Faire des enfants : that is the question

Pour un pays, le nombre de naissances est un enjeu sociétal, économique et politique majeur. Avoir un enfant change également profondément la vie intime des couples. Peu de sujets ont autant d’implications à la fois individuelles et collectives. Or, on constate un recul généralisé de la natalité. Le désir de mettre un enfant au monde disparait-il ?

Les bébés, une espèce en voie de disparition en région Centre-Val de Loire ? Illustration Pixabay


Par Jean-Paul Briand.


Quelques chiffres

La région Centre-Val de Loire, avec ses 2 573 303 habitants (recensement de 2021), a une densité de population de 65,7 habitants au kilomètre carré, presque deux fois inférieure à celle de la France entière. Sans tenir compte de l’immigration, il faut qu’une génération de femmes mette au monde au moins 2,1 enfants pour que la population reste stable. Or les chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) montrent une baisse de la natalité partout en France, en rapport avec un taux de fécondité en chute. Le Centre-Val de Loire n’est pas épargné. Son taux de fécondité est à 1,75 enfant en moyenne par femme, niveau le plus bas depuis 25 ans. Paradoxalement c’est le plus élevé de la France métropolitaine. Si la population du Centre-Val de Loire reste stable depuis une décennie c’est grâce à un solde migratoire positif.

Dans la région, en 2023, le nombre de naissances n’est que de 23 730, soit 6,5 % de moins qu’en 2022. En parallèle, avec 27 750 personnes décédées, la mortalité y est également en net recul (-5,4 %) et la population vieillit. Près d’un quart de ses habitants a plus de 65 ans, soit une accentuation de 20 % sur la dernière décennie. 

Après une forte baisse due à la pandémie de la Covid 19, le nombre de mariages, élément qui fait espérer des naissances, dépasse le niveau d’avant-crise, avec près de 9 000 unions célébrées.

Le réarmement démographique présidentiel

Pendant dix ans de hausse (1994-2005), puis neuf ans de stabilisation autour de 2 enfants par femme (2006-2014), les couples font désormais moins d’enfants. Le président de la République s’en inquiète. Pour corriger le tir, avec son harangue martiale de « réarmement démographique », exprimée lors de sa conférence de presse du 16 janvier 2024, Emmanuel Macron semble souhaiter que les ventres des femmes deviennent une machine de guerre au service de la nation. Pas sûr que ce soit suffisant pour stimuler la procréation française et le désir d’être parents car des questions existentielles demeurent : ce recul des naissances est-il en rapport avec l’état de la biosphère et dans le but de ralentir la dégradation de la planète ? Est-ce bien responsable d’avoir aujourd’hui un enfant avec son lot de contraintes, la crise climatique, les conflits et les épidémies ? L’inquiétude vis-à-vis de l’avenir des futures générations est-elle plus forte que le désir d’enfant ?

L’augmentation démographique ne se décrète pas

En 2023, l’Union nationale des associations familiales (UNAF) a essayé de trouver des réponses grâce à une étude sur le désir d’enfant(s) auprès de 2500 parents et 500 personnes sans enfant.

Ce travail montre que le nombre moyen d’enfants désirés est beaucoup plus élevé que la fécondité constatée. Parent ou non, la famille de deux bambins est un idéal mais plus d’un tiers des parents souhaitent dans l’absolu une famille plus nombreuse. La peur de l’avenir, les contraintes et les dépenses induites par un enfant sont les premières causes qui font renoncer à une grossesse. Parmi les difficultés qui font abandonner l’idée d’un nouveau-né, la stabilité du couple mais aussi le logement et l’argent sont prioritairement citées. Les difficultés économiques, les incertitudes sociales, politiques et environnementales freinent considérablement le désir d’enfant… 

Il ne sert à rien de rechercher l’accroissement de la natalité pour elle-même car ce sont les jeunes générations qui prendront en main le cours de leur histoire. À eux de considérer s’ils veulent relancer la natalité et s’il est raisonnable ou pas d’avoir une progéniture. Ils feront des bébés quand leur bien-être sera assuré, quand ils ne subiront plus la précarité et quand le cycle des destructions occasionnées par les générations précédentes se ralentira. L’augmentation démographique ne se décrète pas.

Petit glossaire démographique

  • Natalité : étude du nombre de naissances au sein d’une population.
  • Taux de natalité (ou taux brut de natalité) : rapport entre le nombre annuel de naissances vivantes et la population totale sur une période et dans un territoire donnés.
  • Taux de fécondité : rapport du nombre de naissances vivantes de l’année à l’ensemble de la population féminine en âge de procréer (de 15 et 50 ans). Ils s’expriment souvent en pour mille (‰).
  • Indice de fécondité : nombre moyen d’enfants par femme.
  • Solde migratoire : différence entre le nombre de personnes qui sont entrées dans une zone géographique donnée et le nombre de personnes qui en sont sorties au cours d’une période donnée (différence entre l’immigration et l’émigration). Ce concept est indépendant de la nationalité.


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Commentaires

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  1. Le cycle des constructions favorable à la natalité mérite aussi à mon sens d’être convoqué dans cette question pour évaluer l’impact du ” cycle des destructions occasionnées par les générations précédentes”

  2. Bravo Jean Paul
    Et si l’on visait de faire redescendre la population métropolitaine à 30/40 millions pour retrouver des sols et de la vie ?
    On adapterait alors la politique sociale et économique pour y parvenir. Une recherche transdisciplinaire travaillerait sur les modèles à inventer pour y arriver sereinement et un véritable personnel politique porterait ce nouveau paradigme.
    Pourquoi 30/40 millions ?
    C’est la population métropolitaine en 1950 et lorsque l’on regarde une photographie aérienne d’un lieu que vous connaissez à cette époque, vous comprendrez !
    Le vivant en général avait encore de la place…
    Il vaudrait mieux choisir ce ajustement démographique que de le subir.
    Retrouver en sol vivant agricole ou forestier l’équivalent de la surface d’un département tout les 10/20 ans et non l’inverse.
    C’est penser l’avenir bien au delà de nos générations.

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