Ce vendredi 4 avril, le maire de Mareau-aux-Prés (45), Bertrand Hauchecorne lui-même professeur de maths, recevait Laure Saint-Raymond, mathématicienne de renom, représentante de l’Académie des Sciences dans le cadre d’une démarche de réflexion collective autour du devenir de l’école intitulée « Si on vous dit école, de quoi rêvez-vous ? »

Laure Saint-Raymond de l’Académie des Sciences. cl GP
Par Gérard Poitou.
L’Académie des Sciences, qui réunit les plus grands noms de la recherche, a décidé de constituer un groupe de travail autour de l’école dont le but est de développer une réflexion pour construire l’école de demain. Ce projet ambitieux repose sur une large consultation des acteurs de l’école à la fois pour mettre en lumière les actions positives déjà engagées et ouvrir un dialogue constructif autour de « l’école dont nous rêvons ». Ce tour de France prévoit de réunir à chaque étape tous les acteurs concernés par l’école, enseignants, parents, élus locaux, collectivités et associations pour développer des propositions concrètes sur l’avenir de l’école.
Mareau-aux-Près était la troisième étape de cette grande consultation, l’occasion de présenter quelques belles initiatives locales en matière d’enseignement innovant. Plusieurs d’entre elles furent présentées comme la rénovation concertée de la cour de récréation d’une école primaire à Saint-Cyr-en-Val qui permit un travail très riche dans l’élaboration collective de ce lieu incontournable en concertation avec une architecte. La place des bibliothèques dans l’action éducative ou l’initiation à la vie municipale étaient au programme avant la présentation d’une expérience éducative initiée dans le cadre de « vacances apprenantes » proposées à des élèves d’un collège de Saint-Jean-de-la-Ruelle. Sur trois jours, un atelier cuisine permettait d’initier de façon pratique les participants à des concepts mathématiques et chimiques de base comme les mesures, la proportionnalité ou les changements d’état induits par la chaleur.
Ces présentations de terrain étaient suivies de tables rondes proposées aux participants sur trois thèmes :
- Comment organiser l’établissement scolaire ?
- Prof, un métier de lien, un métier de demain
- Élève, une multitude de capacités à développer, sur quels adultes s’appuyer
Interview de Laure Saint-Raymond
Vous êtes une scientifique, qu’est-ce que cette démarche de l’Académie vous apporte ?
Nous en sommes à la troisième réunion sur le terrain et plusieurs choses me frappent. D’abord, on découvre de belles initiatives dans les écoles dont on ne parle jamais. C’est un de mes combats : mettre en lumière ce qui fonctionne, notamment dans les médias, et pas seulement retenir ce qui ne marche pas à l’école.
Il y a aussi plein de professionnels qui font bien leur travail. C’est essentiel de le reconnaitre, pour l’estime qu’on leur porte mais aussi pour la considération qu’on a vis-à-vis de l’école. Un autre aspect positif, c’est que ces rencontres de terrain, dans leur préparation comme sur place, permettent à des acteurs qui n’avaient jamais travaillé ensemble de se réunir. Et je crois profondément à l’intelligence collective de ces échanges.
En tant que scientifique de haut niveau, comment considérez-vous cette mission de l’Académie ?
Je suis membre de l’Académie des sciences qui a notamment pour mission de s’occuper de l’enseignement des sciences. Et donc c’est un sujet dont on parle depuis longtemps, mais on se rend compte aussi qu’il est impossible de réfléchir à l’enseignement scientifique sans le relier à l’ensemble du système éducatif.
Aujourd’hui il n’existe pas vraiment de lieux pour que l’école se repense elle-même, alors qu’elle tente de s’adapter depuis l’école de Jules Ferry. C’est une évolution qui est nécessaire et qui doit être portée par une vision collective. La question c’est : où est ce lieu ?
Ce qui nous anime, c’est la conviction que l’école est un fondement de la démocratie, à la fois dans son vivre-ensemble et dans l’éducation. L’Académie des Sciences, en tant qu’institution pérenne et neutre politiquement, peut contribuer à impulser ce changement.
Vous avez bon espoir de faire bouger les choses ?
Nous avons rencontré beaucoup d’institutions : l’association des maires de France, l’inspection générale, la DRH de l’Éducation nationale, les organisations syndicales… Et ce que je vois, c’est qu’il y a un certain consensus sur la nécessité d’évoluer.
Je pense que c’est important à tous les niveaux de rendre du pouvoir d’agir aux gens – donc à l’élève dans la classe, aux enseignants pour organiser leur enseignement, aux communautés éducatives – pour avoir un pilotage local en lien avec les différents partenaires. Ensuite il faut que le politique s’empare de ces dynamiques, ce qui n’est pas si simple sur cette question d’actualité.
Dans l’actuel contexte international, est-ce qu’on peut dire que la science participe aussi à la démocratie ?
Oui, absolument. La science participe à la démocratie dans sa méthode, par rapport à une vérité qui s’établit par une démarche où l’on peut se tromper, faire des hypothèses, expérimenter, évaluer… Je pense que cette démarche scientifique est vraiment un outil pour la démocratie.
Elle porte également l’idée du travail collectif que l’on a tendance à perdre, outil pourtant essentiel au débat. Nous vivons dans une société qui est devenue extrêmement technologique et la science a non seulement des réponses à donner, mais elle offre surtout un cadre pour penser librement. Et cela me semble fondamental.
Plus d’infos autrement :
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