Les agriculteurs en ébullition : les actions s’intensifient en Centre-Val de Loire

En région, la colère agricole gronde à nouveau. Après des barrages filtrants à Vierzon, un convoi de tracteurs à Tours, c’est à Orléans que les agriculteurs ont convergé ce jeudi 28 novembre pour dénoncer le poids des normes et réclamer une simplification administrative dans leur profession.

Des tracteurs de la région ont débarqué à Orléans en fin de matinée ce jeudi 28 novembre. Photo Marie-Line Bonneau


Par Mael Petit, photos Marie-Line Bonneau.


Il ne fait peut-être pas aussi chaud que dans le sud-ouest mais le mercure de la colère agricole est véritablement monté de quelques degrés en Centre-Val de Loire ces derniers jours. Un constat tout de même à relativiser puisque mis à part dans le sud-ouest, les actions d’agriculteurs en colère restent sporadiques partout dans le pays, surtout en comparaison de la mobilisation du début d’année qui avait vu les forces de l’ordre et les agriculteurs jouer au jeu du chat et de la souris sur les bords de Loire. Difficile d’imaginer à nouveau un tel scénario à l’approche des fêtes de fin d’année, bien que certains agriculteurs de la région s’organisent pour faire germer une plus forte mobilisation aux prémices de l’hiver. Comme au péage de l’autoroute A20 à hauteur de Vierzon lundi dernier, où la Coordination rurale avait opéré un barrage filtrant, jointe par la FDSEA et les Jeunes agriculteurs pour afficher l’unité, afin d’y contrôler les cargaisons de camions étrangers en provenance d’Espagne. Ou encore à Tours le mercredi où un convoi avait déversé du fumier devant la préfecture. Le syndicat aux bonnets jaunes a remis le couvert ce jeudi devant la direction régionale de l’alimentation, l’agriculture et de la forêt du Centre-Val de Loire située à Orléans toujours dans le but de maintenir la pression.

Pétards, klaxons et largages de fumier devant les grilles sous les yeux de forces de l’ordre retranchées dans l’enceinte de la cité Coligny ont été la seule résultante de deux heures d’échanges infructueux entre représentants syndicaux et la préfète de région, Sophie Brocas. Au cœur des revendications, la simplification administrative pour les exploitants et « la fin de la surtransposition des normes ». Des demandes finalement comparables à celles de janvier dernier. « Rien ne s’est concrétisé dans nos exploitations depuis la dernière mobilisation. Et on ne voit même pas venir une volonté de l’État », enrage Maguelone de Sèze, présidente de la Coordination rurale de l’Indre. En début d’année pourtant, le gouvernement Attal s’était engagé à initier un choc de simplification dans le monde agricole et ainsi calmer la colère des agriculteurs après plusieurs semaines de mobilisation. « Nous exigeons moins de contrôles mais surtout que ces derniers soient plus pédagogiques que punitifs, compte tenu de la situation catastrophique que nous traversons », martèle de son côté Geneviève De Brach, présidente de la Coordination rurale Centre-Val de Loire.

Distorsions de concurrence au sein de l’UE

Désormais, sous un gouvernement à la sauce Barnier, la ministre de l’Agriculture Annie Genevard avait tendu la main fin octobre aux agriculteurs en annonçant la mise en place d’un « contrôle administratif unique sous l’autorité du préfet » sur les exploitations, sentant forcir le vent de contestation dans le pays. Un principe de « mono contrôle » alors qualifié d’intéressant par la FNSEA mais qui ne les soustrait pas aux contrôles judiciaires initiés par les agents de l’office français de la biodiversité ou encore les contrôles liés à la sécheresse. Une mesure de fait insuffisante pour les syndicats qui dénoncent également la surtransposition des normes, source de « distorsions de concurrence » avec les pays voisins, dont beaucoup de productions arrivent sur le sol français sans respecter les mêmes contraintes que les locales.

Cependant, le débat sur la surtransposition reste complexe. Pour les autorités, il s’agit souvent de se conformer aux exigences de la Commission européenne, notamment pour garantir le versement des aides de la politique agricole commune (PAC). Et surtout, la France n’est pas le pays le plus restrictif en matière de pesticides, à l’exception notable de certaines décisions marquantes, comme l’interdiction des néonicotinoïdes avant l’Union européenne. Malgré tout, les agriculteurs conservent un sentiment d’injustice face aux importations issues de pays appliquant des normes moins strictes. « En Beauce, on abandonne la betterave parce que sans néonicotinoïdes (comme l’acétamipride autorisé dans d’autres pays européens comme l’Allemagne), ce n’est plus viable », affirme Mme De Brach.

« Des prix et pas des primes »

Est venue s’ajouter l’actualité brûlante des négociations autour du traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur aujourd’hui en voie de finalisation. La goutte d’eau qui fait déborder le vase pour le monde agricole, faisant davantage bondir la filière bovine qui fustige une concurrence déloyale à venir et pointe également des normes de production sud-américaines différentes de celles de l’UE, comme sur l’usage des pesticides, des hormones et antibiotiques pour accélérer la croissance des animaux. « Ce n’est pas tant pour la quantité de viande importée mais plutôt les morceaux nobles qui seront moins chers que les produits français », détaille Geneviève De Brach.

Mais au-delà des normes, c’est un rééquilibrage global des politiques agricoles que revendiquent les agriculteurs. « On nous avait vendu l’Europe comme socle d’égalité entre producteurs, mais ce n’est pas le cas », déplore Maguelone de Sèze. Pour l’exploitante, il ne s’agit pas de refuser les règles européennes, mais de garantir une application harmonisée qui ne pénalise pas les agriculteurs français. « Nous voulons des prix, pas des primes. Pouvoir vivre de notre production sans être étouffés par des contrôles incessants ». En attendant, la colère s’accentue, d’autant que l’année 2024, marquée par des récoltes catastrophiques, a aggravé les difficultés économiques structurelles de nombreuses exploitations.


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Commentaires

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  1. il faut plutôt lire : “Paysans toxiquent nous tuent et nous empoisonnenent”.
    j’ai entendu ce matin sur France Inter que la mairie de Paris payait les agriculteurs afin qu’ils n’utilisent pas de produits phytos sur les zones de captage d’eau potable …..Et ça marche ! le but du paysans étant de faire de l’argent coute que coute comme n’importe quel industriel sans se soucier du lendemain écologiste, autant les payer à la source cela coute moins cher que le traitement de l’eau à postériori….On n’en est hélas là.

  2. Incroyable que dans toute la presse locale y compris magcentre il n’y ai aucune explication sur ce qu’est la “coordination rurale” c’est avant tout un syndicat d’extrême droite lié l’Action Française (ils avaient une intervention à leur camp d’été) et aussi au RN. C’est dingue une telle normalistation !

  3. L’assaut contre la paisible association « Indre nature »puis contre l’office français de la biodiversité à Châteauroux , passé sous les radars des médias locaux est davantage révélateur de la réalité de ces mouvements factieux que l’avalanche d’aticles complaisants qui se contentent -prudemment il est vrai-de se faire les perroquets de leur propagande par le fait …

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