Ils sont attablés au Fouquets en pleine promo du livre quils viennent de commettre en commun « Comptines poétiques et dessins charmants pour grands enfants ». Le duo paraissait improbable tant ces deux compères ont des réputations opposées. Laurent Gerra, homme de droite aux pieds vissés dans son Bugey natal, Cabu cultivant l’extrême gauche comme d’autres agitent des drapeaux. Et pourtant, plus copains qu’eux tu meurs ! « Nous sommes deux sales gamins ensemble », disent t-ils en choeur avant de s’esclaffer.
Longtemps leurs chemins ne se sont pas croisés, ce qui nempêchait pas chacun davoir le parcours de lautre à lil et de bien aimer sa production. Alors quand Jean-Louis Festjens, éditeur chez Michel Lafon a eu l’idée de les réunir ils ont dit « oui » avec gourmandise et en chansons, « puisqu’en France, dit-on, tout finit en chansons » . Laurent Gerra se marre. Cabu est en retard, très en retard, « selon son habitude mais il honore toujours sa parole. Impossible de lappeler pour savoir où il en est. Il na pas de portable, pas de boîte mail et dans la journée ne répond pas à lappel de son téléphone fixe ».
Quand enfin le dessinateur franchit le tambour du restaurant, un large sourire sous les lunettes, les excuses vite expédiées, le couple éditorial se forme façon Coluche et Le Luron 2013, sans voilette et haut de forme mais la même complicité et le même plaisir en bandoulière. « Gerra, cest mon frère en caricature. Il nous venge chaque matin des puissants, des suffisants et des prétentieux. Et le faire en chanson c’est montrer la comédie humaine de la plus drôle des manières », dit Cabu le tendre . « Nous voilà enfin réunis par cette cause commune qu’est la rigolade alliée à notre goût pour la chanson », ajoute un Gerra visiblement satisfait. Le serveur a posé devant lui un beau filet de poulet de Bresse cuit à point.
Chansons détournées et caricatures :
Incomparables observateurs de notre société, provocateurs à lhumour ravageur, Cabu et Gerra sont des caricaturistes hors pair. Lun avec son crayon, lautre avec sa voix . Politiques de tous bords showbiz, télévision, les sportifs le pape et ses ouailles fussent elles haut placées dans la hiérarchie- ils déboulonnent à tout va. « Je caricature peu et même presque pas les femmes ; ma tessiture me l’interdit », reconnaît cependant Laurent Gerra .
A deux ils ont réalisé un bien réjouissant brûlot et habillé pour lhiver, en chansons et en images, une ribambelle de têtes daffiche. Sur des airs connus dont Gerra a détourné et modifié les paroles. « Les restos du coeur » de Jean-Jacques Goldman deviennent « Les restos du cul, création de DSK, Ribery tient la vedette sur l’air de « Félicie aussi » cher à Fernandel. L’ouvrage s’ouvre sur « La cabane du pêcheur » de Francis Cabrel qui devient « Ma cabane au fond du jardin » On y trouve aussi « La Burka » façon Vincent Delerm, le pape chantant les Beatles et Nafissatou Dialo sur lair de « Lily » de Pierre Perret/ « On la trouvait plutôt jolie, Nafi. Elle venait pour faire le lit, Nafi. Elle a croisé un détraqué. Sortant de la douche à poil. Balançant tout sur le tapis. Elle croyait quon était égaux, Nafi
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La sortie de cet ouvrage n’empêchera pas Laurent Gerra d’accomplir sa tournée en France comme prévu et de poursuivre ses prestations matinales quotidiennes sur RTL. Il interprète, entre autres, un François Hollande muet qui au bout d’un moment repart en coulisses pour prendre sa boite à outils