L’Espagne n’en a pas fini avec le franquisme, presque 50 années après la mort du dictateur, ses symboles, sa fondation ayant encore pignon sur rue. Même si des progrès conséquents ont vu le jour dans le domaine sociétal, l’extrême droite est en embuscade avec une poignée de députés. La bête immonde veille. Agnés Mateus nous le rappelle.
Par Bernard Thinat
L’artiste catalane était venue l’an dernier, déjà invitée par le CDN d’Orléans avec « Rebota, Rebota… », spectacle dénonçant les féminicides, le machisme dans nos sociétés patriarcales, tout cela avec une très grosse dose d’humour. C’était au Bouillon au sein de l’Université d’Orléans.
Cette fois, elle est revenue pour deux soirées au théâtre d’Orléans, avec « Patatas Fritas Falsas », titre tout aussi énigmatique que le précédent, pour dénoncer le fascisme que son pays a connu durant plus de 40 années au XXᵉ siècle, mais aussi tous les discours des braves gens qui se méfient des étrangers, surtout des arabes, des noirs, des gitans, qui se barricadent chez eux, entourés de chiens féroces, quitte à se faire dévorer. C’est un immense cri, un hurlement de rage continuel qu’elle lance, avant de nous dire en français que ce discours n’est pas le sien, mais on avait tous compris.
Agnés Mateus – Photo Quim Tarrida
Auparavant, en guise de prologue et pour plonger le public dans l’univers franquiste, un monumental drapeau « nationaliste » est tendu face au public. Les minutes s’égrènent telles les années de dictature, des lumières font jaillir des éléments du drapeau, bec crochu, griffes… Dix minutes, peut-être plus. Et le rideau s’ouvre sur le cri d’Agnés Mateus.
Puis apparaîtra, au sortir d’une colonne, la marionnette de Franco, flanquée de la mini-marionnette Marine. Et Franco de s’enthousiasmer en apprenant qu’en France 88 députés RN siègent au parlement, il ira même exiger d’entrer au Panthéon, avant de cajoler la mini, puis tenter de la bouffer.
Au final, l’artiste espagnole s’empare d’une masse et détruit une machine à laver qui aura fonctionné pendant plus d’une heure, afin de laver plus blanc que blanc les cerveaux de ceux qui ne pensent pas et qui préparent déjà leur bulletin de vote, on sait pour qui. La machine à laver, c’est assurément chez nous la chaîne CNews du milliardaire Bolloré.
CNews mise en miettes par Agnés Mateus – Photo B.T.
Performance rare de la Catalane. Agnés Mateus et son compère Quim Tarrida ne procèdent pas par métaphores, tous deux vont droit au but, là où ça fait mal, avec quelques doses d’humour, histoire de détendre l’atmosphère. Spectacle créé à Barcelone en 2022, c’était la première en France, au CDN d’Orléans.