Lucie Castets chez Duralex : une rencontre « gagnant-gagnant »

Lucie Castets, candidate de la gauche pour Matignon, a visité Duralex pour saluer la récente transformation de l’entreprise en SCOP. Accueillie favorablement par les organisations syndicales, l’initiative n’a pas manqué de susciter des critiques, certains dénonçant une récupération politique.

La photo de famille d’une gauche unie derrière Lucie Castets. Photo Magcentre


Par Mael Petit



Ce mercredi 31 juillet avait des allures de journée d’été de la gauche. Une nouvelle tête d’affiche qui se voit à Matignon, des poids lourds des différents partis qui composent le Nouveau front populaire (NFP) en soutien et une ribambelle d’élus orléanais qui ne voulaient pour rien au monde manquer la venue de l’éventuelle nouvelle Première ministre à La Chapelle-Saint-Mesmin dans la métropole d’Orléans. Ajouté à ça un mercure qui dépasse allègrement les 30 degrés et vous avez là le tableau d’une après-midi mettant en scène des élus nageant dans leur bleu de travail. On en oublierait presque l’actualité et le contexte de la reprise en SCOP de Duralex par ses salariés.

C’était pourtant l’objet de la visite de la gauche parisienne dans le Loiret. Lancée dans un Tour de France de « travail sur le terrain », la candidate pour Matignon, Lucie Castets, avait planifié son deuxième déplacement, pour parler travail et industrie, dans l’emblématique verrerie afin de maintenir la pression sur un président de la République dans le même temps en vacances au fort de Brégançon, sûrement focalisé sur les exploits des athlètes français aux JO. Qu’importe si Emmanuel Macron l’ignore alors qu’il a déjà opposé une fin de non-recevoir à la candidature de Lucie Castets, le NFP poursuit sa stratégie en se montrant actif sur le terrain.

Opération séduction auprès des travailleurs et des syndicats

Le choix de Duralex n’a rien d’un hasard puisque l’entreprise, placée en redressement judiciaire en avril dernier, a vu le tribunal de commerce valider son projet de SCOP le 26 juillet. Une occasion à ne pas manquer pour le NFP qui cherchait un site qui reflète le savoir-faire français au moment d’aborder les thèmes du travail et de l’industrie. « Nous sommes venus ici pour saluer une mobilisation exceptionnelle d’un très grand nombre d’acteurs à la fois les salariés mais aussi les organisations syndicales et la direction de l’usine. Évidemment, cette belle histoire de Duralex intervient néanmoins dans un contexte où il y a de plus en plus de défaillances d’entreprises industrielles », tempère Lucie Castets. La haute fonctionnaire en a d’ailleurs profité pour égratigner la politique de réindustrialisation portée par Emmanuel Macron. « Aujourd’hui, on ne s’attaque pas aux causes structurelles des difficultés de l’industrie française. Je pense notamment aux questions de l’innovation, mais aussi de la formation et de la recherche. Il est nécessaire, pour que l’industrie se mette au service de la transition écologique, mais aussi de la compétitivité, qu’on opère un changement radical. Il faut par exemple rendre plus exigibles les délais de paiement », avance-t-elle.

Suliman El Moussaoui, salarié chez Duralex, a offert à Lucie Castets de quoi raviver ses souvenirs d’enfance. Photo Magcentre


Lucie Castets accompagnée de plusieurs cadres de la gauche comme Marine Tondelier (Les Écologistes), Olivier Faure (PS), Barbara Gomes (PCF), Antoine Léaument (LFI) ou encore François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire, s’est ensuite lancée dans un tour du propriétaire, au plus près d’une ligne de production. Une visite d’une grosse heure, rythmée par des échanges avec des salariés, à la fin de laquelle les élus sont sortis essorés par la chaleur. « J’ai surtout entendu de la part des salariés la nécessité d’un changement de méthode. Il faut faire confiance davantage aux travailleurs et aux représentants syndicaux. Ils ont dit vouloir reprendre le contrôle de leur vie au travail, sont prêts à se former, par exemple à la direction d’une entreprise, et ça, c’est extrêmement important », s’enthousiasme une Lucie Castets qui, marquée par la température dans l’usine, affirme devoir entamer une réflexion approfondie sur la pénibilité au travail. À l’image des conditions de travail, les salariés de Duralex n’ont pas laissé passer l’occasion de transmettre leurs messages aux représentants du NFP.

La macronie et Serge Grouard en colère

C’était d’ailleurs une des raisons pour lesquelles la demande de visite de la gauche a tout de suite été acceptée par les organisations syndicales. Une rencontre « gagnant-gagnant » selon Suliman El Moussaoui délégué syndical CFDT et salarié de Duralex depuis 17 ans. Duralex veut ainsi profiter de ce coup de projecteur pour amorcer une nouvelle dynamique. Les appels aux Français à acheter des produits Duralex depuis l’épisode judiciaire vont dans ce sens… et semblent avoir été reçu. Augmentation de plus de 300 % de commandes et un site internet un temps en pause pour gérer l’afflux. Après des mois d’incertitudes suite au redressement judiciaire, Duralex voyait donc d’un bon œil cette visite afin de continuer à capter la lumière pendant que le NFP s’assurait une couverture médiatique. Une stratégie critiquée tout d’abord par le maire d’Orléans Serge Grouard, par ailleurs président de la métropole qui s’est beaucoup investi aux côtés des salariés pour une reprise en SCOP. « Mais que vient faire Mme Castets chez Duralex ? Personne n’est dupe. Elle, qui s’est quasiment auto-proclamée 1ère Ministre, vient faire un “coup de com”, une petite récupération politicienne. Lamentable … laissez les salariés de Duralex travailler dans la sérénité, loin de la médiocrité politique », s’est insurgé le maire d’Orléans sur les réseaux sociaux.

Une colère partagée par la macronie et Roland Lescure, le ministre délégué à l’Industrie sortant, qui pointe de son côté une instrumentalisation de la part de la gauche. Des accusations bien entendu rejetées par Lucie Castets qui, bonne joueuse, a tout de même tenu à reconnaitre que « tous les acteurs publics mais aussi les élus de tous les bords se sont mobilisés sur ce dossier Duralex ». « Cela montre que quand on est ensemble et qu’on a un but commun dans le sens de l’intérêt général, on peut y arriver ». Une petite phrase qui n’est pas sans rappeler que dans sa quête de Matignon, Lucie Castets et le NFP ne pourront faire cavalier seul. Car si ce déplacement devait placer la reprise de Duralex au cœur des débats, le sujet de la stratégie de gouvernance du NFP est vite revenu sur la table. « L’idée, c’est de gouverner avec tous ceux qui ont envie de mettre en œuvre nos propositions. On fera des compromis, on travaillera avec toutes les personnes de bonne volonté qui partagent nos grandes orientations politiques. Ça veut dire discuter avec des gens qui ne sont pas nécessairement favorables au nouveau Front populaire, mais qui sont favorables aux grandes priorités qu’on porte ». Si Lucie Castets réfute tout coup de communication lors cette après-midi, tous les messages, eux, ont été passés. 


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