Par Jean-Dominique Burtin.
Exceptionnelle sera la vente aux enchères de la sculpture “L’âge mur”, de Camille Claudel (1864-1943), dont l’estimation est déjà comprise entre 1,5 et 2 millions d’euros. « La Jeunesse et L’Âge mûr », dit ensuite « L’Âge mûr », modèle créé en 1899, est un bronze à patine brune nuancée, fonte au sable, 1907 Signé « C. Claudel » sur la terrasse, cachet du fondeur EUG. BLOT PARIS (pour Eugène Blot), n°1 sur la terrasse H. 61,5 L. 85 cm P. 37,5 cm.

Pierre Boulez Buste de Sylvie Desmoulin cl .JDB
De
Sylvie Desmoulin, nous connaissons entre autres
le buste de Maurice Genevoix installé sur le quai Barentin, à Orléans.
Son buste de Pierre Boulez sera bientôt installé sur l’esplanade Pierre Boulez à Montargis. À notre demande, cette artiste a bien voulu nous adresser cette communication en date du 31 janvier 2025.
Sylvie Desmoulin : « Mon regard sur une œuvre est celui d’un sculpteur, différent de celui d’un biographe ou d’un historien de l’art. Ma lecture visuelle de ce chef-d’œuvre de Camille Claudel, s’attache à en lire la composition, à comprendre les choix réalisés par son auteur pour exprimer toute la charge émotionnelle qui y est contenue, en tentant d’en oublier le contexte et les nombreuses interprétations autobiographiques ».
Dessin d’étude de Sylvie Desmoulin. Photo JDB.
Mouvance
« La base de la sculpture est réalisée en deux parties qui semblent glisser l’une sur l’autre dans une véritable dynamique de tectonique de plaques et une dérive des sentiments. Bien distinctes, les deux parties se situent à deux hauteurs différentes et leur aspect, à y regarder de plus près, évoque deux matières bien différentes. La base la plus basse comme une boue répandue, (à moins que ce soit un sable mouvant), semble vouloir engloutir la figure féminine à genoux. La base la plus haute contient plus d’énergie. Elle se prolonge par une vague qui s’enroule : comme un cours d’eau dont le courant contribuerait à emporter, la figure masculine debout ».
Tension, déséquilibre et basculement
« L’ensemble de la composition du groupe sculpté est caractérisé par le déséquilibre. Les figures humaines sont toutes en mouvement, et leurs silhouettes s’enchainent, marquant par le prolongement des lignes de leurs mouvements, le lien qui les attache les unes aux autres. Cependant cette continuité de la ligne de composition est interrompue sur quelques centimètres entre les deux mains de l’homme et de la femme : c’est dans ces quelques centimètres que se situe la tension maximale de l’œuvre. On y lit que ces deux mains devaient encore être jointes dans l’instant précédent, et qu’elles s’éloigneront inexorablement dans le temps suivant. C’est le moment de la bascule. »
Dramaturgie
« Les personnages représentés sont dans des attitudes et positions très évocatrices de l’emprise et de la déprise. La figure féminine implorante, à genoux (dont un genou s’enfonce déjà) est en déséquilibre vers l’avant et laisse présager la chute qui va suivre car la main qui lui assurait son équilibre s’est détachée de la sienne. C’est la déprise… l’abandon.
Les mains. Photos Philorcale.
Sa silhouette est frêle et juvénile, sa fragilité ne fait aucun doute. Elle laisse tomber sa tête sur le côté, comme ayant renoncé à sa propre dignité, comme à bout de force. La chute et le naufrage sont imminents. La figure masculine, à la morphologie plus âgée*, s’éloigne d’elle, dans une démarche lourde. Lui aussi et en déséquilibre avant : le haut de son corps est entrainé par le troisième personnage, alors que ses jambes sont freinées par un pas lourd. Sa tête est basse évoquant la résignation ou la soumission. Si Camille Claudel avait voulu lui faire exprimer le regret ou l’hésitation, alors aurait alors dirigé son regard en arrière, vers la jeune fille, ce qui n’est pas le cas.
La troisième figure est plus mystérieuse, insaisissable et même spectrale. Figure féminine âgée, suspendue au-dessus de l’homme dans un drapé aérien et enveloppant, comme un fantôme qui plane et qui emporte littéralement l’homme. Ses bras forment une pince qui enserre le buste de l’homme. Elle semble lui chuchoter à l’oreille un accablant secret à moins que ce soit un sortilège ? Quoi qu’il en soit, l’homme, totalement enveloppé de son drapé devient le prolongement même de sa forme : on ne peut mieux exprimer l’emprise.
La patine sombre du bronze accentue la dramaturgie de la scène. L’ensemble est réalisé avec toute la virtuosité du grand maitre de la sculpture qu’était Camille Claudel, mais surtout avec toute la sensibilité à « fleur de cœur » de la jeune femme écorchée vive qu’elle était, se livrant corps et âme à la sculpture pour tenter de survivre au désespoir. C’est ce qui fait de cette sculpture un chef-d’œuvre ».
(*) « Lorsqu’on sait que cette figure est inspirée d’un des sept bourgeois de Calais réalisé par Auguste Rodin, mais avec l’aide de Camille Claudel qui réalise les pieds et les mains de cette sculpture, on ne peut s’empêcher de penser que dans ce groupe, l’homme emporte avec lui une part de la jeune fille, elle-même ».
Informations pratiques
Camille Claudel et les Modernes
Vente Camille Claudel et les Modernes, quatorze lots dont L’âge mûr de Camille Claudel mais aussi des œuvres d’Aimé Jules Dalou, Maurice de Vlaminck, Bernard Buffet, Jean Hélion, Armand Guillaumin, Émile-Othon Friesz…
Dimanche 16 février, de 16 heures à 20 heures, salle de l’Institut, 4, place Sainte-Croix, Orléans. Complet. Il n’y a plus de places pour inscription en ligne.
Expositions : vendredi 14 février de 11 heures à 19 heures, SELARL Matthieu Semont, 58, rue de la Bretonnerie, Orléans ; samedi 15 février, de 11 heures à 19 heures, Hôtel Groslot, 2, place de l’Étape Orléans.
Dans les archives de Magcentre
Jeudi, 6 février 2025
Michèle Desbordes avait notamment publié en 2004 « La robe bleue », ouvrage dédié à Camille Claudel.
Jeudi, 28 mars 2024
Du 4 au 12 mai, la 31e édition du Festival international de sculpture de la Bresse, rendra hommage à Camille Claudel. Anne Boisaubert, artiste vivant et travaillant à Saint-Pryvé-Saint-Mesmin (45) en est l’invitée d’honneur. Dans son atelier, où nous l’avons rencontrée en février dernier, cette artiste s’attèle à la création de trois œuvres dédiées à cette si belle figure de l’art disparue.
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Mercredi, 24 octobre 2018
Des images au plus près de l’œuvre de Rodin
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Jeudi 12 novembre 2015., jeudi, 11 août 2016