Dans la première décennie du siècle, et avant que les réseaux sociaux ne s’emparent d’une communication de masse interactive devenue universelle, on a vu fleurir sur la toile des blogs tenus par des particuliers, célèbres ou totalement inconnus, qui s’exprimaient sur les sujets les plus divers.
Par Patrick Communal.
À Orléans, on a parlé pendant un temps de « République des blogs ». Sur les ondes, une émission de France Bleu relayait les controverses nées de cette expression directe avec « le grand bûcher », table ronde autour de laquelle se confrontaient les opinions sur l’actualité locale.
Des affiches des gardes rouges
Pascal Martineau avait dénommé son blog « DazibaO ». Les souvenirs que j’avais des dazibaos, c’étaient ces affiches collées sur les murs de la révolution culturelle chinoise, destinées à l’expression des gardes rouges. On a vu, dans la foulée de mai 1968, des dazibaos sur les murs de nos universités, rédigées et diffusées par les militants maoïstes, adorateurs du grand timonier. Pascal Martineau qui n’a jamais été maoïste mais un chrétien de gauche, membre du Parti socialiste, et fut l’assistant parlementaire de Jean-Pierre Sueur pendant vingt ans, nous indique, en postface que le dazibao est une tradition de la Chine impériale, une affiche rédigée par un simple citoyen traitant d’un sujet politique ou moral et placardée pour être lue par le public, l’ancêtre du blog, en somme… J’imagine que les idéogrammes figurant sur ces affiches avaient été délicatement peints à l’encre de Chine par des mains habiles, on a donc enjambé la galaxie Gutenberg pour passer directement à l’écriture électronique de ce nouveau DazibaO avec un O majuscule comme Orléans.
Mais Pascal Martineau est un amoureux des livres, écrivain public, il aide notamment des auteurs à finaliser leurs manuscrits avant édition. Il a été journaliste, il ne pouvait laisser disparaitre dans la galaxie numérique, les textes qu’il avait écrits entre 2004 et 2013, et qui nous apportent une information assez dense de ce que fut la vie publique en France et à Orléans, sur laquelle il s’exprime sans détours pour afficher avec beaucoup de franchise et de spontanéité ses convictions. Un petit retour chez le bon vieux Gutenberg a donc permis d’imprimer et de diffuser ce travail.
Très critique sur le fonctionnement municipal d’Orléans
DazibaO est très critique sur le fonctionnement municipal d’Orléans, les atermoiements sur le tramway, les dossiers plantés, les propos et le comportement de Serge Grouard au fil des jours, son conflit judiciaire avec le blogueur Antoine Bardet* dont l’humour satirique se terminera par un exil forcé… Ces petits et grands évènements du quotidien orléanais m’ont conduit à me demander pourquoi la population de cette ville avait pu réélire depuis vingt ans un homme politique qui ne rayonne, ni par la richesse de sa pensée, ni par l’ampleur de ses réalisations au-delà de l’embellissement incontestable du centre ancien et des bords de Loire (BDL comme on dit ici). Je n’étais pas présent à Orléans entre 2002 et 2008, c’est-à-dire pendant une bonne partie de la période couverte par DazibaO. À la lecture de ces textes bruts de décoffrage, j’ai par instant l’impression, avec la fermeture du dernier bistrot de la rue de la République qu’évoque Pascal Martineau, que cette ville respire l’ennui et qu’en définitive, Serge Grouard est peut-être l’homme de la situation.
Dazibao est un ouvrage pour l’histoire immédiate, j’en recommande la lecture à ceux et celles qui veulent faire connaissance avec Pascal Martineau, un homme attachant, chrétien, humaniste, au sens moral indéfectible et sans concessions, et qui s’intéressent bien sûr à Orléans, son atmosphère, son microcosme politique, ses réseaux.
*À lire sur l’affaire Fansolo : Quand le vent de la libre expression vient frapper aux vitres de la mairie
On peut se procurer DazibaO :
Sur le site lulu.com (20 € plus frais de port)
Directement auprès de l’auteur en lui adressant un mail :
pascal-martineau@hotmail.fr
(20 € paiement par chèque, paypal ou paylib)
À la librairie des Temps modernes à Orléans