Les élections municipales approchent et les potentiels candidats se manifestent de façon plus ou moins frontale. À Montargis, le groupe des Citoyens – opposants de longue date – a en ligne de mire le maire Benoît Digeon, qui a d’ores et déjà annoncé sa candidature pour 2026. Ils l’attaquent sur sa gestion financière de la ville.
Par Izabel Tognarelli.
Par le biais d’Olivier Masson, l’association ECM (Engagement Citoyen pour le Montargois) a contacté Magcentre afin de faire connaître sa demande de saisine de la Chambre régionale des comptes pour un écart de 4 millions d’euros entre les comptes du receveur et ceux de la ville. Dans un courrier de 22 pages adressé à la préfecture, à la sous-préfecture et à la Chambre régionale des Comptes, l’association demande aussi la régularisation des comptes de la ville de Montargis, ainsi que des mesures conservatoires.
Tentative de décryptage
Le courrier de l’association fait 22 pages et comporte force tableaux, graphiques et renvois à des articles de loi. À sa lecture, on se dit que l’on ne va pas y comprendre grand-chose, à moins d’avoir l’expertise financière dans la peau, ce qui est le cas d’une infime proportion de la population en France. Les habitants de Montargis – auxquels ce courrier est livré par voie de presse et par le biais du site Internet de l’association ainsi que des réseaux sociaux – ne vont pas faire exception. Alors on reprend, ligne à ligne, pour en dégager l’essentiel.
On sait que les reproches du groupe Les Citoyens du Montargois sur les comptes de la Ville sont récurrents. « Malgré nos alertes aux autorités depuis août 2023, les comptes ne sont toujours pas régularisés », lit-on dans le communiqué. Il est signé de cinq membres de ce groupe, dont quatre sont démissionnaires du conseil municipal. Mais on se dit aussi que les comptes de la Ville sont passés au crible par les services de l’État, avant d’être approuvés. Que dit le maire à ce sujet ? « Il y a deux ans, nous avons eu un problème d’écriture, au sujet des amortissements. Mais nous n’avons pas eu de remarque de la part de la comptable du Trésor, gestionnaire de la comptabilité publique de la Ville. Or on la voit plusieurs fois dans l’année ».
Le communiqué affirme ensuite que « le responsable des finances de la Ville a quitté son poste, ce qui complique encore la situation ». Le courrier quant à lui va plus loin sur ce sujet. Il y est écrit : « Il n’y a manifestement aucune volonté de la ville de régulariser la situation ». Il est vrai que le précédent responsable du service des finances a quitté la mairie le 20 octobre 2024, mais il est remplacé, depuis le 20 janvier. Le poste est donc resté vacant en tout et pour tout pendant trois mois.
« Vente de patrimoine à perte », poursuit le communiqué, et de mettre en avant le cas de la halle Girodet : « La ville prévoit de vendre des biens comme la Halle Girodet pour environ 400 000 €, alors qu’elle est valorisée à plus de 1,4 million d’euros dans les comptes. Cette vente devrait entraîner une perte financière significative pour la ville, mais l’enregistrement de cette perte n’est pas prévu ». Pour ceux qui connaissent Montargis, on se demande comment cette halle pourrait atteindre, à la vente, un nombre à sept chiffres. Que dit-on, côté mairie ? « Elle est au prix indiqué par les Domaines : 390 000 €. Ce sont les Domaines qui décident ».
Des accusations graves
Mais l’attention est particulièrement retenue – l’accusation est grave – à la lecture de « faux en écriture ». On se tourne vers le premier édile, le regard interrogateur : « Il n’y a pas de faux en écriture ! S’il y en avait, le procureur aurait saisi l’affaire ! Ils lancent de fausses nouvelles. Il n’y a pas de régularisations à effectuer. Le budget 2025 a été adopté en 2024 et ne prévoit pas de correction ». Qu’en est-il de ces « corrections manuelles » dont il est question dans le communiqué ? « Ce ne sont pas des corrections manuelles, elles ont été faites par un tableur. Notre logiciel Berger-Levrault comporte un certain nombre de dysfonctionnements et ne produit pas tous les états que nous souhaitons obtenir. C’est pour cela que certains éléments sont traités à travers des tableurs en attendant que le logiciel puisse produire les états demandés ».
Le groupe des Citoyens avance un chiffre de 4 millions d’euros d’écart entre les comptes du receveur et ceux de la Ville, selon l’association ECM. « Il n’y a pas d’écart de 4 millions, c’est faux », conteste Benoît Digeon. Alors nous nous tournons vers l’ECM, par le biais de M. Masson pour demander comment ils en arrivent à pareille somme ? La discussion fut certes riche (Montargis continue sa mutation, les projets sont nombreux, notamment le pôle enfance – halte-garderie, crèche, centre aéré et nouvelle école –, dont les travaux doivent commencer en septembre pour une ouverture en 2026). Mais au cours de cette conversation, la somme s’envole à 20 millions d’euros. D’où notre question, réitérée au représentant de l’ECM : d’où sortent ces chiffres ? « Les 4 millions d’écart (sur 120 millions de patrimoine de la Ville) résultent d’un examen sommaire de la différence entre le compte fait par la Ville et le compte du receveur. Cela ne préjuge en rien de la somme des amortissements non pris en compte depuis 2001. Nous n’avons pas les éléments pour calculer les amortissements qui auraient dû être faits depuis au moins 2001 : notre estimation se fait à la louche ».
Comment le grand public pourrait-il y voir clair ? Faut-il que la Chambre régionale des comptes tranche ? « S’ils viennent, ils trouveront nos comptes en parfaite situation », assure Benoît Digeon.
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