Le département du Loiret est particulièrement touché par la désertification médicale. Le président de son Conseil départemental, Marc Gaudet, a voulu que l’on interroge les Loirétains afin d’en savoir plus sur leurs préoccupations en santé. Démarrée en mars 2024, l’enquête sur les difficultés d’accès aux soins dans le Loiret livre ses enseignements.
Par Jean-Paul Briand.
Entouré des élues Laurence Bellais et Line Fleury respectivement présidente et vice-présidente de la commission « Culture, Attractivité et Démographie médicale », Marc Gaudet a rappelé que pour cette enquête des cahiers de témoignages ont été mis à disposition dans toutes les mairies du Loiret et également sur Internet.
Renoncement aux soins
Près de 3 000 réponses ont pu être obtenues : c’est peu si l’on considère les 325 communes du Loiret avec près de 700 000* habitants, mais c’est largement suffisant pour avoir des renseignements fiables sur les principales difficultés rencontrées par les habitants du département.
Un chiffre est particulièrement préoccupant : « Près de 83% des répondants ont déjà dû renoncer à un rendez-vous médical », constate le président Gaudet. L’attente avant de pouvoir obtenir un rendez-vous est la première des difficultés dénoncée dans l’enquête, suivie par la distance des praticiens. Si le départ en retraite de nombreux médecins dans les toutes prochaines années inquiète nombre de personnes, a contrario le coût des soins ne semble pas être une difficulté majeure.
Les doléances des soignants corroborent et complètent celles des patients
Ce sont les soins en dermatologie qui sont les plus difficiles à obtenir, suivis de l’accès au généraliste, puis au gynécologue et au dentiste. Concernant la gynécologie on peut espérer que l’augmentation du nombre de sages-femmes en formation, dont les études ne durent que 5 ans, et la récente revalorisation de ce métier vont permettre d’améliorer, dans des délais moins longs que pour les médecins, les conditions d’accès aux soins de gynécologie.
Pour l’ophtalmologie, le bus ophtalmologique, financé par le département et opérationnel début 2025, devrait corriger en partie la situation dans les communes rurales. À quand un « bus dermatologique » ?
Des professionnels de santé ont également participé à l’enquête. Leurs doléances corroborent et complètent celles des patients. De plus, ils souhaitent une amélioration de leurs conditions de travail et une meilleure reconnaissance financière. On s’en serait douté…
Gérer la crise ne la résout pas
Après ce constat délétère, que faire pour améliorer cette situation qui va perdurer encore plusieurs années ? Quelle que soit la couleur politique, aucune majorité n’a été à la hauteur pour résoudre la crise de notre système de santé. Compte tenu de ce désengagement de l’État, chacun y va de son initiative sans réelle coordination : les maires essayent de s’attacher les services de médecins en les appâtant parfois aux dépens des communes voisines ; la ville métropole, Orléans, a signé un accord avec l’Université de Zagreb ; la région essaye d’embaucher des médecins salariés ; le département élabore un plan dédié à la santé, se bat pour faire connaître les attraits du Loiret et aide financièrement de nombreux projets d’installations. Mais gérer la crise ne la résout pas.
Primum non nocere
Avec une pointe d’ironie, le président Gaudet espère porter dans les meilleurs délais les cahiers de témoignages loirétains au prochain ministre de la Santé… Comme beaucoup de personnalités politiques, il souhaite que la liberté d’installation des médecins libéraux soit restreinte. Sacrifier les enjeux de la vie privée des futures générations de praticiens, afin de corriger les errements des décideurs du numerus clausus, c’est risquer de faire fuir des candidats au métier de médecin et de décourager les installations en libéral. Un traitement coercitif de la désertification médicale pourrait être plus néfaste que ce qu’il souhaite soigner. Il serait bon de se rappeler : « Primum non nocere ».
*Mis à jour par la rédaction le 09/09/2024
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