Tours : nouvelle reconfiguration de la droite

Joséphine propose un éclairage sur les accointances de la droite tourangelle qui tente de se réorganiser en vue des prochaines échéances électorales. Au milieu des jeux d’alliance et des divisions, petit tour d’horizon.

[Le billet de Joséphine]

Signe d’une droite passablement dans la panade, on a vu émerger lors du conseil métropolitain du lundi 25 septembre dernier un tout nouveau groupuscule, sorte d’association plus ou moins congrue de francs-tireurs isolés qui font déjà du marketing politique pour les municipales 2026 en utilisant la maigre tribune offerte par l’assemblée métropolitaine.

On trouve dans le coup Christophe Bouchet, radical-valoisien essentiellement de tendance lui-mêmiste, avec la défaite de 2020 aux municipales toujours en travers de la gorge, Mélanie Fortier, radicale tout court, réputée pour la plasticité de ses alliances politiques, proverbialement à la recherche d’une position qui permette de négocier quelque futur avantage, Affiwa Metreau et Céline Delagarde, aussi inclassables qu’inconnues en dehors des cercles les plus geeks de politique locale, Marion Nicolay-Cabanne qui semble en délicatesse avec les tergiversations politiques de la droite et ses baronnies, bien sûr Benoist Pierre, passé du PS à LREM puis à Territoires de Progrès puis à Horizons, très fâché d’avoir été vidé de sa vice-présidence par Frédéric Augis (LR) il y a quelques mois et déjà officieusement en campagne pour 2026. Il y a enfin Romain Brutinaud, le petit jeune qui monte, lui-même UDI et donc assez naturellement versé à une alliance avec Horizons, entendant faire table rase du passé de la droite tourangelle LR sauce Paumier-Briand, arrivés à date de péremption.

Les absents

Absents remarqués de ce groupe, Olivier Lebreton et Thibault Coulon, des LR-canal historique qui ne veulent visiblement pas se placer sous le patronage encombrant de Bouchet et Pierre dont l’alliance de circonstances au second tour en 2020 n’a pas laissé que de bons souvenirs. Barbara Darnet-Malaquin marque également une distance prudente, pourtant proche de Benoist Pierre et d’Horizons, mais également suppléante d’Olivier Lebreton aux dernières législatives. Difficile d’y voir cependant l’embryon d’une future liste aux municipales, vu le cumul de scores défavorables de la droite à papa à Tours et les limites de la coloration très catho d’une partie des LR dont certains ont d’ailleurs franchi le Rubicon en passant au RN ou en se rapprochant de Zemmour. S’agit-il d’une mise à l’écart pour des questions de personnes, sachant que les tensions sont à peine voilées, ou alors plutôt d’une stratégie qui vise à faire monter les enchères en vue d’un ralliement à l’approche des municipales ? Probablement un peu des deux.

Déjà, si vous êtes arrivés jusque-là sans le tournis, bravo, mais ce n’est pas fini, passons maintenant au contenu politique proposé par ce gruppetto.

Préparer le terrain

Pour l’instant, il s’agit de préparer le terrain tranquillement : taper sur le bilan d’Emmanuel Denis, surfer sur le mécontentement de quelques associations de voisins ou d’automobilistes auto-radicalisés depuis la funeste fermeture du pont Wilson à la circulation, une pincée de troisième âge par-ci, une rasade de petits commerçants par-là. Mais lors du conseil métropolitain, et sans aucun autre objectif que de se positionner pour 2026, deux axes ont été esquissés : critiquer le tracé de la deuxième ligne de Tram, histoire de profiter à peu de frais du mécontentement prévisible lié aux travaux qui finiront bien par arriver un jour ; s’opposer à l’augmentation de la fiscalité métropolitaine sur les entreprises, se posant alors en héros de la défense des contribuables et donnant des gages aux électeurs de 2026, reprenant à tue-tête dans un futur proche le refrain – sur un air de Sardou – « on est les seules crédibles, on s’était déjà opposé à l’augmentation des impôts à la métropole, nananiiii nananaaa ».

Les droites se déchirent

C’est d’ailleurs sur ce dernier point que les droites se sont déchirées lundi dernier, Thibault Coulon, membre de l’exécutif métropolitain et Olivier Lebreton, loyal LR, ne pouvaient pas entrer en opposition frontale avec Frédéric Augis sur cette question fiscale et sur les indispensables marges de manœuvre à dégager en augmentant les impôts, du reste dans une métropole notoirement en retard sur ses concurrentes au niveau des ressources propres. Occasion rêvée pour Marion Nicolay-Cabanne et Benoist Pierre de faire un bon tacle à Augis qui les avait sacrifiés sur l’autel de la réintégration modeste de la gauche dans l’exécutif il y a quelques mois.

La situation reste cependant mouvante. A Tours, les macronistes semblent très isolés, peu sujets à une candidature autonome ou à une alliance avec la droite. D’ailleurs ils lancent des appels du pied à Emmanuel Denis pour rentrer dans une éventuelle coalition plus centriste en 2026, multipliant les interventions publiques qui dénoncent les odieux extrémistes de LFI qui gâchent l’action finalement pas si mauvaise du PS et d’EELV. Stratégie suivie du reste par la droite qui saisit bien que sans un éclatement de la majorité plurielle d’Emmanuel Denis, les choses semblent bien incertaines.

Il existe d’ailleurs des rumeurs persistantes de constitution d’une liste de centre-gauche réunissant quelques cazeneuvistes et déçus du PS en mal de reconnaissance, s’appuyant sur de maigres relais dans des quartiers et dont le principal ciment aigrelet est de régler des comptes avec Emmanuel Denis et son équipe.

Bref, la politique comme on l’aime.

Reste à savoir comment va manœuvrer Emmanuel Denis, maintenant qu’il a l’avantage de l’expérience et qu’il semble avoir clarifié sa position à la métropole, acceptant de rentrer dans le jeu de la « métropole de maires et des notables », même si cela fait courir le risque de le faire apparaître comme un homme de l’ancien monde, celui des coupettes et des tapes sur le dos avec la droite costard-cravate, même s’il continue de porter des Adidas.

Reste à savoir également si la majorité plurielle va tenir dans une ambiance généralisée Nupesophobe, avec des médias à l’affût du moindre tweet des stars parisiennes et avec une division pour les sénatoriales – LFI ayant fait un bon score dans le 37, en partie par rejet des grands électeurs de la figure du PS à l’ancienne Pierre-Alain Roiron – et pour les européennes.

Un élu, fin connaisseur de la politique tourangelle depuis 30 ans commente : « Il faut toujours se méfier de la droite, c’est quand elle semble aux fraises et divisée qu’elle peut ne plus rien avoir à perdre et trouver une dynamique, surtout face à une gauche trop sûre d’elle qui commence à se fracturer. C’est exactement comme ça que Germain a perdu en 2014 et que Babary a crée la surprise ».

Il n’y a plus qu’à continuer à parier sur l’intelligence collective à gauche. Et ce n’est pas à l’échelon national qu’on trouvera source d’inspiration.  

Commentaires

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  1. On peut faire confiance à la droite de la grande bourgeoisie pour s’allier avec le diable et à la gauche social-démocrate, de droite, bourgeoise de Cazeneuve de s’allier à la droite de l’extrême pour que cette classe conserve ses privilèges.
    Espérons que la gauche, celle de l’avenir en commun et d’un monde meilleur pour l’ensemble des citoyennes et citoyens, sera respecter sa signature sur un programme né en 2022.

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