Au fil des générations, sa ferme de polyculture élevage était devenue céréalière. Fabien Rioland y a réintroduit le maraîchage, puis l’élevage. De bisons !
Par Pierre Belsoeur.
« Pourquoi élever des bisons à Rouvres-les-Bois ? Parce que je n’aime pas faire comme tout le monde ». Derrière la provocation, Fabien Rioland, la petite quarantaine, a une analyse de son métier beaucoup plus posée. D’abord, il l’a appris ce métier. Au lycée agricole de Châteauroux, comme Arthur, son neveu, qui l’assiste dans l’élevage des bisons. Ensuite il a eu une démarche écologique, convertissant l’exploitation de 300 ha au bio. Mais une exploitation céréalière a quelque chose de mécanique pas forcément satisfaisant pour l’épanouissement d’un homme de la terre. Alors Fabien a opté pour le maraîchage, bio évidemment, sur six hectares et puis, voici six ans, il a commencé à rêver de bisons dans les plaines du Berry.
Des bisons européens
« J’aime bien l’histoire et la géographie, mais au départ je ne pensais pas qu’on pouvait élever des bisons en France. Et puis, au fil des contacts, j’ai commencé à monter mon projet ». Pourquoi choisir le bison ? « Parce que c’est un animal rustique, qui se nourrit essentiellement d’herbe et qui vit en permanence dans les champs ».
Pas besoin de reconstruire des étables et stabulations, en revanche la sécurité doit être renforcée. Autour des champs des grillages de 1,80 m doublés d’une clôture électrique. Des clôtures qui disparaîtront bientôt derrière les haies, cinq kilomètres ont déjà été replantés. « Ce n’est pas un animal agressif, mais il a une telle puissance qu’en fuyant, il exploserait une clôture à vache traditionnelle ». Fabien et Arthur sont les deux seuls à pouvoir évoluer un milieu du troupeau (deux groupes de cinquante bisons actuellement), mais les bêtes ne se laissent pas approcher… « sauf si leurs soigneurs sont accompagnés d’un seau d’avoine ».
Les souches lointaines du troupeau viennent d’Amérique et du Canada, mais dans le patrimoine génétique des bisons berrichons on retrouve du belge, du danois ou du suédois. « Ce sont des animaux du nord des États-Unis, il leur faut des terres fraiches et humides, rien à voir avec les paysages brûlés des westerns. C’est la même chose pour l’Europe ».
Un marché de niche
En France, il n’existe qu’une vingtaine d’élevages : un dans l’Allier, les autres dans le Jura et le Doubs, un quart seulement sont destinés à la viande si bien que la France ne produit que 5% de la viande de bison qu’elle consomme. Il s’agit donc d’un marché de niche. Avec les avantages et les inconvénients de ce statut.
Les prix sont élevés, car c’est un produit apprécié des amateurs de viande « avec une finesse incomparable par rapport à la viande de bœuf, apprécie Fabien, mais avec les conséquences inhérentes à cette rareté : problème de l’abattage. Il doit se faire à la ferme car l’abattoir de Valençay n’est pas habilité à traiter le bison. Il faudrait faire une heure et demie de route pour rejoindre Mérigny. Au terme d’un tel transport, le stress rendrait cette bête semi-sauvage dangereuse et la qualité de la viande s’en ressentirait. C’est donc une bête morte que l’on transporte à Mérigny. Avec les garanties des services vétérinaires évidemment ».
Fabien se félicite qu’un vétérinaire de Valençay puisse assurer le suivi du troupeau, mais là encore il a fallu fabriquer un corral pour guider les animaux « convoqués à une visite médicale » vers une cage d’immobilisation permettant au véto d’opérer en toute sécurité. « La cage est venue directement des Etats Unis, du Nebraska très précisément, précise Fabien, car on ne trouve pas en France un article d’une telle qualité ».
Actuellement, de ce troupeau de cent bêtes, on prélève une bête par mois à « La ferme de la métairie neuve ». Un bison mâle est sacrifié à trois ans. Le cheptel tourne avec deux reproducteurs, chaque femelle donne un petit par an, qu’elle allaite, les mâles sont destinés à la production de viande (sauf les sujets qui pourront être sélectionnés comme futurs reproducteurs). La taille idéale du troupeau serait de deux cents bêtes. Un chiffre auquel Fabien prend le temps de parvenir… lorsqu’il aura développé le circuit de vente directe capable d’absorber deux bisons par mois.
Alors, céréales, maraîchage utilisant le fumier produit par les bisons autour des points d’alimentation, plantation de haies. Un cercle vertueux ? « On rétablit ce qui n’aurait pas dû disparaître », conclut Fabien.
Une ferme auberge à l’horizon
Ils sont sept à travailler autour de Fabien pour mener conjointement la culture des céréales, la conduite du potager, l’élevage (y compris la préparation et le conditionnement des produits de boucherie), la commercialisation des légumes en circuit court (vente à la ferme, panier hebdomadaire, vente sur les marchés de Châteauroux). Mais samedi 21 septembre, ils seront tous sur le pont pour accueillir les visiteurs qui viendront déguster les viandes, légumes et fruits de la ferme. Une visite en calèche vers les parcs des bisons est également au programme.
Renseignements et réservations au 02.54.35.38.81, le site web de l’exploitation lafermedelametairieneuve.fr est actuellement en maintenance.
Cette animation, dans l’esprit de Fabien et de son équipe, c’est un test dans la perspective d’un nouveau développement, une ferme auberge où l’on ne consommera que des produits de l’exploitation… sauf le vin de Valençay voisin. On n’a pas encore replanté de vignes à la Métairie Neuve.