En déplacement en Nouvelle-Calédonie, le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, a affirmé l’existence des Kanak, peuple premier de Nouvelle-Calédonie. Une vérité scientifique révisée par les élus loyalistes qui se sont indignés bruyamment. L’ancien Premier ministre est resté ferme. Cette altercation révèle une profonde fracture dans la population.
Le ministre des Outre-mer Manuel Valls en Nouvelle Calédonie face au député Nicolas Metzdorf. ©Province Sud
Par Philippe Voisin.
On désigne peuple premier, les peuples et leurs descendants qui occupent la terre des premiers occupants et partagent la même culture. Selon cette définition, les anthropologues assurent que les Kanak sont bien un peuple premier. D’autres termes ont pu être utilisés dans la littérature : peuple indigène, peuple nation, peuple racine, peuple natif, peuple autochtone. Tous ont relégué l’appellation péjorative de peuples primitifs si souvent utilisée dans les sociétés colonialistes.
Cette semaine, en posant le pied sur le caillou, Manuel Valls n’a pas commis une faute grave en rappelant l’importance du peuple premier Kanak au Sénat Coutumier. Qu’un ministre de la République affirme cette évidence devant une institution légitimée par les accords de Matignon, c’est une nécessité, une fierté ! Il démontre que la France respecte sa parole et confirme son statut de neutralité dans le processus de décolonisation. C’est une main tendue après des années d’errance politique. Un peuple premier n’est pas un peuple supérieur aux autres. Il est juste antérieur !
Poteau contemporain représentant l’aire coutumière Hoot Ma Waap à la Maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris. Crédit MNC/Patrick Gries
Qui oserait dire le contraire ?
Conférer aux peuples premiers une autre valeur que temporelle en dévalorisant les autres peuples est un contresens. Une interprétation que n’ont pas hésité à mettre en scène les anciens amis du président Emmanuel Macron, les Loyalistes farouches Sonia Backès, ex secrétaire d’État à la citoyenneté et le député Ensemble pour la République Nicolas Metzdorf (rapporteur d’une mission parlementaire sur la Nouvelle-Calédonie), quand ils interpellent le ministre de l’Outre-mer : « Quand tu parles de peuple premier, tu ne nous respectes pas. Tout le monde doit se sentir premier en Nouvelle-Calédonie ». Premier en quoi ?
Pour les manipulateurs, les mots sont parfois plus dangereux que les armes. Derrière, la haine n’est jamais loin surtout dans ce territoire fréquemment endeuillé par des explosions de violences où la parole est loi. On reconnait là ceux qui font obstacle au chemin de paix qu’il faut bien reconstruire, ceux qui s’engagent sur la voie dangereuse de la partition de l’archipel, loin du vivre-ensemble et du destin commun exprimés dans les accords historiques de Matignon-Oudinot et de Nouméa.
Cette triste séquence ressemble à une provocation avant les nouvelles négociations sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie que Manuel Valls va ouvrir cette semaine.
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La question kanak vue de la Touraine #1