Adoptée largement – à l’exception du RN qui a voté contre – ce jeudi 6 mars par le conseil régional, la stratégie régionale de l’Économie Sociale et Solidaire donne de nouveaux outils à cette « autre économie » pour se structurer et se développer. Caroline Dumas, directrice de la chambre régionale de l’ESS nous explique les avancées obtenues.
Caroline Dumas, directrice de la chambre régionale de l’ESS. © Magcentre
Propos recueillis par Jean-Jacques Talpin.
Comment qualifiez-vous la stratégie adoptée par le conseil régional ?
C’est une stratégie ambitieuse avec de nouveaux axes comme la nécessité de se développer et de se structurer sur tout le territoire de la région. Cela nous donne de nouveaux outils pour essaimer, pour tisser des liens avec les entreprises de l’économie capitaliste et avec les collectivités locales. Mais il y a aussi des avancées sur la formation des jeunes avec le besoin de sensibiliser dès le plus jeune âge.
La concertation a-t-elle été menée à son terme pour définir cette stratégie ?
Nous sommes satisfaits car nous avons été associés dès le début de la démarche pour définir les priorités à mobiliser. La maison régionale de l’ESS a été la cheville ouvrière notamment avec des ateliers réunis dans chaque département. Cette stratégie va donc être pilotée avec les acteurs de cette économie et pour la première fois avec des indicateurs et des objectifs précis comme la volonté de multiplier par deux les effectifs en SCOP.
Certains craignent une distorsion de concurrence avec l’économie classique ?
Nos entreprises et certaines associations payent la TVA comme tout le monde. Nous avons également les mêmes devoirs en termes d’impôts, de charges. Par rapport aux aides de l’État, au CICE, nous sommes même défavorisés avec un rapport de 1 à 10 en notre défaveur. Quand les associations reçoivent des subventions, c’est souvent sur délégation de l’État ou des collectivités pour assumer des missions de service public. Nous ne sommes pas en opposition à l’économie capitaliste mais en coopération.
Qu’attendez-vous maintenant de ce document ?
C’est une stratégie qui correspond à nos attentes. Mais ce qui nous importe maintenant c’est sa mise en œuvre et comment mettre en action en mobilisant tous les acteurs des territoires afin de renforcer notre maillage territorial. Il faut se mettre au travail et chercher encore d’autres pistes de progrès en particulier liées à la finance solidaire.
Dans quel contexte évolue aujourd’hui l’ESS ?
Comme tout le tissu économique nous sommes inquiets. Avec le projet de budget de Michel Barnier, nous avions chiffré à 6 500 les emplois régionaux en danger. Avec le budget Bayrou ce sera un peu moins pire, mais difficile tout de même notamment pour ce qui est du médico-social, de la culture et du sport, de l’insertion par l’emploi. Cela touchera plus durement les associations qui ont besoin de subventions et qui n’ont pas de vision claire des aides de l’État et donc de leur avenir.
On dit que l’ESS est plus résiliente que l’économie capitaliste…
C’est vrai parce que nous n’avons pas les mêmes besoins de rentabilité ou de profit. Et de plus, nous avons la capacité de renforcer la solidarité et les liens entre les différentes familles de l’ESS. Certaines comme les banques ou les mutuelles se portent mieux, il faut donc renforcer nos liens internes pour participer à la transformation des modèles économiques.
Pour autant, l’ESS n’est pas une économie idéale et hors du temps ?
C’est vrai car nous avons souvent les mêmes contraintes que tous les employeurs. Ce n’est pas un monde des bisounours. La réalité nous rattrape parfois sur la précarité des salariés, de l’égalité hommes/femmes, du droit du travail. Nous essayons pourtant de faire respecter des règles afin de ne pas perdre nos valeurs et notre âme.
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