On savait Patrice Douchet sur le départ depuis quelque temps, lui qui a dirigé ce théâtre dans la banlieue d’Orléans depuis 40 années, et dont il a obtenu le conventionnement avec le ministère autour des écritures contemporaines. Il laisse la structure saranaise en de bonnes mains, celle d’une artiste associée au TTN depuis déjà quelques années, metteuse en scène, comédienne et autrice.
Par Bernard Thinat.
Patrice Douchet a souhaité ironiser pour annoncer à la presse la nomination de Tiphaine Guitton, quelques heures avant celle du Premier ministre, précise-t-il, en ce vendredi 13. Après quelques mots du président de l’association, c’est l’adjoint à la Culture de la ville qui, rappelant que « les temps sont difficiles pour les finances et pour la culture », a exprimé sa satisfaction au choix d’une artiste par rapport à un administrateur ou un gestionnaire, car dit-il, « qui peut mieux qu’un artiste faire vivre un théâtre ? ».
Patrice transmet les rênes à Tiphaine – Photo B.T.
Tiphaine Guitton prendra donc les rênes du TTN au 1er janvier prochain, en duo avec Patrice Douchet, puis seule « à la barre du navire », à partir du 1er septembre 2025. Patrice Douchet rappelle partager « beaucoup de valeurs pour le goût immodéré des textes, et ne doute à aucun moment que le projet se dénature ». Il se dit persuadé que l’artiste qui va lui succéder « saura s’occuper au mieux d’autres artistes, saura s’appuyer sur une équipe concernée et compétente ». Mais prévient-il, « Tiphaine prendra les commandes dans une mer loin d’être calme, avec toutes les incertitudes qui planent sur le ciel de la culture en général et le théâtre en particulier ». Enfin, précise-t-il, « choisir une artiste pour diriger ce théâtre unique, singulier, résistant, est un acte assumé, un geste fort, un symbole de liberté, affirmant ainsi notre volonté d’être maître de notre destin ». Et d’ajouter, avec son style littéraire et poétique bien connu, « avoir toujours tenu tête aux évidences, avec un petit côté libertaire, et avoir été toujours convaincu que face au pragmatisme gestionnaire seul, un ou une porteuse de rêve est capable de transformer un lieu en poème tout en gardant lucidité, sensibilité, engagement humaniste et respect des missions publiques sans oublier la responsabilité dans l’utilisation de l’argent public ».
Tiphaine Guitton, un CV bien rempli
Comédienne de formation, elle est passée par le Conservatoire de Tours et l’École supérieure de Pierre Debauche, fondateur du théâtre des Amandiers à Nanterre. Puis elle a dirigé un théâtre municipal dans le sud de la France. Depuis quelques années, elle est devenue autrice et enseignante au Conservatoire de Blois. Elle dirige « la Petite Compagnie », c’est son nom, avec laquelle elle a développé un travail de création d’écriture contemporaine sur la jeunesse.
Le théâtre de la Tête Noire
Tiphaine se dit très flattée d’intégrer l’équipe de la Tête Noire, avec les valeurs dans lesquelles elle se reconnaît pleinement. Se disant persuadée que le théâtre doive se situer au cœur de la cité, elle se dit convaincue que le public a besoin plus que tout d’entendre la voix des artistes, au travers d’échanges, de partages. Elle se définit comme une disciple de l’enseignement de Pierre Debauche, lequel apprenait à « rêver concret, à développer sa pensée en lien avec les poètes, les philosophes, les sociologues ». À ce sujet, Patrice Douchet précise que Pierre Debauche, pour être moins connu que Vilar, a su enseigner l’exigence absolue du geste théâtral des comédiens, sans jamais se couper des publics.
Au Théâtre de la Tête Noire, elle a récemment mis en scène et interprété « Émoi » en décembre 2023, et « la MétaMorphose » d’après Kafka en mars 2019, spectacle particulièrement salué par la critique. Elle est membre du Comité de lecture du TTN. Bon vent Tiphaine au TTN, et bonne suite à Patrice avec sa Compagnie théâtrale que nous aurons plaisir à retrouver, n’en doutons pas, dans cette ancienne chapelle transformée en ce joli théâtre !
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