Par Sainte-Marie, Sainte-Anne, Saint-Martin, Saint-Joseph et Saint-Matthieu, les cathos sont dans la ville. Entre écoles, fondations et communautés, on s’y perd !
Deuxième chapitre de notre enquête. (Lire le Chapitre 1)

Par Philippe Voisin.
Les soutanes des « tradis » dans la Paroisse
Comme une Sainte Trinité, les pères de la Communauté de Saint-Martin viennent à trois pour occuper les paroisses qui leur sont proposées. La communauté a son siège à Évron en Mayenne. Elle est présente dans trente diocèses en France et possède des missions internationales (Cuba, Allemagne). Elle revendique aujourd’hui 175 prêtres et forme une centaine de séminaristes. Nonobstant la crise des vocations, elle bat des records d’ordination. La communauté agit comme une agence de placement pour pallier le manque de prêtres. Depuis 1976, date de sa création, elle possède une solide expérience. Comme d’autres évêques, Mgr Blaquart, évêque d’Orléans, sollicite des confréries pour occuper les églises vides. La Communauté Saint-Martin (CSM) accepte la demande de l’évêque pour servir la paroisse d’Olivet qui comprend Saint-Pryvé et Saint-Hilaire. Dom Pierre-Marie de Framont devient son nouveau curé. C’est un prêtre expérimenté qui a déjà donné trente ans de sa vie à la CSM. Mais ladite communauté Saint-Martin a une réputation sulfureuse. Créée et développée par l’abbé Jean-François Guérin reconnu proche de l’extrême droite(1), elle est placée sous surveillance par le Vatican. Le 4 juillet 2022, après une visite pastorale, deux assistants apostoliques ont été nommés par le dicastère(2) pour « accompagner » la communauté pendant trois ans. Un rapport de 1 300 pages et un audit financier ont été réalisés. Pour le père François-Marie Humann, les ordinations en nombre sans vigilance sur les profils recrutés posent question !(3)
« Nous avons demandé de l’aide pour penser la formation des prêtres et nous sommes à l’écoute des témoignages contre le père fondateur. Maintenant, on vit notre autonomie, sans culte de la personnalité. Nous ne faisons pas de politique », assure Don Pierre-Marie.
De son côté, le diocèse est transparent sur les problèmes soulevés par certains catholiques déroutés par les comportements parfois peu pédagogiques et autoritaires de ces prêtres tradis. Pour Christine Verny, théologienne et ancienne directrice diocésaine de l’Enseignement Catholique, beaucoup de jeunes en recherche de cadre théologique postulent dans cette communauté. Mais tant qu’elle ne franchit pas la ligne rouge du contrat pontifical… ! « Il faut faire la différence entre les tradis et les intégristes », affirme-t-elle. Après cinq années de présence dans la paroisse Saint-Martin d’Olivet, Don Pierre-Marie et ses frères accompagnent 22 catéchumènes(4). Une performance qui traduit le dynamisme communautaire.
Dans la petite église du Val, un groupe de travail se réunit régulièrement pour participer aux décisions locales. Dans un sondage, 52% des participants sont favorables à remettre le crucifix en fer forgé. Démocrates les tradis ! Les prêtres de la CSM assument le port strict de la soutane, « comme en Italie » ; ils transmettent le dogme mais ne pratiquent pas la messe en latin selon le rite romain de Pie V.
À l’office dominical, on remarque beaucoup de jeunes couples fervents dans les travées de l’église. Don Pierre-Marie est entouré d’une quarantaine de petits « servants et servantes », certain.s.es sont très jeunes. On note cependant que seuls les petits garçons en aube blanche sont proches de l’autel. Les petites filles restent au pied de l’estrade, vêtues d’une longue cape sombre à capuche. Une disposition qui irrite les catholiques progressistes. Les problèmes de genre sont secondaires, réplique-t-on du côté de la maison diocésaine.

Don Pierre-Marie et ses servants. Photo @PV12/24
L’éducation des enfants dans le respect de la famille est au cœur de l’action des prêtres. Des mini camps de trois jours sont proposés plusieurs fois par an.
