Confrontés à une problématique technique et administrative pour la téléphonie mobile, les habitants de Nançay expérimentent une nouvelle méthode pour supprimer la zone blanche qui les impacte depuis de nombreuses années. La modification de l’utilisation des fréquences ouvre par ailleurs le champ à une nouvelle « écoute » stellaire, particulièrement dans la constellation appelée Pisces en latin.
Par Filet de Saumon
Identifiée par Ptolémée parmi une cinquantaine de constellations, située à l’est du Verseau et à l’ouest du Bélier, celle dénommée Pisces (poissons en français) ne contient que peu d’étoiles visibles, « toutes assez peu lumineuses » selon Wikipédia qui s’y connaît vachement en qualificatif. C’est probablement l’une des raisons pour laquelle on ne possède que très peu d’information sur elle. « Elle découpe un pan du ciel éloigné du plan de la Voie lactée » toujours selon Wiki qui hésite entre poésie et technique et est décidément toujours aussi précis.
C’est ce manque de connaissances de ce secteur astral que les scientifiques de la station de radio-astronomie près de Nançay, en Sologne du Cher, vont commencer à défricher à partir de ce 1ᵉʳ avril 2024. Depuis que le portable est pour la plupart des habitants de la planète, leur mémoire, leur pense-bête, leur appareil photo et, accessoirement, leur moyen de communication privilégié, dans la commune et alentours, il n’était pas possible de capter autrement que par box individuelle interposée. Hors habitation point de salut, y’a pas de réseau, pas de 4G, pas de services mobiles, du GPS aux numéros d’urgence inclus. Vous me direz, pas d’appel intempestif de fishing (hameçonnage) non plus ! Les habitants du village étaient donc confrontés à ce problème de réception téléphonique quasi insurmontable lié aux prérogatives de ladite station de radio-astronomie.
Pour cette zone que l’on dit blanche comme la fumée papale, la préfecture du Cher vient d’annoncer avoir, possiblement, trouvé une solution. Lors d’un temps de travail avec les experts des autorités nationales en charge des fréquences et de la régulation, le préfet du Cher a exposé les meilleures pistes de solutions pour apporter une couverture mobile dans la commune de Nançay, avec la participation active de l’opérateur Orange et de l’observatoire de Paris. « Au vu des solutions techniques proposées, le progrès ainsi constaté permet d’acter la tenue d’une expérimentation dans le village cette année », assurent les services préfectoraux.
Allo Pisces, j’écoute
Voilà qui a, dans un premier temps, ravi le collectif d’habitants “Pour la Téléphonie Mobile à Nançay” initié pour maintenir l’administration sous pression. Voilà qui, dans un deuxième temps, a ravi les chercheurs qui viennent de bénéficier du soutien non prévu des services de l’État pour appréhender ce système d’étoiles. Parce que, sur le coup, on devrait libérer des fréquences. Depuis longtemps, le projet POISCAILL (Point InterrogationS CIblé Lumineux Lointain) était dans les cartons, à chapeaux ou à dessins, c’est selon. Il suffisait de libérer un peu d’espace dans l’espace pour que justement l’espace ne soit plus… vide. Question matériel, récepteurs, toussa, aucun problème, la station avait toute la dotation en antennes nécessaire. Surtout, il pouvait être envisagé de détourner une partie du système LOFAR (LOw Frequency Array), un interféromètre constitué de plus de 50 000 antennes en Europe, dont 60% aux Pays-Bas, réparties en 52 « stations ». En exploitation scientifique depuis 2012, une de ces stations (la LOFAR FR606) est située à Nançay. Constituée de deux réseaux d’antennes et d’un container rassemblant les récepteurs et l’informatique, la station est connectée à un superordinateur central à Groningen aux Pays-Bas.
Comme le jour de l’ouverture de la pêche dans les étangs des environs – la pêche est la deuxième mamelle de la Sologne après la chasse – on attend avec impatience le retour des échos sonores et la capture de signaux provenant de Pisces. Des gros ou des petits, peu importe … Pourvu que ça morde.
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