Leur défaite encaissée, la plupart des états-majors tentent de réveiller les troupes pour une campagne législative qui sera très courte et qui verra la quasi-totalité des députés sortants de la région à nouveau candidats.
Par Jean-Jacques Talpin
Les sondages n’avaient pas menti. Même si le total RN et Reconquête n’atteint pas les 40% des voix comme certains le redoutaient, le score de l’extrême droite frôle cependant les 36%. Si cette défaite semblait annoncée, beaucoup attendaient une reprise en main de l’électorat dans les derniers jours et une prise de conscience face à un parti dont le programme repose sur du sable. Il n’en fut rien dimanche et le sourire forcé et ultrabrite de Bardella peut désormais s’afficher sur tous les panneaux électoraux avant les scrutins des 28 juin et 7 juillet.
À gauche surtout mais aussi dans une moindre mesure à droite, l’heure est à la remobilisation avec une question vitale : comment empêcher que le RN obtienne une majorité à l’Assemblée nationale ? Le constat est hélas ravageur : avec 31,37% des voix Jordan Bardella l’a emporté partout ou presque dans la région comme en France. Alors que toute la gauche réunie (PS+PC+LFI+ écologistes) dépasse à peine les 30 %, la majorité présidentielle est abandonnée en pleine campagne et n’arrive nulle part ou presque à dépasser les 20%.
La Touraine petite exception
Tous les départements de la région ont ainsi placé Bardella en tête : Loir-et-Cher 37,2%, Loiret 34,8%, Cher 37,9%, Indre 40%, Eure-et-Loir 37,9%, Indre-et-Loire 28,4%. C’est donc en Touraine, vieille terre de gauche, que l’extrême droite se casse presque les dents avec un RN à 28% (avec 9 communes qui ne l’ont pas placé en tête). Le RN décroche pourtant la première place dans les grandes villes : Chambray, La Riche, Ballan-Miré alors que Valérie Hayer sauve les meubles en décrochant une première place à Saint-Cyr-sur-Loire et Saint-Avertin. Mais à Tours dirigée aujourd’hui par une municipalité de gauche multicolore, Raphaël Glucksmann réussit même l’exploit d’arriver en tête devant le RN alors que dans l’ancienne cité communiste de Saint-Pierre-des-Corps (mais passée à droite aux dernières municipales), Manon Aubry de LFI décroche le pompon. Dans tous les autres départements et capitales départementales, le RN consolide ses positions avec un seul point de faiblesse (25% tout de même) à Bourges (longtemps ville communiste) devant ses concurrents directs distancés à 16,5%.
Olivet et Combleux résistent à la vague
Pour le RN, la région Centre était déjà un territoire de conquête en ayant décroché un siège en Loir-et-Cher et deux dans le Loiret lors des dernières législatives de 2022. Il ne compte d’ailleurs pas s’arrêter là, notamment dans le Loiret où il gagne 10 points par rapport aux européennes de 2019. Il gagne des positions bien sûr en campagne : 60% à Bucy-le-Roi, 62% à Ervauville, 51% à Courtenay, 48% à Beaune-la-Rolande et Puiseaux, etc. Mais aussi, et c’est un phénomène nouveau, dans les grandes villes. Il occupe ainsi le premier rang dans 20 des 22 communes de la métropole orléanaise, y compris à Orléans avec des records à Ormes (37%). L’extrême droite mène également la danse dans des villes communistes (37% à Saran, 36% à Châlette). En fait trois communes seulement dans le Loiret ont échappé à ce rouleau compresseur bleu marine : Escrignelles dans le Giennois qui a curieusement choisi le candidat LR comme champion alors que près d’Orléans deux communes plutôt aisées (Combleux et Olivet, dont le maire Matthieu Schlesinger vient de rejoindre le camp présidentiel en adhérant à Horizons) ont choisi d’accorder leur confiance à Valérie Hayer.
Une campagne très courte
Tous les battus n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. Mais le deuil va être de courte durée : trois semaines seulement avant le scrutin fin juin et des candidats qui devraient donc être tous déclarés en fin de semaine. A priori tous les députés sortants devraient à nouveau être candidats. Mais en quelques jours les opposants à l’extrême droite vont devoir inventer un nouveau positionnement et instaurer de nouvelles alliances : à droite, au centre comme à gauche seuls des regroupements pourront s’opposer à la victoire des candidats RN qui afficheront leur unité. La majorité présidentielle a déjà affirmé qu’elle n’opposerait pas à des députés sortants situés dans le « champ républicain » (RN, Reconquête et LFI en sont donc exclus). Le PS et LR adopteront-ils la même posture ? À gauche LFI rêve de réinventer la Nupes, naturellement en la dirigeant ! Pour d’autres il ne restera, mais un peu tard, que la rue en défilant derrière une forêt de drapeaux rouge et noir dénonçant « le péril fasciste ! ». Il fallait peut-être y penser avant !
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