Don Maxime anime le patronage de l’Étoile Saint-Martin. « Ici on joue, ici on prie ». Soixante enfants sont inscrits. Ses locaux sont en face de l’actuelle école Sainte-Marie, rue des écoles, que l’on pourrait nommer désormais, rue de la Providence…
Fondation Saint-Matthieu
Un autre saint a fait une apparition récente dans l’environnement olivetain : Saint-Matthieu. C’est le nom porté par une fondation nationale pour l’éducation catholique qui vient d’ouvrir – en 2022 – une antenne dans le Loiret. Dans son organigramme, on retrouve les noms des principaux acteurs de la vie catholique du département, diocésains, éducatifs et caritatifs. Sa mission est de soutenir activement partout en France les projets des établissements catholiques. Elle aide financièrement leurs projets et apporte son expérience pour mener des appels à dons.
Le 12 mai 2024, elle choisit Olivet pour sa première grande réunion publique. 120 personnes, des personnalités locales, se rassemblent à l’Orangerie du château de la Fougère sur les bords du Loiret. La fondation recherche 8.000€ pour financer des travaux à l’école Charles de Foucauld à Meung-sur-Loire.
François Asselin, le très médiatique président de la CPME(5), entrepreneur BTP dans les Deux-Sèvres, était l’invité d’honneur pour convaincre les généreux donateurs.
Ab omnibus sanctis(6)
La population d’Olivet connait une croissance rapide et régulière. En cinquante ans, sa population a été multipliée par 2. Elle est passée de 11 500 habitants en 1975, à 23 000 en 2024 (source INSEE). La municipalité affiche comme slogan « une ville à la campagne ». Pourtant, les projets de densification urbaine se succèdent sans remettre en cause l’attractivité de la commune. Sélectionnées par le prix de l’immobilier, de nouvelles familles des classes moyennes ou supérieures s’installent. Ici, le taux de pauvreté est de 8%, nettement inférieur aux 19% à Fleury-les-Aubrais, ville à la démographie comparable. On peut trouver là une explication au renouvellement et au rajeunissement des catholiques pratiquants dans cette ville, la deuxième du département par la population où la tradition chrétienne est ancienne.
Les bords du Loiret ont toujours attiré des personnalités du monde artistique ou économique. L’une d’elle, Théophile Jourdan au mitan du XIXe siècle a marqué l’histoire de la commune(7) par son engagement en faveur des œuvres chrétiennes de charité. Cet industriel fonda notamment l’orphelinat Sainte-Marie en 1860 et la première école chrétienne de garçons en 1867. Beaucoup d’actifs immobiliers de la paroisse proviennent de son patrimoine.
Aujourd’hui, malgré les aléas de l’Histoire et la perte de son identité rurale, Olivet la conservatrice, affiche résolument sa différence dans l’agglomération orléanaise.
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Ma formation initiale comprenait des cours de théologie. Il m’en reste un intérêt constant pour le fait religieux. La religion, disait l autre est l’opium du peuple. Mais c’est une constante de recherche pour l’humanité. Nous avons avec Dom Pierre Marie eu des échanges sur des points de théologie qui me heurtaient. En particulier sa conception du pêche originel qui me semblait proche du jansénisme doctrine combattue par l’église.
Le rôle dévolu aux femmes ne m’étonne pas, il en est la suite naturelle. Il faut que le pouvoir épiscopal se penche sur le sujet.
SI LES CATHOLIQUES QUI VOIENT LEUR RELIGION COMME UN PROGRES EN MARCHE POUR L HUMANITE NE SE REVEILLENT PAS DE NOUVEAUX INTEGRISMES APPARAITRONT.
Il vaut mieux ne pas s’engager dans le sacerdoce quand on n’a pas une foi authentique.
Tout à fait d accord avec vous
Mais il est difficile de juger de la profondeur de la foi car c est un chemin difficile
Je pense que l’appel de Dieu au sacerdoce est certainement irrésistible comme l’appel au mariage pour la vocation de parents, ou l’appel au célibat consacré : un chemin qui apparaît comme l’évidence devant nous, et donc la Volonté de Dieu.
En fait il ne faut pas s’engager trop vite, c’est l’erreur de beaucoup 🙂
La religion catholique doit encore se réformer pour retrouver les fondements même de l enseignement de Jésus. Beaucoup à été fait sous le pontificat du pape François. Ainsi comme exemple l accueil au sein de l église des couples divorcés. Le mariage est un élément essentiel de la doctrine chrétienne en tant que ciment de la société. La communion leur est interdite.