À la Scène nationale d’Orléans mardi soir, Clara Ysé a tenu la salle en haleine pendant plus d’une heure. Elle présentait son nouvel album Oceano Nox. Avec ses chansons poétiques et profondes et un quartet de musiciens magnifiques, elle a fait un triomphe.
Clara Ysé. Photo Jean-François Robert.
Par Bernard Cassat.
Dans une salle Barrault pleine à craquer, la fumée apportait l’épaisseur, le mystère qui convient tout à fait à Clara Ysé. Ses textes poétiques racontent, racontent des événements comme des sentiments. Elle dialogue avec ses proches. Beaucoup s’adressent à ses amours ou à ses amis dans ce style incomparable de lettre chantonnée. Comme faisait Barbara. Avec sa voix virevoltante au phrasé très proche, Clara rejoint celle qui l’a beaucoup influencée. Même si assez vite elle s’en sépare. Plusieurs chansons, Douce bien sûr, mais aussi Soleil à minuit ou Lettre à m, commencent dans la lignée de la grande dame en noir, mais l’orchestration les emmènent ailleurs.
Quatre musiciens hors pair
Un puissant environnement sonore. Quatre musiciens exceptionnels où chacun amène son univers. Peter Corser au saxo, plutôt jazz, part du son classique du sax dans les accompagnements mais prend de grandes plages d’inventivité profonde et émouvante. Le duo voix-piano a toujours fonctionné, mais Tony Tixier au clavier y ajoute brillamment des envolées lyriques ou des variations très personnelles. Philippe Boudot à la batterie impose une grande présence de ses tambours qui cherchent dans les sons graves et brefs une puissance rythmée tout à fait entrainante et émouvante, faisant écho à la primitivité que distille Clara. Et Ingrid Samitier fait pleurer sa guitare pas toujours gently mais avec une expressivité déchirante.
Une belle présence sur scène
Et la voix de Clara, au milieu de cet écrin musical, sait trouver son chemin pour nous raconter ses émois, ses expériences, ses sentiments et ses amours. Elle va loin dans les confidences et pourtant elle est universelle. Son langage poétique transmet joliment les choses, trouve des formules qui concentrent le sens. Elle a plongé ses doigts dans l’océan en feu, et son langage aussi. Elle n’hésite pas à peaufiner son style, à tomber sous le charme des sorcières qui néanmoins abiment les cœurs dans le désert. Ou à parler directement au nôtre lorsqu’elle évoque l’absence de ceux qu’on aime. Elle dessine la chanson avec ses mains, et chasse de la gauche les derniers mots dans un petit geste élégant. Ses inspirations espagnoles lui font reprendre des chansons de Chavela Vargas. Elle en retrouve la puissance mêlée à la douceur, ce mélange nostalgique d’émotion et d’énergie qui la rapproche du rock, parfois.
Un invité surprise
Thierry Fanfant, le vieux routier bassiste qui a connu beaucoup de grands de la chanson, est venu en voisin faire son bœuf. Avec lui, Clara a enflammé la salle en le transformant carrément en club. Gens debout, clap des mains et ondulations de danse. Les rois du désespoir se sont transformés en un moment de pure énergie et de communion. Le public était ravi.
Pochette Oceano Nox – Olivier Metzger
Dans une scénographie importante, avec un décor et un jeu de lumières très poussé, son tour de chant va du côté du show. Noir complet à la fin de chaque morceau, quelques duos avec ses musiciens, de longs moments de musique pure construisent un spectacle très au point.
Beaucoup de fans dans la salle, qui connaissaient par cœur les chansons. Et qui ont participé. Comme pour ce moment émouvant du deuxième bis. Clara a entamé a cappella et sans micro Libertad, un titre de son premier cd. Et toute la salle a repris avec elle. Ça durait parce que le plaisir teinté de nostalgie poussait à continuer. Magnifique fin !
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