Procès en appel ce mardi 3 décembre 2024 à Orléans de Nicolas Wargnier. L’interne en médecine condamné à 5 ans de prison avec sursis pour agressions sexuelles tente de poursuivre ses études. Au grand dam de ses victimes et des associations féministes. Le parquet demande lui trois ans de prison ferme.
Par Sophie Deschamps.
Les banderoles féministes et syndicales se sont déployées mardi après-midi sur le parvis du tribunal d’Orléans qui abrite la Cour d’Appel. Une trentaine de personnes sont ainsi venues “accueillir” l’accusé en martelant ce slogan : « Pas de violeurs chez les docteurs, ni nulle part ailleurs ! ». Car cet interne en médecine était jugé en appel, à la demande du parquet, pour agressions sexuelles sur des étudiantes en médecine commis entre 2017 et 2020. Des faits que l’agresseur de 27 ans a reconnus et pour lesquels il a été condamné en première instance à Tours en mars à cinq années de prison avec sursis probatoire.
« Nous ne laisserons plus rien passer »
Certaines personnes étaient venues de loin. Notamment Pauline du syndicat CGT-CHU de Toulouse : « Cet interne devait être affecté chez nous le 4 novembre. Nous l’avons appris début octobre. D’où une très grosse mobilisation au CHU de Toulouse avec un préavis de grève. Il s’est passé la même chose à Carcassonne. Cette action a permis la suspension de son arrivée, confirmée par le tribunal administratif le 27 novembre. Et nous sommes ici parce que malheureusement ces violences sont assez répandues mais très peu mises sur la place publique. Nous avons eu à Toulouse le cas d’un interne renvoyé l’an dernier pour agression sexuelle. Nous ne laisserons plus rien passer ».
Heureusement, des soignants soutiennent leurs collègues femmes. C’est le cas à Toulouse : « Nos collègues masculins CGT se mobilisent à nos côtés. C’est primordial. Nous nous battons ensemble contre l’impunité des agresseurs sexuels dans le milieu médical même si les femmes restent en première ligne. Et ce qui se passe aujourd’hui à Orléans, c’est symbolique. Ce n’est pas de l’acharnement contre une personne contrairement à ce que cherche à dire son avocat. C’est juste que pour nous, il n’est plus possible que ce genre de choses se produisent. Pour nous ce procès en appel est une étape importante. Nous espérons que la condamnation sera plus lourde qu’en première instance avec de la prison ferme. On espère que cette personne sera interdite d’exercer la médecine et avec lui tous les agresseurs sexuels. »
Par ailleurs Christine Denis, du collectif Féminismes en tous genres 45 présente sur les marches du tribunal explique : « Quand on travaille à l’hôpital, il faut présenter un casier judiciaire vierge. Donc, pourquoi pas pour les médecins ? C’est de la toute-puissance, du patriarcat et il n’y a aucune raison pour que cela dure. Cet homme a violé mais l’ordre des médecins a accepté qu’il aille faire son stage à Limoges et en plus au service de gynécologie ! » (Il a depuis été suspendu, NDLR).
Un procès correctionnalisé
À la barre, Justine, Émilie, deux des victimes de Nicolas Wargnier ont redit à quel point ces agressions sexuelles – dont une tentative de viol – ont abîmé durablement leur vie. Des victimes qui ont accepté la correctionnalisation de la procédure afin d’éviter les lenteurs et la lourdeur d’un procès en assises. Elles ont aussi tenu à rappeler l’inaction du doyen de la faculté de médecine de Tours de l’époque. Ce dernier avait en effet ignoré les plaintes des étudiantes en médecine et n’avait enclenché aucune procédure disciplinaire.
Ce que n’a pas manqué de souligner l’avocat des parties civiles dans sa plaidoirie. « On parle de faits dignes du monde d’avant. Mais entre-temps le monde a changé notamment avec #Metoohôpital »
Trois années de prison ferme requises
L’accusé, lui, a parlé d’immaturité et d’actes commis sous l’emprise de l’alcool (une circonstance aggravante rappelons-le, NDLR): « Quand je relis tout ce que l’on me reproche, je ne me reconnais pas ». Puis, il a ajouté : « Mon combat aujourd’hui est de pouvoir reprendre mes études et devenir radiologue ».
Dans ses réquisitions, l’avocat général a estimé notamment que l’accusé n’a pas eu de sanction en mars dernier puisqu’il est sorti libre du tribunal. C’est pourquoi, a-t-il expliqué, « je demande cinq années de prison dont trois années fermes ».
Une demande bien sûr réfutée par l’avocat de la défense. Très théâtral, il a exhorté la Cour d’Appel d’Orléans à « ne pas condamner mon client à une mort sociale en lui imposant trois années d’incarcération ». Réponse le 14 janvier 2025.
Pour aller plus loin sur Magcentre : « Sans oui c’est interdit », la campagne contre les violences sexistes et sexuelles débarque dans les universités du Centre-Val de Loire