En avril, au château de Cheverny, l’abondance d’œufs, de lapins et de tulipes vaut son pesant de chocolat. Mais en cette inspiration de Moulinsart, l’ombre du capitaine Haddock empêche un peu de mettre sous cloche une actualité bruyante comme mille tonnerres de Brest.
Par Mag’Azine.
« N’est pas naufrageur qui veut, moussaillon de malheur. Aucun canard ne me prendra pour un moule à gaufre ou un bachi-bouzouk ! ». En ce soleil printanier, la tribu taupienne a rendu visite à quelques cousines du Loir-et-Cher pour faire un peu commerce de nourriture. Dans les galeries, l’économie souterraine se dispense d’octroi et de taxes abusives avait assuré la grande argentière, faisant fi des propos de sa consœur archiviste. Car, précisait celle-ci, vous qui voulez admirer les 500 000 tulipes enrubannées dans le parc du château de Cheverny, sachez que cette fleur est à l’origine du premier krach boursier de l’histoire. De quoi faner leur enthousiasme en les ramenant à l’actualité.
Ainsi, en février 1637, au sommet de sa gloire, la tulipomanie faisait qu’un seul et unique bulbe de tulipe s’échangeait contre l’équivalent de 10 fois le salaire annuel d’un artisan qualifié. Une cote qui retomba bien vite, provoquant la première crise financière au monde.
À croire que les boursicoteurs ne sont toujours que des mous du bulbe, s’écria une jeunette, le nez dans Les Bijoux de la Castafiore, album de Tintin acquis à l’entrée du domaine à la boutique éponyme. L’histoire se déroule à Moulinsart, à la façade inspirée à Hergé par ce lieu et propriété du capitaine Haddock. Un brin persifleur, son fantôme leur souffla alors que les jardiniers avaient évité d’accoler dans les parterres les variétés de tulipes Groenland et American dream.
Se prenant au jeu d’être reporter du Petit vingtième, quelques taupinettes ont relevé dans la visite du lieu quelques étrangetés. Elles y ont apprécié le travail des paysagistes et autres décorateurs des salles du château, où œufs de Pâques et lapins malicieux rivalisent d’ingéniosité pour habiter les décors avec élégance. Mais elles ont aussi suivi avec un œil dubitatif sept militaires estampillés Vigipirate qui faisaient le tour du parc, insensibles à l’environnement, même en passant entre les six statues signées Gudmar Olovson glorifiant l’amour. Certes, vigie et pirates sont indissociables du capitaine Haddock, mais, mille sabords, comme pour la Licorne, cela paraissait un peu surréaliste.
La visite valait le voyage, même sans coke en stock, s’enthousiasmait au retour la tribu. D’aucunes ont notamment apprécié l’hommage rendu dans le parc à leurs amis les castors, artisans besogneux de la Sologne, et d’autres se demandaient si le Professeur Tournesol avait vu dans une de ses sept boules de cristal que ses roses tant aimées seraient remplacées par des tulipes. On était loin, là, du Pays des soviets, et à mille miles de rêver à partir sur la lune.