Pour organiser ses traditionnelles fêtes qui attirent des centaines de milliers de visiteurs, la ville doit pomper l’eau du fleuve pour alimenter le canal afin de favoriser la navigation des bateaux. Les opposants sont vent debout et proposent une autre date… bien difficile à trouver.
Par Jean-Jacques Talpin
Pompons cl GP
« Si ça continue les mariniers devront mettre des roulettes pour déplacer leurs bateaux… » Cette boutade quelque peu ironique de Jean-Philippe Grand, porte-parole de l’opposition de la gauche écologiste orléanaise traduit bien le sentiment de tous ceux qui mettent en doute le bien-fondé de ce rendez-vous de septembre. Il suffit de contempler les bancs de sable et les minces filets d’eau pour comprendre que la Loire a soif. Et pourtant depuis 2003 la ville d’Orléans organise son désormais traditionnel Festival de Loire qui attire des centaines de milliers de visiteurs, mais aussi 300 bateaux (ceux du Québec notamment cette année) et autant de mariniers. Un succès que personne ne conteste qui va animer la ville du 20 au 24 septembre avec ses guinguettes, ses spectacles (François Morel cette année le samedi soir), son grand spectacle pyrotechnique et une multitude d’activités toutes plus pédagogiques les unes que les autres. Ce n’est plus « la foire à la saucisse » comme la gauche l’avait qualifié dans les années 2000 et cela d’autant plus que le festival est devenu « écolo friendly » pour tout ce qui concerne la restauration, le traitement des déchets et la gestion de l’énergie.
Un élu « imbécile et incompétent ? »
La Loire au plus bas cl GP
Mais pour fêter la Loire encore faut-il qu’il y ait de l’eau ! D’année en année la Loire est de plus en plus basse obligeant la ville à pomper l’eau de Loire pour alimenter le canal (lui aussi presque à sec) et permettre ainsi à des bateaux de flotter dans un réduit compris entre les deux ponts du centre-ville. Depuis le 28 août une campagne de pompage a donc été lancée, après accord de la préfecture, au rythme de 60 m3/heure. Une initiative que la gauche a toujours mise en cause. Cette fois c’est Emmanuel Duplessy, conseiller municipal (Génération.s) qui s’y est collé en distillant ses interrogations y compris (crime majeur) sur les antennes de la presse nationale. Le shadok Serge Grouard a donc pris le vent de face qualifiant les propos d’Emmanuel Duplessy « d’imbéciles » et en estimant que cet élu était « incompétent et n’existait que grâce à la polémique » selon les termes du communiqué de la gauche. Le maire a justifié ses propos en rappelant que ce pompage « ne représentait que 0,05% du volume de la Loire » et que les eaux canalisées et stockées seraient ensuite rendues à la Loire à l’issue du Festival.
Pour les écologistes notamment, il n’y a « aucun élément pour affirmer que le pompage est indolore pour les écosystèmes sur la biodiversité et le cycle de l’eau, pour la simple et bonne raison que ces conséquences ne sont pas connues, ou du moins publiques ». En plus, note Jean-Philippe Grand « quel message adresse-t-on aux générations futures et actuels habitants : peut-on agir comme si le réchauffement climatique n’existait pas et comme si l’eau n’était pas un bien en danger ? »
Impossible consensus
Depuis 2019 donc le pompage est obligatoire. L’actuelle canicule laisse augurer un très faible niveau de la Loire vers le 20 septembre. Faut-il alors trouver une autre date pour ce festival ? Jean-Pierre Gabelle, conseiller municipal délégué à ce festival avait évoqué la recherche d’une autre date, peut-être au printemps quand les eaux sont plus hautes. Une réunion a même été organisée avec les élus, y compris d’opposition, avant que la ville ne fasse machine arrière. Le printemps (et notamment la période entre avril et la mi-août) est la période de nidification des oiseaux, en particulier des sternes sur les duits.
Il faudrait donc passer sur le corps des écologiques pour déplacer la fête à cette date qui en plus pourrait se télescoper avec les fêtes de Jeanne d’Arc fin avril. « Pourquoi pas en hiver, en février-mars ? » avance sans trop y croire Jean-Philippe Grand car aller se frigorifier sur les quais en dégustant un verre de Gamay avec ses moufles serait certainement moins sexy et attractif…
Le débat est donc peut-être sans issue. La gauche qui ne veut pas ramer à contre-courant veut donc relancer le débat, notamment lors du conseil municipal du 27 septembre, pour mettre à nouveau la date en débat et pour lancer « un grand débat sur le partage, la gestion et l’utilisation de l’eau ».
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