Championne de France le dimanche, agente d’entretien la semaine

Femme de ménage et animatrice cantine la semaine, championne de France le week-end, c’est le lot de la Berruyère Célia Tabet sacrée à Challans, en Vendée, sur le cross court. Après ce second titre, comme après celui de 2023, rien ne devrait changer pour son statut de salariée à la ville de Bourges. Elle a repris le chemin des gymnases, non pas pour des séances d’entraînements… mais pour y faire le ménage !

Celia Tabet aux championnats de France de cross court
Célia Tabet (au centre) vient de remporter pour la deuxième fois les championnats de France de cross court en Vendée ©Jean-Marie Hervio


Par Fabrice Simoes.


« Il n’y a pas de sots métiers, il n’y a que de sottes gens ». Mirabeau ne pensait pas que son précepte devenu proverbe ferait sens dans l’athlétisme du XXIe siècle. Pourtant… La première monte tout en haut de la boîte pour recevoir les médailles, les couronnes de laurier, et les louanges aussi. La seconde est au pied du podium pour ramasser les papiers qui traînent, et les feuilles tombées au sol. Pourtant, la Célia des cross du dimanche, internationale aux Europe de cross en Turquie, est identique à la Célia des gymnases et des cantines dans la semaine en Berry.

À l’heure du laitier, du temps où il passait, la Berruyère enfile une blouse et des gants plutôt que son survêt. Les tours de gymnase s’enchaînent alors que, pour une nouvelle progression, il faudrait faire des tours de piste supplémentaires. Franchir un palier de plus demanderait cependant des séances bi-hebdomadaires d’entraînements mais avec des horaires de travail plutôt matinaux, c’est compliqué. Difficile dans ces conditions d’être à armes égales avec des athlètes plus « reconnues » plus « protégées ». Même durant la course vendéenne, les commentateurs l’avaient un peu oubliée avant le dénouement favorable. Le commentaire sur le site de la FFA est d’ailleurs éclairant. « Le hasard a voulu que Flavie Renouard (Caen AC) trébuche au moment où Célia Tabet (Bourges Entente Athlétisme) plaçait une accélération en tête d’un peloton bien regroupé à l’amorce de la deuxième et dernière boucle… » C’est bien un signe que, malgré les podiums, les sélections, pour exister et malgré une course ultra-maîtrisée, il faut être présent dans le viseur des médias, dans celui de la fédération aussi, tout le temps. Mais pour ça, outre les performances, même levée aux aurores, il faut de la disponibilité.

Berrichonne de l’année 2023

Manque de visibilité alors que les résultats sont là, avec une nette progression liée à l’apport de ses entraîneurs successifs, mais pas de notoriété outre mesure. Désignée « Berrichonne de l’année 2023 » par les lecteurs du Berry Républicain, le journal local, devant un chef étoilé et un pur-sang, Célia Tabet n’a pas changé de statut. Elle fait les ménages comme avant et bosse à la cantine aussi. Du côté de la fédération, ce n’est pas que l’on ne s’en occuperait pas mais, avec la découverte d’un déficit de plusieurs millions d’euros, la Fédération Française d’Athlétisme a d’autres chats à fouetter que des athlètes, surtout féminines et qui plus est hors Île-de-France.

Alors Célia va au turbin tous les matins. L’après-midi est libre pour un peu de récup et un peu d’entraînement. Le temps, pas si lointain, n’est plus aux grilles enjambées pour atteindre les pistes d’athlétisme. Par contre, le temps de l’athlète salarié(e), en France, n’est pas encore arrivé. Quelques-uns y sont parvenus. Pour beaucoup le chemin est long. Dès lors, les capacités de progression de Célia ne sont pas complètement définies. Une certitude, chaque changement de volume a permis d’accéder à un niveau supérieur. Cette saison, après son succès sur les 10 km de la corrida d’Houilles (Yvelines), la Berrichonne devrait se tourner un peu plus vers les courses sur route. Un créneau où elle pourrait intégrer un team spécialisé et les plateaux de coureuses à contrat. Mais aussi connaître une nouvelle notoriété sportive. Peut-être qu’un équipementier en profitera pour « investir » sur cet avenir au féminin qui peut se dessiner sur plusieurs années. Cela mettrait un peu de beurre dans les épinards. Peut-être que, pour être au plus près de son entraîneur actuel, Dominique Kraemer, un déménagement du côté de la Moselle, sera nécessaire. Peut-être que sa ville de naissance fera un effort pour lui dégager quelques heures d’entraînements. En bien des villes, les sportifs, tant mieux pour eux, souvent des footeux, ont des horaires, et des fonctions, très aménagés. Peut-être que…


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