Dimanche 6 avril, le pianiste turc Toros Can et sa fille, la pianiste Beril Can, ont offert, à la salle de l’Institut d’Orléans, une magnifique Matinée du piano. Un récital émouvant et virtuose donné en ouverture du concours de piano Brin d’herbe.
Toros Can, souveraine expressivité. Photo Patrick Nachbaur.
Par Jean-Dominique Burtin.
Des retrouvailles enthousiasmantes et souriantes
Une fête ! Chaque venue du pianiste turc de renommée internationale en la salle de l’Institut, scène que son jeu et sa présence souriante ont marqué au fil des ans d’une manière indélébile, est source de bonheur. Rappelons que cet artiste, premier Prix du Concours International de piano d’Orléans 1998, se produisit au théâtre avec l’Orchestre symphonique d’Orléans sous la direction de Pierre-Alain Biget, qu’il donna en 2016 un concert hommage à Ligeti en la salle de l’Institut, et qu’il fut aussi, en 2018, l’un des jurés du 13e Concours international de piano d’Orléans. Pour la belle histoire, Toros Can sera, cette année, le président du jury du Concours international de piano junior Brin d’Herbe qui se déroulera du 10 au 13 avril prochains dans le très bel écrin du conservatoire d’Orléans, place Sainte-Croix.
Ce dimanche 6 avril, accueilli sur scène par Patrick Nachbaur, secrétaire d’Orléans Concours international, Toros Can ne devait pas manquer d’évoquer son plaisir de se retrouver à Orléans : « Cette salle de concert est pour moi très importante, elle me rappelle tant de souvenirs. J’y ai joué pour la première fois en 1994 dans le cadre du concours et, dès ce moment, toute ma vie a changé. Aujourd’hui, je suis venu accompagné de ma fille pour interpréter les Mikrokosmos, de Bartók, pièces que ce compositeur avait écrites pour lui et son fils. Je ne peux qu’espérer que vous apprécierez notre programme très contrasté ».
Isabella Vasilotta, directrice artistique
d’Orléans Concours International, dans une adresse, s’exprime sur
Toros Can, ses talents et son programme : «
Toros Can, pianiste d’exception que le concours est fier d’accueillir, est aussi un pédagogue passionné … et un père ! Il a transmis à sa fille son amour du piano et de la musique. Ensemble, ils ont enregistré il y a quelques années l’intégrale des Mikrokosmos, de Bartók. Depuis longtemps, nous cherchions l’occasion de présenter ce remarquable travail au public orléanais et quel meilleur moment que l’ouverture du Concours junior Brin d’herbe ? Avec ces Mikrokosmos, Bartók a profondément influencé la pédagogie musicale du XXe siècle, bien au-delà du piano. Le compositeur, connu aussi pour avoir puisé dans les chants populaires qu’il collectait en tant qu’ethnomusicologue dans les campagnes hongroises, a connu un cycle d’une richesse exceptionnelle pour l’oreille et la main des jeunes pianistes et pas seulement »
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Beril Can et Toros Can pour Mikrokosmos. Photo Patrick Nachbaur.
Un interprète à la hauteur de vue
En ouverture de programme, c’est avec une hauteur de vue souveraine que Toros Can livre les premiers et arrière-plans, toutes les perspectives sonores de Round O et de la Suite n°7 en ré mineur, de Purcell. Le toucher est ici ferme et cependant d’une douceur qui scande et distille à merveille les atmosphères de ces pièces. Puis surgissent les extraits de Musica Ricercata, de Ligeti. Place ici à des œuvres brèves pour lesquelles Toros Can se montre tel un promeneur familier, aérien et dansant, un conteur de couleurs et de climats qui ne peuvent tour à tour que captiver et toucher. Et voici de nouveau Purcell et ses fines arabesques, ses volutes aux pauses et élans. Pour les Mikrokosmos, de Bartók, place à l’enchantement. Beril Can, au clavier et au chant, charme les mélomanes avec la joliesse de la voix et le délié d’une pureté du jeu tour à tour incisif et d’une furtive langueur. Puis Beril Can laisse la place à son père qui, une fois encore, avec une netteté de feu, officie. En vérité, la communion de souffle inspirée des deux artistes est évidente, harmonieuse et sensible. Fulgurante. Accomplie.
