Malgré un budget de 50 millions d’euros sur 10 ans consacré au plan vélo, les actions concrètes sont jugées insuffisantes par les associations de cyclistes. Alors que la métropole d’Orléans promet d’engager les grandes manœuvres en 2024, une cinquantaine de manifestants, lassés des promesses, se sont rassemblés devant la mairie avant la session métropolitaine pour enterrer le plan vélo.
Par Mael Petit
« Le collectif Vélorution Orléans et l’association Dammo ont la tristesse de vous faire part du décès du Plan vélo 2019 ». La mise en scène pouvait faire sourire les quelques Orléanais de passage devant la mairie de la ville, mais du côté des défenseurs d’une politique cyclable plus ambitieuse, l’humeur n’était pas à la fête en cette fin d’année. Il faut dire qu’ils se portent régulièrement au front pour dénoncer le ronronnement de la métropole sur le sujet. A l’heure de la transition écologique et des enjeux qui s’en dégagent, un programme d’aménagements cyclables plus ambitieux semble plus que nécessaire. Mais aucun élu de la métropole n’avait apporté de défibrillateur pour la dernière session de l’année portant sur le vote du budget 2024.
Alors on a préféré s’interroger sur la part consacrée au vélo sur Orléans et son agglomération. Et notamment la gauche et les élus des communes du nord de la Métropole, qui n’ont pas manqué d’interpeller l’exécutif sur son discours et les ambitions affichées sur sa politique cyclable. Avec toujours le même enseignement : le rythme d’investissements de ce plan vélo n’est pas à la hauteur des enjeux. Et c’est aussi le constat des associations réunies ce jeudi soir. « Les élus métropolitains l’avaient pourtant voté à l’unanimité en 2019. Le budget de 50 millions d’euros prévu sur 10 ans et les discours en matière de transition écologique tenus par nos élus présageaient d’une volonté forte de voir se transformer notre territoire pour accueillir des infrastructures cyclables de qualité. Force est de constater que, 4 ans après, le résultat n’est pas à la hauteur de l’ambition affichée », taclent les représentants du collectif Vélorution.
Un budget mal utilisé ?
Du côté de Michel Martin, chargé des finances, on préfère mettre en avant le montant consacré au vélo pour 2024 avec « 1,850 M€ de dépenses directes prévues et qui seront complétées par une partie des dépenses de requalification des voiries ». Une réponse qui aura du mal à convaincre les associations qui dénoncent sur ce point « une opacité totale sur l’utilisation du budget. Afin de gonfler artificiellement les dépenses liées au vélo, la métropole impute systématiquement 20% des travaux de voirie aux aménagements cyclables même quand de simples pictos sont peints sur la route voire sur le trottoir ». Les pro vélos ont taffé leur sujet et possèdent plus d’un reproche dans leur musette à griefs. Mais avant tout, ce qu’ils réclament, c’est du concret et la mise en marche de travaux pour établir un véritable réseau cyclable au sein de la métropole. Peut-être seront-ils entendus en 2024 puisqu’à l’approche des fêtes, le président de la métropole a sorti de sa hotte… des promesses. « Certaines critiques sont justifiées, concède tout d’abord Serge Grouard, sur la nécessité de compléter le réseau pour éviter les points de rupture, sur l’harmonisation des politiques qui sont conduites en matière de signalétiques entre la métropole et les communes. Il faut qu’une charte commune soit proposée. L’année 2024 verra des travaux très concrets débuter avec un certain nombre de réalisations conséquentes engagées », prédit le président de la métropole.
Des annonces qui peinent à convaincre plusieurs communes de la métropole dont les élus saranais pour qui la priorité identifiée de la requalification des Mails – « projet sorti du chapeau et symbole de la ville-centre et son prestige » – vampiriserait les attentions au détriment d’une restructuration d’axes plus structurants dans les communes qui pourraient bénéficier d’aménagements cyclables. Des efforts trop concentrés sur l’intra-mail et un aménagement du pont Georges V synonyme d’arbre qui cache la forêt, alors que le reste de l’agglomération est en retard. Olivier Schneider, président de la Fédération des usagers de la Bicyclette, venu à CO’Met le mois dernier dans le cadre des assises des mobilités organisées par le département du Loiret, l’avait déjà constaté en début d’année au moment de rencontrer les représentants de collectivités. « Orléans ronronne » niveau vélo et doit faire mieux.
Les pro vélos responsables des difficultés de recrutement d’un “cadre vélo” ?
Pour d’autres, la métropole gagnerait en efficacité à jouer la carte de la concertation. Une remarque qui revient souvent dans la bouche des associations à l’heure où le courant passe bien mieux auprès d’autres collectivités comme le Département ou la Région. Les quelques réunions entre pro vélos et élus métropolitains en charge de la politique cyclable sont rythmées par les tensions et débouchent le plus souvent sur pas grand-chose. La faute au manque d’entrain de la métropole sur le sujet mais aussi à l’agacement du camp adverse où certains acteurs manquent parfois de tact et de diplomatie au moment des discussions, nous a-t-on rapporté.
Une communication que goûte peu la métropole confrontée aussi à des difficultés de recrutement pour trouver une personne qui chapeauterait ses projets. « Sur le plan de l’ingénierie, on a toutes les peines du monde aujourd’hui à recruter un cadre qui s’occupe du vélo. Et quand on se fait pourrir sur les réseaux sociaux en disant qu’on est nuls, que rien ne se passe, ça n’incite pas forcément les candidats à venir nous rejoindre », se plaint Eric Lemaignen. Pour le vieux briscard orléanais, l’attitude des associations serait donc la cause du ralentissement du déploiement du plan vélo et le responsable du manque d’attractivité du poste. « Utiliser leur expertise d’usage c‘est oui, mais il faudrait de la confiance. Qu’on dise ce qui va mal, c’est parfaitement logique mais il faut aussi souligner ce qui va bien », tempère-t-il. « Pas sûr que ce soit de leur faute si on n’arrive pas à recruter un cadre vélo », répond Carole Canette. La maire de Fleury-les-Aubrais tout comme l’élu Jean-Philippe Grand implore la métropole d’étudier rapidement les propositions des usagers à défaut de pouvoir se reposer sur l’expertise d’un cadre, mais aussi à engager les investissements qui permettront de rattraper le retard accumulé au risque de voir le plan vélo finir dans le caveau.
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