Deux ans après la création du Pôle Cold cases à Nanterre qui a traité ou traite 385 dossiers dont 10 transmis par les juridictions de la région Centre-Val de Loire, le ministre de la Justice a annoncé jeudi un renforcement des moyens avec la création d’un quatrième cabinet d’instruction dans le « service ».
Par Zoé Cadiot
Deux bougies, un bilan et un invité de marque. Pour le deuxième anniversaire du Pôle national des crimes sériels ou non élucidés (PCSNE), qui est rattaché depuis mars 2022 au tribunal judiciaire de Nanterre (Hauts-de-Seine), le président du tribunal, Benjamin Deparis, et « son » procureur, Pascal Prache ont accueilli le 7 mars le garde des Sceaux, à l’origine de l’aventure. Point de petits fours mais un bilan d’étape du pôle cold cases, qui est aujourd’hui encore unique en son genre. Sa création avait été longuement attendue par les familles des victimes et leurs avocats, soucieux de connaitre la vérité. Comme celle de Caroline Marcel – tuée en 2008 sur les bords du Loiret, près d’Olivet, alors qu’elle était partie faire son jogging -, dont le dossier avait été transmis au Pôle à l’été 2022. Ces proches devraient enfin avoir des réponses avec l’interpellation à Toulouse (Haute-Garonne) et la mise en examen en janvier dernier d’un suspect, identifié par son ADN sur les clés de voiture de la victime. Les progrès scientifiques ont ainsi permis comme dans l’affaire de Chantal de Chillou de Saint-Albert, tuée dans la Drôme en 2001 par un Loirétain, d’identifier le suspect.
Nouveaux moyens
« Le fait que la justice s’intéresse à ces situations, aux gens, qui sont dans la détresse depuis qu’ils ont perdu un conjoint, un fils, une fille, c’est quelque chose de réconfortant », explique le ministre. « Rien ne serait pire pour elles que de se dire que tout n’a pas été fait ». Aussi, « l’objectif, c’est une montée en puissance progressive » de ce pôle, qui constitue « l’honneur de la justice ». Et pour étayer ses propos, le locataire de la place Vendôme annonce des moyens supplémentaires avec notamment l’arrivée prochaine d’un attaché de justice, d’un nouveau magistrat et la création « à l’horizon 2025 » d’un poste de juge d’instruction.
10 dossiers dans la région
En deux ans, 385 affaires dont cinq transmises par le parquet d’Orléans et cinq autres par celui de Bourges, ont été portées à la connaissance du pôle cold cases qui rappelons-le a une compétence nationale. Le plus vieux dossier date de 1972, soit il y a 52 ans ! Après différents examens, ce dernier s’est saisi de 105 dossiers. « Le pôle n’a pas vocation à tous les prendre », soulignait jeudi le procureur Pascal Prache. « Il faut que le pôle apporte une vraie plus-value », ajoutait-il.
Sur les traces de tueurs en série
Parmi les affaires retenues, 88 dossiers de crimes sériels ou non élucidés et onze parcours criminels, créés pour retracer le parcours de vie d’un tueur en série ou soupçonné de l’être, font l’objet d’informations judiciaires, menées par une des trois juges d‘instruction de la « division ». Elles se pencheraient actuellement sur le parcours de 9 criminels français, identifiés comme tueurs en série ou non, comme Nordhal Lelandais ou Pascal Jardin. De plus, 17 dossiers d’affaires non élucidées dont un parcours criminel sont au stade de l’enquête préliminaire. Ce qui permet au procureur de dire que 84% des procédures du pôle sont à l’instruction sans pour autant préciser la nature, ni l’origine des dossiers traités.
Des mises en examen et une condamnation
Pour l’heure, les investigations ont permis de faire avancer significativement 6 affaires comme celle de Lydie Logé dans l’Orne (disparue en 1993, elle aurait eu le malheur de croiser la route des Fourniret). Au crédit du pôle, on peut également ajouter trois mises en examen dont l’homme suspecté du meurtre de la joggeuse du Loiret, Caroline Marcel et surtout la condamnation de l’ex-femme de Michel Fourniret, Monique Olivier, à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité dans les enlèvements et meurtres de Marie-Angèle Domèce, Joanna Parrish et Estelle Mouzin. Elle avait avoué sa responsabilité dans ces affaires vieilles de 35, 33 et 21 ans à la juge Sabine Kheris, coordinatrice du pôle « cold cases ». Un bilan qui peut paraitre à certains dérisoire quand on sait que chaque année ente 200 et 300 crimes ne sont pas résolus.
Plus d’infos autrement sur Magcentre : Mis et Thiennot, 77 ans après l’affaire rejugée