Deux acrobates font leur show dans moins de 10 mètres cubes d’eau. La prouesse est digne des grands du cirque, la poésie dégagée digne d’artistes accomplis. La différence de pesanteur, l’étouffement des bruits, le jeu des bulles créent un monde à part. Un spectacle hors norme qui fait rêver.
Danse en apesanteur. Capture du trailer de Pierre Barbier.
Par Bernard Cassat
Deux doux dingues fous d’eau et de cirque ont pensé, il y a quelques années, à monter un spectacle dans l’eau. Ils ont demandé à Mécanique vivante, une entreprise qui crée des machines pour faire rêver, de construire un aquarium géant et transportable. Qui est sur la scène de la salle Barrault depuis mardi et jusqu’à ce jeudi 13 juin.
Frédéri Vernier et Sébastien Davis-VanGelder y proposent en effet leur spectacle « Out of the blue ». Circassiens apnéistes tous les deux, ils développent leur spectacle dans différentes directions : la prouesse, l’agilité physique et la beauté évocatrice des images. Ça commence par la prouesse, une apnée impressionnante de 4.27 minutes réalisée par Sébastien avec une aisance impressionnante.
Un autre monde. Capture du trailer de Pierre Barbier.
Ensuite commence le vrai spectacle. Ils plongent dans l’eau tous les deux et pour le spectateur, les évocations, presque les sensations, vont bon train. Ces deux corps qui ondulent comme des dauphins ou comme des phoques, reprenant de temps à autre l’air nécessaire, évoquent, font penser, et exploitent ces allusions. Monde en apesanteur, ils jouent comme des astronautes qui découvrent la liberté par rapport à la pesanteur. Sur de la musique de Hans Kunze, un système d’amplification sonore nous fait entendre les bruits atténués, feutrés de leurs manipulations. Comme des gorgones vivantes, ils ondulent. Se transforment même en sirène. Et font bien sûr penser au fœtus dans le placenta.
Un espace onirique
On n’est pas dans le même espace qu’eux. Le leur est vraiment, objectivement réduit, et pourtant ils nous montrent la liberté ! Leurs contraintes sont énormes mais rien n’en paraît. Ils jouent à se pourchasser. Quelques accessoires inversent le monde, ils boivent de l’air et en rient, ils remplissent une caisse retournée d’air pour s’amuser à s’y réfugier. Et reprennent leur course folle au milieu de feuilles de plastique, accélèrent le rythme, jouent à n’en plus finir à saute-mouton, s’enlacent et se délacent, dansent dans cette apesanteur si esthétique. La lumière se colore et la dernière partie, merveilleuse, endiablée, sorte de chorégraphie d’un monde sans repère physique, où l’aquatique devient aérien, lunaire, fait monter une émotion profonde.
Les deux acrobates jouent à saute-mouton. Capture du trailer de Pierre Barbier.
C’est tellement original, tellement jamais vu ! Le pari fou de ces acrobates d’un nouveau genre est gagné. Ils nous transportent pendant une heure dans un spectacle, dans un monde différent. Comme tout numéro de cirque, le leur est sans paroles, sans histoire. Mais nous remplit d’images qui restent dans la mémoire parce qu’elles jouent aussi avec la puissance de l’eau, les récits, les mythes et les prouesses attachés à cet élément. Véritables poissons dans l’eau, Frédéri et Sébastien inventent le cirque au fond de l’eau. Et c’est magique !
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