Un projet de parc naturel régional est en gestation depuis 2017. Il rassemble des communes de l’Indre et du Cher. Au moment d’attaquer l’écriture de la charte, l’unanimité se lézarde. Les associations ne baissent pas les bras.
Le périmètre du futur PNR Sud Berry (cartographie Rouge Vif Territoires)
Par Pierre Belsoeur.
Si Marc Fleuret, président du conseil Départemental de l’Indre, pensait avoir sifflé la fin de la récréation en prenant position contre le projet de Parc Naturel Régional Sud Berry, c’est raté. Dimanche 23 février, la salle mise à la disposition du collectif de soutien au projet s’est révélée deux fois trop petite pour accueillir ceux qui souhaitaient participer à la conférence débat. Il faut dire que cette réunion se tenait dans le cadre de la Journée des végétaux qu’organise la société pomologique du Berry, à Neuvy-Saint-Sépulchre. Un lieu où se retrouvent les amoureux du jardinage, greffeurs, collectionneurs de variétés anciennes et gourmands de jus naturels. Bref un PNR pour le Boischaut-Sud, région de bocage réputée pour ses haies, voilà qui motive évidemment les amateurs de végétaux anciens.
Opposition à une page blanche
L’Indre a expérimenté depuis plus d’un quart de siècle de dispositif de PNR, en Brenne. Il permet, au moins, au plan environnemental de préserver cette zone humide. L’originalité du projet Sud Berry, c’est qu’il dépasse la frontière départementale (lire par ailleurs) pour faire travailler ensemble des collectivités de l’Indre et du Cher. Le fait que le Boischaut-Sud, présent dans les deux départements, se distingue par ses haies ayant survécu au remembrement et par le maintien de l’élevage comme activité agricole principale, justifie ce choix. Au niveau régional il s’agit de deux territoires de la région Centre-Val de Loire, ce qui ne présente pas de problème de traitement particulier.
La prise de position du président du Conseil départemental de l’Indre, mais surtout du président du Pays de La Châtre estimant que l’élan général indispensable au lancement d’un PNR n’était plus au rendez-vous, a déclenché la constitution d’un collectif de soutien. Pour les défenseurs du PNR ce n’est justement pas aux élus de prendre position, mais aux citoyens. « Ceux qui sont contre s’opposent à une page blanche, écrivons d’abord la Charte et ensuite chacun se positionnera ». À ce sujet, Laurent Laroche, président du PNR Brenne, a rassuré l’assistance. « Les communes membres du PNR ne l’ont jamais quitté et au contraire de nouvelles communes y adhèrent les unes après les autres. C’est bien qu’elles doivent y trouver leur compte ».
Autrefois on ne plantait pas de vergers. Les arbres fruitiers poussaient dans les haies, ce qui a permis à la société pomologiste de sauvegarder des variétés anciennes. Photo PB
Dominique Viard, vice président d’Indre Nature et coordinateur des 55 associations regroupées dans le collectif, n’a pas voulu embellir le tableau après la projection du film sur les exemples de PNR déjà en place sur le territoire national, mais a rappelé qu’un PNR c’est un label de qualité. Une opportunité tant pour l’aspect touristique que pour la mise en valeur des productions. Au passage l’Indre et le Cher ont un vignoble en commun. La délimitation de la zone AOC Châteaumeillant couvre à parts égales le Cher et l’Indre, même si ce dernier département est actuellement beaucoup moins planté.
Une opposition politique ?
Les Conseils départementaux de l’Indre et du Cher ont des majorités de droite alors que le Conseil régional est à gauche. Il n’y avait que des conseillers régionaux de gauche à cette réunion. Il est évident qu’un PNR peut-être considéré comme une perte de pouvoir pour les dirigeants départementaux (Le président du Pays de Saint-Amand reste pour sa part partisan du PNR). Par ailleurs le Département de l’Indre est engagé dans un projet Indre 2030 qui cible des objectifs précis et le PNR ne figure pas dans ses priorités. Il finance également une agence d’attractivité du territoire et là encore l’ambition du PNR écorne le pré-carré de l’agence. La seule réponse que peut opposer le collectif, c’est de générer un élan indispensable, en multipliant les actions d’information. À suivre donc.
L’art de la greffe, qui attire des milliers de visiteurs à Neuvy-Saint-Sépulchre. Photo PB
Le PNR sud Berry
L’idée de PNR a émergé en 2017. L’étude d’opportunité (financée par la Région) a été menée en 2017-2018. En 2020 le PNR a obtenu l’avis favorable de l’Etat sous réserve de réduire le périmètre. En 2022 les deux Pays ont délibéré sur ce périmètre réduit. En 2023 l’étude sur la gouvernance du PNR a été menée. Le projet entre dans sa phase de préfiguration avec la rédaction de la charte : « On se rassemble pour faire quoi et comment ». On est encore très loin du classement par décret du 1er ministre qui serait le point final du projet.
Il rassemblerait 102 communes (55 dans l’Indre, 47 dans le Cher) appartenant à sept communautés de communes (quatre seulement intégralement) et deux Pays. Il concernerait 58.000 habitants et comprendrait deux villes phares : La Châtre dans l’Indre et Saint-Amand-Montrond dans le Cher
Il aura pour objectif de maintenir l’élevage et proposer une alimentation locale durable ; agir sur la dégradation du bocage de l’eau et de la biodiversité ; activer les leviers du tourisme pour renforcer l’attractivité ; intégrer le patrimoine architectural et culturel du Berry.
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