Comme la guerre de Troie, le salon du livre de Vierzon n’aura pas lieu à l’automne prochain. Après onze éditions où, souvent, le gratin national de l’écriture côtoyait les auteurs régionaux et locaux, la manifestation locale est mise en mode pause. Les organisateurs planchent désormais sur une méthodologie moins énergivore et plus en phase avec le fonctionnement des acteurs du monde littéraire.
Michèle Dassas figure parmi les auteures régionales souvent présentes à Vierzon. Photo FS
Par Fabrice Simoes
La seconde ville du Cher avait perdu sa dernière librairie, en tant que telle, voilà quelques années déjà. Au cœur de la ville berrichonne il restait bien le site « culturel » d’une grande enseigne de supermarché mais c’était tout. Même si les rayons peuvent être parfaitement achalandés, le concept est déjà un peu différent. La consommation de la culture a ses propres limites. Le conseil, élément important dans le domaine littéraire, peut y être moins usité par exemple.
Depuis le début des années 2010, le salon du livre de Vierzon offrait une vitrine aux écrivains du cru, associés à des têtes de gondole plus connues. Des « vedettes » qui touchaient à tous les domaines mais donnaient une visibilité accrue au salon à l’instar du populaire Raymond Poulidor, d’écrivains de fort calibre comme l’académicien Jean-Christophe Rufin ou de personnages de premier plan comme l’ancien président de la République François Hollande. Lors de la dernière édition, en novembre dernier, le salon n’avait pu s’appuyer sur de telles opportunités. Malgré une organisation sans faille, le bilan en a été tiré…
Jean-François Jacq, Jean Catinaud, Isabelle Duchaussoy et l’association Croc’livres et les amis du musée ont décidé de mettre la manifestation en sommeil. Un mode pause pour mieux redémarrer, c’est possible. C’est du moins ce que laisse entendre le bref message paru sur les réseaux sociaux. Sur la page Facebook du groupe du salon, suivie par 800 membres, on peut lire : « Nous sommes au regret de vous annoncer qu’il n’y aura pas d’édition du salon du livre de Vierzon pour 2024. C’est avec une sincère émotion que nous souhaitions tous et toutes vous remercier pour ces merveilleuses rencontres et échanges ayant jalonné les onze éditions de ce salon. Ce fut une réussite en termes culturels et ce fut grâce à vous, ainsi qu’à tous les précieux bénévoles “sans qui”. Quoi qu’il en soit, nous réfléchissons à d’autres façons de prolonger ce si beau travail accompli durant ces nombreuses années. Le site internet et cette page nous permettrons de rester en lien et de vous tenir informés le cas échéant. »
François Hollande est déjà venu à Vierzon pour le salon en 2022 mais aussi en 2017, pour une conférence sur l’Europe. Photo FS
Des axes de travail pour un renouveau du salon
Organiser un tel salon est une très lourde charge. Pour des bénévoles, c’est un énorme travail de préparation en amont. Parfois le succès n’est pas aussi patent que l’on espérait. La difficulté à recevoir, ou à les renouveler, les têtes d’affiche, le coût, l’investissement des bénévoles, l’augmentation du nombre de manifestations similaires aussi, sont, parmi d’autres, autant d’éléments dont la prise en compte est nécessaire. Avant de faire l’édition de trop, Jean-François Jacq et ses compères ont voulu restructurer leurs pensées. Ils expliquent d’ailleurs avoir « voulu nous autoriser à réfléchir… ». Redéfinir un salon du livre, le repenser autrement, telle est la gageure que veulent désormais tenter les organisateurs. Cela peut passer par la modification du format, par la création de thématique, par un calendrier de micro-salons qui se succèdent au fil de l’année, au fil des saisons, par exemple. Avant de prendre cette décision de mise en sommeil, les organisateurs avaient lancé le débat. Les discussions ont déjà permis d’avancer dans un nouveau projet semble-t-il.
L’ouverture prochaine d’une vraie librairie spécifique, en plein centre-ville, augure peut-être de ce renouveau. Pour ne pas rester sur une page blanche, et que renaisse ce qui était probablement le salon littéraire le plus important dans le Cher, on se dit que sauter une ligne dans le texte peut, parfois ne rien changer à l’histoire. Comme dans un livre où, après sa mort, le héros ressuscite : « D’un bond, il se releva… » C’est ce qu’espèrent tous ceux qui aiment à tourner les pages de leurs bouquins.
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