Mis en place depuis 2016, le « Mois sans tabac » débute sa 8e édition. Pilotée par Santé publique France, le ministère de la Santé et l’Assurance Maladie, cette opération a lieu chaque mois de novembre et encourage les fumeurs à arrêter de pétuner pendant 30 jours. Ce défi collectif est crucial pour les femmes particulièrement vulnérables au tabagisme.
Par Jean-Paul Briand.
Pendant des années, l’initiation au tabac, phase préalable incontournable à sa dépendance, était essentiellement une affaire d’adolescents mâles. La prévalence du tabagisme chutant chez les hommes, les cigarettiers recrutent désormais chez les femmes. Pour cibler spécifiquement la population féminine, les industries du tabac insinuent que la cigarette est un symbole d’émancipation et associent l’image de la fumeuse à celle d’une femme libre. Désormais, en France, près de la moitié des jeunes filles âgées de 17 ans ont déjà expérimenté le tabac et plus d’une femme sur cinq fume régulièrement.
L’impact sanitaire du tabagisme féminin ne cesse de s’aggraver
Santé publique France avait constaté une baisse importante de la consommation de cigarettes entre 2014 et 2019, mais ses dernières estimations montrent une hausse du tabagisme féminin. Ainsi chez les femmes de 18-75 ans, l’usage quotidien du tabac a augmenté de 3% entre 2019 et 2021 et principalement chez les moins diplômées. Dans sa publication du 13 décembre 2022, Santé publique France signale « qu’un écart de 15 points est observé entre les personnes n’ayant aucun diplôme ou un diplôme inférieur au baccalauréat et les titulaires d’un diplôme du supérieur ». L’impact sanitaire du tabagisme féminin en France ne cesse de s’aggraver.
Le cancer du poumon est en progression constante chez la femme
Jusque dans les années 70, les cancers du poumon étaient très rares chez les femmes. Ce n’est plus le cas. Ils sont devenus la deuxième cause de mortalité féminine derrière le cancer du sein. D’après l’édition 2023 du Panorama des cancers en France, si le cancer du poumon reste encore plus élevé chez l’homme, l’écart se resserre. Son incidence reste stable chez l’homme, chez la femme elle augmente de près de 5% par an. Depuis 1990, chaque année, le taux de mortalité féminine par cancer du poumon augmente de 3%, alors que celui des hommes diminue de 1,6 %. Tous les ans ce sont 20 000 femmes qui décèdent du tabac. Le cancer du poumon est en progression constante chez la femme qui semble avoir une sensibilité plus grande que les hommes face aux effets nocifs du tabac.
Une augmentation plus marquée des risques cardio-vasculaires chez les femmes
Avant leur ménopause, grâce à leur statut hormonal, les femmes bénéficient d’une protection cardiovasculaire spécifique. Si elles fument, cet avantage disparaît. Comme pour les cancers du poumon, les incidences des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux augmentent chez les femmes parallèlement au tabagisme féminin. Le tabac est le premier facteur de risque de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs, y compris chez la femme jeune, obligeant nombre d’amputations. Sur les 20 dernières années, avant l’âge de 65 ans, les données épidémiologiques montrent une augmentation plus marquée des risques cardio-vasculaires chez les femmes, en rapport avec la montée du tabagisme féminin.
L’industrie du tabac n’a jamais voulu la libération de la femme
Il semble que le sevrage tabagique soit plus difficile chez la femme que chez l’homme, tout particulièrement les premiers jours. A la Columbia University’s Mailman School of Public Health, les addictologues ont montré que le premier jour d’abstinence joue un rôle essentiel : il est l’un des prédicteurs décisifs de la réussite du sevrage tabagique à long terme. Les femmes reprennent souvent la cigarette afin de contrôler leur poids. En effet la nicotine modifie le métabolisme humain. Un paquet de cigarettes équivaut à 200 calories brûlées. Pour ne pas prendre de poids à l’arrêt du tabac il faut donc diminuer sa ration calorique ou augmenter sa dépense énergétique d’autant.
L’arrêt du tabac améliore toujours la qualité et l’espérance de vie, tandis que l’industrie du tabac n’a jamais voulu la libération de la femme. Le défi « Mois sans tabac » peut aider les femmes à protéger leur santé et à se libérer de la cigarette.
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