Le Département du Loiret, confronté à une dégradation de ses finances accentuée par une hausse continue des dépenses sociales, a validé son budget 2025. Ce dernier repose sur des choix difficiles, où économies et priorités sociales s’affrontent.
Le budget de la solidarité, en particulier la protection de l’enfance, continue de vampiriser les finances des départements. (Illustration) ©Unsplash
Par Mael Petit.
Le Département du Loiret navigue dans un contexte financier de plus en plus contraint. Les dépenses sociales explosent, les recettes stagnent, les leviers fiscaux ont été confisqués par l’État, et le marché immobilier – principale source de revenus via les droits de mutation – tousse encore malgré un léger sursaut en 2024. Résultat : une équation budgétaire quasi impossible à résoudre.
Privé depuis 2021 de toute autonomie fiscale après le transfert de la taxe foncière au bloc communal, le Département n’a d’autres choix que de jouer avec les miettes laissées par l’État. Et encore. Le gel en 2025 des fractions de TVA censées compenser cette perte vient enfoncer le clou. « Nous sommes aujourd’hui la banque d’un État qui navigue à vue. Il décide de geler nos recettes, nous retire tout levier fiscal. On se dirige vers la mort des départements », résume avec amertume Christophe Bouquet, vice-président aux Finances. Pour s’offrir un peu d’oxygène, le Loiret, tout comme l’immense majorité des départements de l’hexagone, a validé le relèvement du taux des DMTO de 4,5 à 5 %, espérant 7 millions d’euros supplémentaires en 2025. Mais une rentrée d’argent… conditionnée à un regain du marché immobilier.
La protection de l’enfance sanctuarisée
Alors, avec des recettes en berne et des dépenses sociales qui s’envolent, le Département a passé au peigne fin chaque ligne budgétaire. Le principal coup de rabot concerne le réseau routier. Le budget alloué à son entretien est amputé de 40 %, soit 20 millions d’euros économisés. Une décision qui tient plus du sursis que d’un virage durable : « Nous pouvons peut-être nous affranchir d’une année d’entretien mais cela ne pourra pas perdurer », avertit Hervé Gaurat, vice-président chargé de l’aménagement du territoire, qui craint une dégradation du réseau aux conséquences encore plus coûteuses à l’avenir. Mais le vrai poids sur le budget reste la solidarité, compétence cœur du Département. Le coût des Aides Individuelles de Solidarité (RSA, APA, PCH) augmente : +3,5 % en 2025, pour un total de 208 millions d’euros. Et en première ligne, la protection de l’enfance, dont les besoins explosent. Face à l’afflux de mineurs non accompagnés, le Loiret a l’ambition d’atteindre 150 places d’accueil d’ici la fin 2025. Une priorité onéreuse, surtout avec l’augmentation récente de jeunes enfants de 0 à 5 ans, nécessitant des structures spécifiques. « Cela suppose des adaptations bâtimentaires coûteuses », explique la vice-présidente chargée de la protection de l’enfance, Florence Galzin.
Face à cet empilement de charges imposées sans compensation, la coupe est pleine. Le Département a tranché : il ne paiera pas la revalorisation de 1,7 % du RSA de ce mois d’avril. Un acte autant comptable que politique. La CAF a bien versé cette hausse aux bénéficiaires, mais sans que le Département n’honore la facture. Et Marc Gaudet, président du Département, de s’aligner sur ses homologues des différents départements gérés par la droite : « Ceux qui décident doivent payer ».
Le planning familial trinque, pas le festival de Sully
Les économies n’épargnent aucun secteur, ou presque. Les subventions aux associations culturelles, sportives et sociales baissent de 5 %, certaines structures d’insertion encaissent une réduction de 15 %. Et au rayon des coupes qui ont suscité l’émoi : le Planning Familial du Loiret voit sa subvention réduite de 10 %, soit 47 000 euros de moins. Une décision assumée par la majorité. « Tout le monde doit faire un effort. Par ailleurs on rappelle que notre niveau d’accompagnement est sans commune mesure si on regarde nos voisins dans la région », glisse Mme Galzin. Le Département invite l’association à aller chercher ailleurs ce qu’il ne veut plus donner. Reste que le symbole est lourd.
Car en parallèle, le festival de Sully, lui, échappe à toute cure d’austérité, ce que souligne l’opposition qui n’a pas manqué de pointer un double discours sur les priorités. Mieux : il affiche un budget record dépassant le million d’euros – en raison des cachets d’artiste qui s’envolent – malgré une édition dite « allégée » (baisse du nombre de concerts). La montée en gamme est revendiquée par l’exécutif. BigFlo et Oli, Louis Bertignac ou Natasha St-Pier ne se déplacent pas pour une poignée de cerises. « Gouverner, c’est faire des choix », avait tranché le président Marc Gaudet, interpellé à l’occasion de la présentation du festival. Traduction : le festival de Sully est une vitrine du territoire, pas une ligne d’ajustement.
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