Encore peu courante en France, l’aronia est l’étoile montante des superfruits. Très riche en antioxydants, la petite baie noire d’Europe de l’Est et d’Amérique du Nord a retenu l’attention de cinq producteurs de la région Centre-Val de Loire qui se sont lancés dans sa culture et sa transformation pour en faire une vraie filière.
Par Estelle Boutheloup.
« Tous nos jus ont été vendus cette année », lance Arnaud de Reviers en arpentant ses longues rangées de cultures. « 1 200 bouteilles : notre produit phare ! » Victime de son succès, l’aronia – dont le jus est pasteurisé à froid pour conserver tous ses bienfaits – est aujourd’hui un produit 100% naturel très tendance que s’est mis à cultiver le pépiniériste de Saint-Cyr-en-Val, près d’Orléans.
Relativement méconnue en France, cette petite baie, encore appelée « gueule noire », à la saveur astringente, proche du cassis et de la myrtille, est originaire de l’est de l’Amérique du Nord, du Canada et des pays d’Europe de l’Est. « Nous savions que ça existait dans d’autres pays et que c’était bon pour la santé. Et pour la santé, les gens sont prêts à dépenser ». Quelque 8 – 10€ pour un ½ litre de jus 100% fruits, sans sucre ajouté, ou encore entre 5 et 7€ pour une confiture ou une gelée. Un produit cher ? « Moins cher que d’acheter des vitamines en pharmacie mais plus cher qu’un jus d’orange d’hypermarché ». Des produits qui se retrouvent dans des points de vente en circuits courts : magasins de producteurs, des boutiques à la ferme, des charcuteries-traiteurs, ou encore en vente directe chez les producteurs du Loiret et du Loir-et-Cher.
5 producteurs en Centre-Val de Loire
Installé depuis 2003, Arnaud de Reviers s’est lancé dans l’aronia, avec 4 autres producteurs de la région, en 2019 : de 1 000 plants, il est passé à 5 000 sur 2 ha. « On en produisait déjà mais en plante ornementale ». Quand la crise de l’horticulture est arrivée vers 2009-2010 : « Une crise économique dont celle du bâtiment avec moins de vente de plantes pour les haies. De pépiniériste, on est devenu arboriculteur jusqu’à la transformation ». Facile à produire, aux belles couleurs automnales, résistante au gel jusqu’à -20 degrés, sans vraiment de ravageurs ni de maladies, avec des pieds qui arrivent à maturité en même temps, pas chronophage, mécanisable… la culture de l’aronia présente beaucoup d’avantages. Ainsi fin août s’est achevée la récolte : une tonne cette année, une production qui devrait aller crescendo.
Pour autant, la culture de la petite baie noire reste empirique avec encore quelques difficultés à résoudre. « C’est une plante qui ne se met pas tout de suite en stress hydrique : on ne voit pas si elle a soif ou faim », témoigne le pépiniériste qui compte sur les différents tests de culture du CDHR (Comité de développement horticole de la Région Centre-Val de Loire) pour mieux cerner la plante et optimiser cette nouvelle production.
Expérimenter des scénarios réalistes
Car la nouvelle filière régionale « Petits fruits » à fortes valeurs nutritionnelles, c’est le CDHR qui la conduit. « Le Comité de développement horticole ambitionne des projets à la demande de producteurs qui cherchent à se diversifier », explique Emmanuel Godin, directeur du CDHR Centre-Val de Loire. « L’objectif étant de mettre en place une filière complète pour répondre également aux enjeux de territoire tant au niveau des producteurs qu’au niveau des consommateurs ainsi qu’aux enjeux climatiques ». La piste de l’aronia démarre donc en 2018, avec un PEI (Partenariat européen pour l’innovation) et la création d’une SAS « Superfruits Loire Valley » portée par cinq producteurs adhérents du CDHR du Loiret et du Loir-et-Cher. « Un superfruit, nutricament, riche en antioxydants, intéressant en termes de bien-être et de santé », poursuit le directeur.
Ainsi sur les parcelles du CDHR quelque 700 aronias en pot et 900 pieds en pleine terre sont en expérimentation dans le cadre du projet FILFRUI : « Expérimentations qui portent sur les aléas climatiques, le stress hydrique en été, le gel en hiver et le gel tardif au printemps », explique Ronan Pelé, chargé d’expérimentations au CDHR. En résumé : « Tester différents leviers au niveau des cultures (paillage, couverts végétaux, biochar, mycorhize…), des infrastructures – tunnels découvrables – et des infrastructures bioclimatiques comme les gaines remplies d’eau qui captent les calories environnantes et les restituent la nuit pour éviter le gel. Les itinéraires de culture innovants seront transférés aux producteurs de la SAS Super Fruits Loire Valley ». Mais pas que. Le CDHR conduit également des travaux visant à réduire les consommations d’eau, trouver des alternatives aux pots plastiques ou encore diminuer les émissions carbone répondant ainsi à des demandes sociétales. Bref, « être sur des scénarios réalistes », souligne Emmanuel Godin.
Malgré une pluviométrie cette année élevée pendant la floraison, la récolte d’aronia s’élève à environ 4 tonnes de fruits sur les 6,3 ha total des producteurs. La prochaine récolte devrait monter en volumes grâce à l’arrivée de trois nouveaux producteurs. De quoi alimenter les rayons des chaînes de magasins bio, les parapharmacies et développer la vente en ligne : future étape des producteurs.
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Une « gueule noire » bonne pour la santé
« Les baies de l’aronia melanocarpa sont connues pour leur forte teneur en composés antioxydants. Antioxydants qui jouent un rôle clé non seulement dans la prévention des maladies chroniques, mais également dans le maintien d’une bonne santé cognitive, la protection de la peau et le ralentissement du vieillissement. C’est pourquoi on prête aux fruits de l’aronia melanocarpa de nombreux bénéfices pour la santé. Ses bienfaits ont été validés dans des études scientifiques, notamment pour ses propriétés anti-inflammatoires et protectrices cardiovasculaires. Toutefois les travaux sur ses propriétés ont été effectués essentiellement sur des modèles animaux ou in vitro. Davantage de recherches sont nécessaires afin de confirmer pleinement l’efficacité de l’aronia melanocarpa chez l’humain. » Docteur Jean-Paul Briand
Rubrique parrainée par CODIFRANCE