Najat Vallaud-Belkacem s’est rendue au lycée Jean Monnet de Joué-lès-Tours à l’occasion de la semaine des droits des femmes. L’ancienne ministre des Droits des femmes et de l’Éducation est venue rencontrer l’équipe pédagogique et animer une conférence sur l’égalité filles garçons à l’occasion de cette semaine qui précédait la journée du 8 mars.
Par Asmaa Bouamama.
Si plusieurs sujets ont été abordés, Najat Vallaud-Belkacem est souvent revenue à son point central de réflexion qui avait rythmé ses presque trois années au sein du gouvernement lors du mandat Hollande. L’égalité face à l’accès au travail et à la formation professionnelle, c’est un peu sa boussole, un combat qu’elle a régulièrement porté lorsqu’elle fut sur le devant de la scène politique.
Blocage professionnel
Elle commence par rappeler un point intéressant que les sociologues constatent depuis bien longtemps, à savoir que les filles réussissent beaucoup mieux que les garçons dans le cadre scolaire, avec des parcours moins linéaires qui les rendent plus timides voire taiseux une fois sortis du système encadrant. C’est là que les hommes deviennent peut-être plus audacieux avec moins de retenue à prétendre des postes de directions, qui sont en majorité occupés par la gent masculine. La question des compétences est donc écartée puisque les filles, au départ, ont des facultés d’apprentissage supérieures et plus précoces que les garçons. Mais la majorité des métiers sont non mixtes et les choix d’orientation sont encore orientés inconsciemment par les prismes qui influencent les rôles des filles et futures femmes qu’elles pensent devoir devenir. Comme si les filles étaient naturellement éduquées pour convenir à l’objet d’un désir qui les précède, qui leur est imposé, plutôt que d’être actrices de leur propre trajectoire. Najat Vallaud-Belkacem cite en introduction les travaux intéressants et révélateurs de
l’anthropologue Françoise Héritier qui a beaucoup travaillé sur l’origine de ces déterminismes et qui a démontré combien les inégalités capacitaires entre les filles et les garçons sont bien souvent des idées reçues erronées.
Silence des hommes
L’ancienne ministre des Droits des femmes revient également sur les derniers événements médiatiques, actualité marquée notamment par le procès des viols de Mazan. « Il y a beaucoup de monstres quand même », déplore-t-elle tout en regrettant l’attitude des hommes qui se retirent à pas de loup du débat derrière des slogans comme « not in my name » (pas en mon nom), laissant les femmes seules face aux monstres. Les hommes n’ont pas encore de positions claires et « n’entrent pas encore assez dans le débat public ». Sans compter la multiplication des mouvements masculinistes réactionnaires qui naissent sur Internet et sur les réseaux. « On ne prend pas assez au sérieux ces mouvements, s’alarme Najat Vallaud-Belkacem, et un jour il faudra se demander qui les finance et qui est derrière car ils représentent un vrai danger ». La dangerosité de l’engagement féministe elle la connait, elle rappelle qu’être activiste féministe, c’est risquer des menaces de meurtre et de viol tous les jours. « Dans ces moments-là on aimerait que les hommes qui, eux, s’en prennent moins la gueule, prennent un peu la parole et tiennent un rôle, sans jouer les super-héros, mais qu’ils soient juste là pour tenir un rôle ».
Pour Najat Vallaud-Belkacem, le chemin est encore long même si on revient de très loin. À titre indicatif et pour illustrer le parcours qu’il reste encore à frayer pour caresser l’idée d’une égalité filles garçons face à la formation, elle rappelle « qu’il faudra attendre 2070 pour que les écoles d’ingénieurs aient l’égalité ». Ou encore que les femmes touchent aujourd’hui des retraites de 40% inférieures à celles des hommes, sans raisons établies. En effet, le chemin reste encore trop long et semé d’embûches.
Image en avant : Pexels ©Anastasia Shuraeva
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