La Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage et le Centre des Monuments Nationaux, proposent un double événement dans le cadre grandiose du Panthéon, une exposition de toiles monumentales de l’artiste Raphaël Barontini dans le grand hall de l’édifice, et une exposition dans la crypte de celui-ci qui commémore les grandes figures du combat contre l’esclavage au cours des siècles.
Par Gérard Poitou.
“We could be Heroes” Raphael Barontini cl GP
L’irruption de la couleur dans le mausolée de la République est saisissante : les 19 fresques peintes sur textile accrochées en ce lieu de mémoire proposées par l’artiste Raphaël Barontini marquent une rupture singulière dans le froid hommage républicain. Dans un Panthéon onirique, l’artiste évoque les grandes figures, les héros, les combats et les paysages de ces siècles de lutte contre l’inhumaine oppression. Comme une rupture culturelle, “We could be heroes” constitue une étonnante introduction lyrique à l’exposition “Oser la liberté” qui se tient dans la crypte du bâtiment.
« Nous ouvrir les yeux »
Le Code noir cl GP
Dans son discours inaugural, Jean-Marc Ayrault, le président de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, indiquait « qu’ouvrir les portes du Panthéon, c’est nous ouvrir les yeux » sur les siècles de combat contre l’esclavage. Le choix de la crypte pour ce deuxième volet de cet événement apporte un cadre plus intime et détaillé à l’évocation de ces quatre siècles de combat contre l’esclavage et des personnalités qui s’y sont illustrées. Avec un dispositif mêlant archives, reproductions d’œuvres et installations sonores et visuelles, l’exposition du sous-sol présente les figures qui ont incarné le combat contre l’esclavage, celles et ceux qui sont déjà honoré-e-s au Panthéon – comme l’abbé Grégoire, Condorcet, Voltaire, Toussaint Louverture, Aimé Césaire et Joséphine Baker… – mais aussi des figures moins connues (Olympe de Gouges, Makandal, Julien Raimond…).
Mirabeau cl GP
On pourra aussi lire le discours de Mirabeau qui conduira à la première abolition de 1794. Quatre siècles de l’histoire de France sur trois continents, de combats anonymes et de résistance contre cette condition d’esclaves formalisée dans l’ignoble Code Noir établi par Colbert en 1685 sont ainsi présentés au fil de l’exposition : la maquette d’un navire négrier qui ouvre l’exposition nous rappelle la cruauté de ce commerce triangulaire. Il restera à mettre en exergue la prospérité induite en France par ce commerce comme l’industrie sucrière orléanaise en fut la manifestation: “C’est à ce prix que vous mangez du sucre” (Candide) – rappelait Voltaire en son temps.
Le commémorer pour continuer le combat
“Oser la liberté” est un hommage à l’audace d’hommes et de femmes qui conduisit à l’insurrection générale du 23 août 1791 dans la colonie de Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti) : le premier soulèvement d’esclaves qui parvint à imposer l’abolition de l’esclavage. Si Bonaparte rétablit l’esclavage en 1802, il faudra attendre 1848 pour qu’enfin l’abolitionnisme triomphe en France. Mais l’exposition ne s’arrête pas à cette date, l’esclavage a pour héritage le racisme et son corollaire le colonialisme que combattront Joséphine Baker, Aimé Césaire ou encore René Cassin, le rédacteur de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, lui aussi au Panthéon.
“We could be heroes” et “Oser la Liberté”
Jusqu’au 11 février 2024
Panthéon – place du Panthéon, Paris
Tous les jours de 10 h à 18 h
Plein tarif 11,50 €
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