Les châteaux de Touraine en habits de fêtes pour Noël

Amboise, Azay-le-Rideau, Chenonceau, Chinon, Langeais, Loches, Villandry… Jusqu’au 5 janvier, c’est Noël dans les grands sites du Val de Loire ! En habit de fêtes et de lumières, sept châteaux vous plongent une fois encore dans sept ambiances différentes mais dans une seule et même magie. Un « Noël au Pays des Châteaux » où artistes, fleuristes et créateurs donnent vie à des scénographies inattendues et féeriques. Effet « wahou ! » garanti pour les grands et les petits. [Partie 1]

Par Estelle Boutheloup.

Loches fait revivre Hansel et Gretel

Si je vous dis « sorcière » et « maison en pain d’épice » ? Bravo, vous avez reconnu le fameux conte des frères Grimm, Hansel et Gretel ! « Depuis 5 ans, nous mettons chaque année un conte à l’honneur avec un parcours imaginé ex nihilo jalonné de décors qui s’articulent autour de l’histoire du château », explique Cécile Gatebled, médiatrice culturelle. Car si la Cité royale de Loches est connue pour avoir notamment abrité les amours de Charles VII et Agnès Sorel, c’est aussi là que la méconnue et néanmoins reine des contes de fées de la fin du XVII^e, Henriette-Julie de Castelnau, dite la comtesse de Murat, fut emprisonnée de 1702 à 1709. Un clin d’œil qui s’imposait donc…

Mais auparavant, il faut traverser le logis royal : escalier et grande salle d’honneur, chambre du roi, oratoire Anne de Bretagne… Ici, parterres et cheminées sont décorés, enluminés, habillés de guirlandes, rubans, cadeaux, mousses, branchages mais aussi de vrais pains d’épice, sucres d’orge et sucettes (parfois aussi hautes qu’un enfant !) accrochées aux sapins. Puis, l’aile débouche enfin sur une mystérieuse forêt embrumée – souvenez-vous Hansel et Gretel y ont été abandonnés – dont on foule des tapis de vraies feuilles mortes jusqu’à se retrouver dans une inquiétante pénombre au pied d’un arbre immense… Écoutez, sentez, vibrez et partagez la surprise des enfants face à l’étrange et incroyable maison en pain d’épices, gâteaux et guimauves de la cruelle sorcière.

Le Noël des reines à Chinon

Et si vous vous invitiez au dernier banquet de Noël des Plantagenêt ce 25 décembre 1172 ? Ancrée sur son éperon barré de 500 m de long, derrière ses hauts murs des logis royaux, la fête bat son plein et les tables, richement dressées, regorgent de mets. « Céramiques, verres, plats… la vaisselle, telle qu’elle pouvait l’être à l’époque, a été reconstituée, souligne Marie-Ève Scheffer, responsable de la forteresse de Chinon. Ainsi que des pains et des tourtes à base de cygne en papier mâché réalisés par la décoratrice Véronique Chauvet à partir des cartons et déchets d’emballages de son restaurant. Sans oublier le vase d’Aliénor d’Aquitaine dont le vrai en cristal de roche et or est au Louvre ».

Car l’histoire de cette forteresse est intimement liée à cette reine de France et d’Angleterre qui y sera emprisonnée en 1173 et dont on fête cette année les 900 ans de sa naissance. Une autre femme y marqua son règne : Marie d’Anjou, épouse de Charles VII. « Elle aimait beaucoup les animaux et surtout les oiseaux. C’était Marie-Antoinette avant l’heure… » Une passion mise en scène dans un décor créatif où murs et sapins arborent plumes et oiseaux hauts en couleur. Plus loin, autre salle, autre ambiance. Celle recueillie de la Chapelle Oubliée et de ses chants de messe médiévaux : « Marie d’Anjou était aussi une grande amatrice de musique sacrée. Cette chapelle, décorée façon urbex où la nature a repris ses droits dans un lieu délaissé, rappelle que la reine avait une chapelle de 18 animateurs de messe pour chanter au moins une fois par jour de l’Ars Nova ». Dans le donjon, d’autres reines s’affichent en attributs royaux à travers l’exposition de photos « Debout les reines » de Louise Oligny et Clémentine du Pontavice. Ces femmes de la Maison des Femmes de Saint-Denis « réparent » celles qui ont subi des violences.

Langeais, la lumineuse

Bougies, lampes, lanternes, Dames-Jeanne, guirlandes… Ici, salles, murs, meubles, tapisseries… se mettent en lumière grâce aux effets scénographiques d’artistes créateurs qui font dialoguer Noël avec les collections du château. « La lumière, c’est le symbole de la Renaissance. La cire coûtait cher à l’époque : seules les demeures de riches seigneurs en avaient », précise Sandrine Durand, directrice de ce château de 1463, où fut célébré le mariage de Charles VIII et d’Anne de Bretagne, restauré et remeublé dans l’esprit d’une noble demeure de la fin du Moyen Âge par Jacques Siegfried, homme d’affaires alsacien, dès 1886. Signée Grôm et Fanfan, la Fée Aurora de 4,5 m de haut offre la première mise en lumière dans la cour d’honneur. En écho à la tapisserie Aurora exposée au château, la déesse romaine est ici éclairée par un lustre en bronze, lanternes et lumignons, habillé de pampilles et d’une robe végétale, le tout à base d’objets et de métaux recyclés : « Un tour de force que d’arriver à créer un univers onirique à partir d’un grand décor upcyclé », confient ces « taxidermistes ferrugineux ».

À l’intérieur, les éblouissantes mises en scène de Christopher Lacassagne jouent avec les matières et la nature pour offrir des décors du plus bel effet comme dans le salon où « miscanthus, cheveux d’ange dorés à la feuille, boules d’allium et fleurs séchées offrent un écrin aux initiales latines entrelacées des époux – A pour Anna (Anne de Bretagne) et K pour Karolus (Charles VIII) – pour être en résonance avec les peintures murales et le carrelage aux fleurs de lys ». Alors qu’il faut impressionner ses invités, la chambre de parement scintille, elle, en une multitude de reflets sous l’effet d’un arbre à facettes d’où pendent des queues d’hermine, tandis que dans la forêt hivernale de la Salle des Preux, de hautes branches se dressent vers la voûte charpentée du château dans une ambiance sonore accompagnant les figures héroïques de la collection unique de tapisseries d’Aubusson de la moitié du XVI^e siècle.

La féérie de Noël continue d’ici quelques jours dans une partie 2 à Azay-le-Rideau, Amboise, Villandry et Chenonceau.

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Photo d’ouverture  : Noël au Pays des Châteaux à la Forteresse Royale de Chinon. Photo Estelle Boutheloup

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