En fin de programme, après une Suite, de Purcell, Toros et Beril Can se retrouvent pour un quatre mains au service de l’éloge de cinq pièces de Ligeti, dont trois danses de mariage d’une allégresse et d’une mélancolie heureuses. Ce dimanche, dans un très bel écrin, à savoir ce salon de musique qu’est la salle de l’Institut, Toros Can a convoqué ses compositeurs de cœur en faisant montre d’une personnalité énergique, subtile, toute en entente et écoute de l’écriture. À dire vrai, Toros Can a bel et bien ici levé le voile, d’une manière à nulle autre pareille, sur ces merveilleux mystères grâce auxquels se livrent l’intime étourdissant et le saisissant éclat. Offert par deux artistes, ce très beau récital s’est clos, en guise de rappel empli de pudeur et de miroitement poétique, sur une délicieuse Valse lente de Claude Debussy. Interprétée à quatre mains, cette dernière a invité les mélomanes, comblés, à quitter tout doucement la salle aux lustres de verre et fauteuils de velours rouge, bras dessus, bras dessous. La tête dans les musiques.
Une Matinée du piano dédiée par Françoise Thinat à la mémoire de Michel Moulis
À l’occasion de ce récital événement, Françoise Thinat, pianiste, pédagogue, fondatrice et présidente d’honneur d’Orléans Concours International, a tenu à adresser ces propos communiqués sur scène aux mélomanes par Patrick Nachbaur: « J’aurais été particulièrement heureuse de présenter ce concert donné par l’un des plus doués, des plus proches des idéaux du Concours d’Orléans et qui entraîne dans son besoin de transmission sa propre fille Beril, elle aussi très talentueuse. Je leur souhaite tout le succès possible et une suite heureuse au déroulement du concours Brin d’herbe qui me tient particulièrement à cœur. Mais je voulais aussi rendre un hommage sincère au grand ami de la musique qu’était Michel Moulis présent parmi nous en janvier dernier pour le concert en l’honneur de Jean-Etienne Marie et qui nous avait offert un texte magnifique pour cette occasion et qui vient de disparaître. Il a été un témoin fidèle et engagé de tout ce qui s’est passé dans cette salle et pas seulement pour le concours. Ses témoignages et la présence effective de son épouse Bernadette ont contribué à la construction de l’événement OCI et il aimait tout particulièrement le grand artiste qu’est Toros Can. Et je me permets personnellement de dédier à Michel Moulis cette très belle matinée du piano qui s’annonce. »
Concours international de piano d’Orléans junior « Brin d’Herbe »
Le 11e Concours international de piano d’Orléans junior « Brin d’herbe », se déroulera à la Salle de l’Institut du 10 au 13 avril 2025. Les 27 jeunes artistes de moins de 18 ans (Estonie, France, USA, Angleterre…) concourent en public, dans différents niveaux d’apprentissage et ont été retenus sur pré-sélection vidéo par Isabella Vasilotta directrice artistique du concours. Pour cette édition 2025 qui se déroule en public, les membres du Jury sont Sodi Braide, pianiste, Toros Can, Premier Prix du 12e Concours international de piano d’Orléans 1998, Miharu Ogura, Prix de composition Chevillion Bonnaud du 15e Concours international de piano d’Orléans 2022. À Miharu Ogura a été commandée, pour ce rendez-vous, une œuvre pour piano. Sa pièce, intitulée « Illusion pour Boléro », s’inspire du célèbre Boléro de Maurice Ravel, dont on célèbre en 2025 le 150e anniversaire de sa naissance. Le dimanche 13 avril, le concert des lauréats, où tous les candidats joueront « leurs meilleures interprétations », sera suivi de la remise des prix clôturant cette nouvelle édition.
Épreuves : du jeudi 10 avril au samedi 12 avril à 14 heures, salle de l’Institut, 4, place Sainte-Croix, Orléans
Annonce des résultats : samedi 12 avril à partir de 18 h30
Toutes les épreuves et le concert final des lauréats sont ouverts au public.
5€ ou 3€* / Demi-journée :
pour les épreuves des 10, 11 et 12 avril
5€ ou 3€* : concert final des lauréats le 13 avril à 15h
Pass 10€ ou 7€* : accès à l’ensemble des épreuves et au concert final des lauréats entre le 10 et le 13 avril
*Tarif réduit – Gratuité pour les étudiants et élèves des conservatoires de la Région Centre-Val de Loire
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