Enthousiasmant. À l’occasion du week-end de clôture du onzième Concours international de piano junior Brin d’herbe, les interprètes ont donné samedi une nouvelle série de récitals puis, dimanche un magnifique concert des lauréats. Concurrents, parents, professeurs et jurés en communion.
Par Jean-Dominique Burtin.
Des claviers tels des rubans de fête

Poésie de Jean Rossignol. Photo: Patrick Nachbaur
Impressionnant est, ce samedi, la dernière journée de compétition du concours où se produisent, toujours dans un esprit festivalier, sept candidates et candidats. Une fois encore, grâce à la sélection réjouissante des jeunes artistes par la direction artistique d’Orléans Concours International place tour à tour à l’envol, au délié, à un répertoire tourbillonnant, à des claviers qui n’en finissent pas, tels des rubans de fête, de tournoyer dans la tête des mélomanes longtemps après le récital accompli.
Ce samedi, nous aimerons tout particulièrement le jeu perlé et à la fois incisif, le tutoiement furtif du clavier de Sumire Yoshikawa (13 ans, Japon). Bartok, Kurtag, Miharu Ogura sont ici au programme. Étincelante et fulgurante est, quant à elle, la prestation de Wexiuan Zeng (14 ans, Chine, Shanghai), un artiste qui nous offre une très belle interprétation de L’Illusion pour Boléro II, Boucle réfléchie, de Miharu Ogura, mais aussi des pièces renversantes de poésie de Ton Dun issues de Memories in Watercolor dont un prenant Floating clouds. Superbe est encore l’interprétation par cet artiste du numéro 3 de Eight Concert Etudies de Nikolai Kapustin, fabuleuse histoire de rythmes à l’énergie et au parfum résolument jazz. Si l’on aurait pu croire que venait ainsi de jaillir le bouquet final de la journée, c’était sans compter sur la venue d’Ethan Chan (16 ans, Angleterre, Glasgow), ultime candidat de ce concours qui avait regroupé vingt-sept participants.
Ce dernier pianiste nous distille, en effet, au piano préparé And the Earth Shall Bear again, de John Cage, pièce aux somptueux accents enrubannés de matière sonore à la fois ferme et ouatée. Puis avec son Serpent’ kiss, issu de The garden of Eden, composition de William Bolcom, l’Institut devient alors une éblouissante et enveloppante boite de jazz. Une fois encore, la qualité de jeu de certains candidats de Brin d’herbe, n’est plus qu’à deux doigts, frontière infime, de ce que l’on peut entendre dans le grand Concours international de piano d’Orléans. Cela étant, un autre joli coup de cœur est à décerner, ce samedi, à Jean Rossignol (12 ans, France) qui, pour sa composition Minuit sonne, l’enfant s’endort, laisse un ballon en forme de croissant de lune gonflé à l’hélium, surplombé dans les airs son piano.
De belles notes festivalières et des paroles à l’unisson
Faisant site à la délibération du jury, les prix ont été proclamés ce samedi, en fin de journée, dans une salle de l’Institut où s’étaient pressés, candidats, parents et professeurs. Toros Can, sur la scène, président du jury, prit la parole : « Il fut très difficile de décerner des prix tant le niveau du concours était élevé. Pour ceux qui n’ont pas de récompense cette année, ne renoncez pas. Je dois vous confier, en effet que lorsque je suis venu me présenter au grand concours d’Orléans en 1994 j’en suis ressorti sans distinction. Quatre ans plus tard je revenais et j’obtenais alors le Premier prix. Alors, je vous en prie, n’abandonnez jamais, don’t give up ! ».
Sodi Braide, autre juré : « Je voudrais féliciter tous les candidats pour leurs qualités exceptionnelles et leur potentiel. Cela nous fend le cœur de devoir choisir. Il y a toujours un élément subjectif. Choisir, c’est encore plus difficile car vous êtes des enfants, parce que vous êtes comme des arbres en train de grandir. Nous vous souhaitons à tous de devenir des arbres encore plus magnifiques que nous serons de nouveau ravis de venir écouter ».
Miharu Ogura, membre du jury et compositrice de l’œuvre imposée : « Il a été pour moi été si étonnant et si impressionnant de vous écouter durant ces trois jours. Vous êtes tous incroyables. Je n’ai pu qu’être touché par votre sincérité et votre engagement dans l’interprétation de mes pièces. Merci également à vos professeurs qui ont porté et permis cela ».
Quant à Isabella Vasilotta, directrice artistique d’Orléans Concours International : « Merci à chacun d’entre vous. L’essentiel est que chacun d’entre vous a pu profiter de cette expérience et de celle du grand concert collégial de dimanche. Vous avez tous été des passeurs de joie et avez déjà réussi à contribuer à transformer le monde ».
À l’issue de ces prises de paroles et des applaudissements de la salle, élèves parents et professeurs ont été invités à venir à leur convenance sur scène pour s’entretenir personnellement avec les membres du jury qui ne manquaient pas de revenir sur chaque interprétation, de donner des conseils et de toujours encourager. Respect.
Un concert de clôture collégial, une forte expérience
Accord unanime des uns et des autres. Dimanche, c’est dans une salle quasi comble que s’est déroulé le concert des lauréats, mais pas seulement celui de ceux-ci, car c’est l’ensemble des candidats qui s’est produit sur scène, chacun interprétant une pièce de son programme. À l’occasion de cet essentiel rendez-vous,
Isabella Vasilotta a tenu à remercier tous les acteurs de cette nouvelle aventure. Impossible ici de tous les citer mais soulignons l’apport des partenaires institutionnels, techniciens, familles d’accueil, conservatoire d’Orléans, membres du bureau de l’association et, bien entendu de
Françoise Thinat, fondatrice du concours dédié à la musique du XXe siècle et d’aujourd’hui, manifestation qui est sans doute unique au monde. Lors de cette belle journée qui a précédé la remise officielle des prix, soulignons la jolie prestation d’Éline Gimenez qui tient à prendre la parole avant de se mettre au clavier pour dédier son concert à sa petite sœur de neuf ans qui fête ce dimanche son anniversaire. Superbe est aussi la participation de Dylan Wu qui donne No good, morceau extrait de Dear Diary, œuvre de Frederic Rzewski pour pianiste parlant. Une création singulière et engagée. Propos : «
What did you learn in school today ? I learned that I am no good. Who told you that ? The Teacher. Don’t believe it ! Then the world is no good. Tell that to the teacher ». Ovation pour une œuvre singulière et engagée de 2014 aspirant à donner confiance à tout élève, un message que nous transmet un jeune pianiste, âgé de onze ans, venu à Orléans, de Boston. Une journée de dimanche… Et ici de pleine lune.
Palmarès
Premier Prix : Ethan Hu
Deuxièmes Prix : Dylan Wu
Troisième rixx : Agatha Rutsok
Premier Prix: Théo Grundmann Brechet
Deuxième Prix : Yuna Kim
Troisième Prix : Sumire Yoshikawa
Premier Prix : Weixuan Zeng
Second Prix : Nina Storozhenko
Troisième Prix: Annika Aruvainu
- Prix meilleure interprétation de l’œuvre imposée
Zeno Tomassini Barbarossa
Weixuan Zeng.
Etan Chan
- Prix d’improvisation et de composition
Rosa Potier
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