Quelques heures après des résultats plutôt surprenants à l’échelle nationale, que nous ont appris ces législatives en Indre-et-Loire, dans la première circonscription ?
Par Joséphine
La 37-01
Sur la circonscription de Tours, le ticket Nouveau Front Populaire composé par l’écologiste Charles Fournier et l’Insoumise Marie Quinton remporte confortablement le scrutin avec 58% des voix.
Cela étant dit, si on rentre plus finement dans l’analyse du vote et des stratégies de campagne, on peut noter quelques tendances de fond :
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La gauche unie gagne encore des voix à Tours, raflant 1 000 voix de plus par rapport au second tour de 2022 et reste au même niveau qu’au moment de la vague rose de 2012, si l’on extrapole les taux de participation. Malgré la candidature dissidente confidentielle d’un vieil éléphant PS local qui testait sa popularité pour la prochaine municipale et quelques atermoiements cazeneuvistes, l’Union reste solide à Tours depuis sa constitution en 2019. Et elle permet de gagner du terrain. De quoi rassurer l’essentiel des militants et électeurs de gauche qui se sont fortement mobilisés depuis trois semaines pour le NFP et non ses différentes parties, et ce alors que certains socialistes locaux, il est vrai isolés et se pensant comme leaders naturels de la gauche pour l’éternité, pouvaient commencer à caresser l’idée de prendre leurs distances avec l’idée d’union, surinterprétant le résultat de Glucksmann aux Européennes.
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Les macronistes, suivant le même calcul d’extrapolation de la participation, perdent 2 000 voix par rapport à 2022, 4 000 par rapport à 2017, confirmant la désaffection progressive des électeurs pour les politiques gouvernementales. Mais au-delà de l’échec du parti présidentiel, c’est aussi l’échec d’un homme, Benoist Pierre, qui a tout fait pour « municipaliser » cette élection et en faire une sorte de référendum « pour ou contre les écolos à Tours », escamotant son appartenance politique sur ses affiches et tracts, survalorisant les questions locales dans ses prises de position, continuant certaines outrances au sujet de l’écologie ou de la FI, tout en lorgnant un peu vers le RN avec quelques saillies sécuritaires bravaches, sans succès. C’est d’autant plus un échec personnel que Benoist Pierre n’a pas voulu – ou réussi – à embarquer les figures locales des droites dans cette campagne, entendant dépasser le régime des partis pour personnaliser les questions politiques, en pur macroniste. Les quelques militants de Renaissance et leurs cadres locaux, le Modem ou Horizons n’ont ni fait campagne, ni appelé à voter pour Benoist Pierre, pas plus qu’ils n’ont publié un communiqué ou pris une quelconque initiative personnelle. Seuls certains LR ont pondu un très discret communiqué et des consignes pour le second tour, globalement suivies, l’essentiel des électeurs LR s’étant reportés sur Benoist Pierre.
Mais cette tentative d’OPA de Benoist Pierre sur les droites à Tours n’a pas spécialement permis de clarifier le paysage politique en vue des municipales de 2026. Du reste, le matraquage anti-écolo porté par les droites à coups de pseudo-pétitions, de fake news et de prises de parole interminables en conseil municipal au sujet des pistes cyclables et du tracé de la ligne de tram ne semblent pas porter leurs fruits, preuve que les droites sont incapables pour l’heure de sortir de la simple réaction au tempo imprimé par la majorité plurielle d’Emmanuel Denis, privant d’ailleurs leurs électeurs de projet concret.
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Les électeurs du RN et de Reconquête ont refusé pour moitié de participer au second tour ce dimanche, ce qui explique la hausse de l’abstention de cinq points à Tours et l’augmentation du nombre de bulletins blancs ou nuls (+1500). La moitié des électeurs RN qui se sont tout de même déplacés se sont certainement répartis de manière équivalente entre Benoist Pierre et Charles Fournier. Le premier a probablement drainé le vote frontiste de la bourgeoisie conservatrice locale qui a voulu faire barrage au NFP, le second a certainement attiré le vote lepéniste des quartiers populaires de Tours Nord et des Fontaines qui a été plutôt été polarisée par les propositions sociales de la gauche. Là encore, le fantasme porté par certains candidats et commentateurs au sujet de la porosité entre LFI et le RN – toujours cette rhétorique des « extrêmes qui se valent » – est démenti par les faits.
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