie a planché et accouché d’une « délégation pour la prévention de l’immigration illégale ».
« Parle-t-on du même ? » (Jacques Lacan probablement).
S’il est justifié de garder « délégation » puisque ce terme s’applique à toutes les missions déléguées par le maire à un de ses conseillers qu’il missionne en en faisant un missionnaire par contre le remplacement du mot « lutte » par « prévention » risque de modifier le message émis. La « lutte » a quelque chose de martial, de va t’en guerre, à feu et à sang, à mort, on lutte pour…, contre…, il y a quelqu’un en face, c’est tout l’art de la guerre (Clausewitz). La « prévention » qui vient de prévenir-se mettre devant, être prévenant, précautionneux, va amener le missionné à, par exemple, interpeller un prévenu dans ces termes : « Hep vous là ! z’ avez bien les bons papiers ?, z’ êtes en vacances ? ». Parce qu’il n’y a qu’un pas entre prévenir et considérer comme présumé coupable et ce pas il faut bien réfléchir avant de le sauter.
Imaginez que l’interpellé soit un agent d’une banque suisse (le Crédit suisse par exemple et par hasard) qui est venu démarcher une de nos grandes fortunes orléanaises pour qu’elle paie moins et même encore moins que moins d’impôts. Comme un homme prévenu en vaut deux cet employé va s’évanouir dans la nature et hop un délinquant de plus dans les jardins publics.
Le maintien du mot « immigration » va de soi puisque c’est l’objet de cette délégation, d’autant plus qu’est immigré l’étranger qui s’introduit dans un pays qui n’est pas son pays natal. Cela fait du monde mais il ne faut pas rechigner devant la tâche s’il en va de l’avenir de notre pays.
En ce qui concerne le fait de substituer « illégal » à « clandestin » le choix fut certainement délicat car le mot clandestin évoque les boat people, la soute à charbon d’un paquebot autrichien et sa cargaison de coke en stock, le train d’atterrissage d’un Boeing ou encore les roues d’un 38 tonnes à Calais et cela peut inspirer de la pitié, voire de l’empathie chez des gens qui ne regardent pas assez la télévision ou qui croient que les êtres humains sont libres d’aller ou bon leur semble. Remplacer ce mot par « illégal » (ce qui est hors la loi) est un peu flou, brumeux comme un voile qui dissimule la réalité de la répression, pardon ! de la prévention car le délégué va devoir s’attaquer à tous les trafics illégaux : armes, drogues, prostitutions, blanchiments d’argent sale, fraudes en tous genres, lobbyings ( mot qu’on emploie pour désigner ceux qui viennent vous convaincre par tous les moyens qu’ils ont raison et qu’il faut les suivre) et tout ça rien qu’avec ses petits bras !.
Du coup l’immigré qu’on soupçonne de vouloir s’immiscer cheu nous de façon illégale va être mélangé avec les truands et autres bandits de grands chemins (aujourd’hui lignes aériennes) et, s’il y a une opération coup de filet sur les bords de Loire, attrapera-t-on d’abord les petits ou les gros poissons ?
Afin de simplifier la tâche, je propose que cette délégation soit ainsi nommée : « lutte préventive contre l’immigration clandestine illégale », les choses seront claires quoiqu’un peu redondantes, les points sur les « i » il en faut mais ce qu’il faut éviter à tout prix, si les autorités de l’Etat (c’est nous) venaient à regimber à nouveau, c’est une troisième formule du genre : « Délégation à la prévention de la lutte illégale, clandestine contre l’immigration ». Parce que là, on va croire que le conseil municipal s’engage dans un combat sans merci contre les immigrés, sans respecter la loi et en se cachant, ce qui la « foutrait mal » par les temps qui courent.
F Tarche
La toile qui accompagne ce billet est une œuvre d’Agnès Thouvenin Flesher, tirée d’une série intitulée MIGRATIONS.
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