La Tour 17 s’est barrée le dimanche 29 octobre. En 1,5 seconde c’était fait sous les yeux de milliers de personnes amassées dans les rues ou devant le grand écran du complexe sportif. La Source et les Sourciens voyaient disparaître le plus gros et plus haut immeuble d’habitation de leur paysage.
Par Jean-Marc Dumas
9h25 : La consigne est de rejoindre à pied le rendez-vous point presse dans l’école Kergomard. Dans la classe d’à côté, le PC sécurité est en ébullition. Multi-écran collectant les nombreuses caméras de surveillance, talkie-walkie et smartphones grésillent, la check-list de sécurité est épluchée, vérifiée et revérifiée.
10h00 : Le point presse commence. Serge Grouard, maire d’Orléans, annonce que tout est en ordre. 2 000 personnes ont été invitées à quitter leur habitation, celles situées dans un rayon de 200 mètres de la T17. A leur gré, elles ont déjà été dirigées vers le complexe sportif où les attendaient, tables, chaises, collation et grand écran de retransmission. Avec le directeur de cabinet de la préfète, il insiste sur le haut degré de sécurité mis en place pour la protection des habitants et des immeubles. Les 1 300 logements du périmètre ont été vérifiés. 50 agents de police, municipale et nationale participent à la sécurisation. Maintenant les abords sont totalement désertés (sauf les techniciens de l’entreprise Ginger et la police). Un drone sillonne le quartier pour compléter la surveillance.
10h10 : Le représentant de l’entreprise Ginger rappelle que 800 kg d’explosif ont été mis en place dans 3 000 trous forés dans le gros œuvre de la tour. L’ensemble est relié au poste de commandement opérationnel. Les intervalles entre les impulsions déclenchant les explosions se mesurent en 100ème de seconde, quasi-imperceptibles. En premier ce sera le foudroyage de la base du corps central de la tour, puis les étages de ce corps puis les ailes nord et sud de façon à ce que les 3 parties s’écroulent vers le centre.
10h15 : Les journalistes sont invités à rejoindre le chapiteau placé en première ligne pour la presse écrite et la terrasse d’un immeuble voisin pour les photographes et vidéastes.
10h20 : L’attente commence. La foule est là, les smartphones sont chargés à bloc, les selfies se succèdent avec la T17 en arrière-plan et ça discute, les récits de vie s’échangent de groupe en groupe. Le voisin dessine à main levée la tour et ses abords.
10h57 : Première sirène. Il reste 10 mn avant le déclenchement. Les bruissements de la foule s’estompent, le silence gagne du terrain.
11h02 : Deuxième sirène. Il reste 5 mn avant le déclenchement. Plus aucun bruit, la tension est maximum. Les dernières minutes sont longues.
11h07 : Un BOUM énorme
11h08 : C’est fini ! Elle a tiré sa révérence. Le clou du spectacle a duré en effet 1,5 seconde : bruits de claquement puis d’explosion, geysers d’eau de 30 à 40 mètres de hauteurs destinés à barrer et absorber la poussière, affaissement régulier de la tour sur elle-même. Fin de la séquence
11h 09 : La stupeur passée, les applaudissements crépitent, la poussière se dissipe, le tas de décombres apparaît, le ciel est dégagé. L’opération technique est parfaitement réussie.
Après avoir vécu ce moment il est difficile de s’extraire. Reste le sentiment qu’il faudra retrouver autrement les histoires d’habitants emmagasinées pendant 50 ans dans les murs des 273 logements.
Le reportage photo de Valérie Thévenot
Plus d’infos autrement sur Magcentre : Orléans La Source: faut-il le feu vert des locataires pour détruire la “tour infernale”?