L’avenir du spectacle vivant en question

Le 7e festival des Casseroles devait se dérouler à Saint-Jean-de-Braye ce dernier week-end. Faute d’avoir trouvé un financement suffisant en amont, l’association organisatrice a préféré jeter l’éponge bien avant l’échéance. Un cas loin d’être unique dans l’univers du spectacle vivant et possiblement annonciateur d’une modification de la démarche culturelle à venir pour les petites structures.

Par Fabrice Simoes


Avec Tagada Jones, chanter « Lalalala… Mort aux cons » en toute franchise et sans préjudice… Beugler en chœur, en toute impunité, à Daniella qu’on peut lui « mettre les doigts » sans que #metoo trouve à redire quelque chose ou braver la ligne directrice de WWF sur un véhément « le plastique c’est fantastique ». Ce sont, entre autres, ces opportunités transgressives qui étaient prévues ce samedi 2 septembre à l’occasion du festival loirétain des Casseroles. Sous le chapiteau du cirque Gruss, à Saint-Jean-de-Braye (agglo Orléans), on espérait, pour le coup, faire le plein des 800 places potentielles. C’était nécessaire pour l’équilibre budgétaire, à condition de trouver en amont des financements supplémentaires. Certes la ville de Saint-Jean-de-Braye et sa maire, Vanessa Slimani, mais aussi des partenaires privés, pour la plupart des fidèles depuis le début de l’aventure en 2014, s’étaient engagés. Certes, les intermittents du spectacle et les groupes locaux étaient partants. Certes, certes…

Une édition festive

Après une absence de quatre années, due notamment à la pandémie, l’édition 2023 s’annonçait donc festive avec la participation de deux têtes d’affiche nationales et quatre autres groupes références de la scène régionale. Une seule condition pour assurer le coup, il fallait trouver des sous. Patatras et bardafouette, la mort dans l’âme, l’association Les Casseroles, organisatrice de l’événement, a dû se rendre à l’évidence avant le début de l’été. Sur le site de l’asso on pouvait d’ailleurs lire que, pour le festival : « Toutes les conditions ne sont plus réunies pour garantir sa réussite. En cause, plusieurs facteurs : notre demande de subventions auprès de certaines collectivités a été refusée et la faible vente de billets. Alors que le climat économique reste frileux trois ans après le Covid, les garanties financières ne sont aujourd’hui pas réunies pour maintenir la manifestation… » Et, après un été pourtant redevenu riche en spectacles vivants, en festivals de scènes et de rues, force est de constater que l’après-Covid est difficile à digérer, surtout dans un contexte économique qui « mange chaud » sévère.

Un entre-deux difficile à gérer

En avril dernier, dans les Échos, Jean-Philippe Thiellay, le président du Centre national de la musique expliquait que la situation actuelle était délicate. « Nous sommes dans un entre-deux, sortis de la crise mais fragilisés par des marges et des fonds propres qui s’amenuisent. Et les financements de l’État se réduisent après les soutiens exceptionnels liés à la pandémie. On peut s’inquiéter pour le bilan 2023 ». On pourrait ajouter que ce sont les soutiens institutionnels en général qui sont plus compliqués à obtenir parce que les budgets sont, eux aussi, contraints. En région Centre-Val de Loire, de nombreuses municipalités ont pris en mains leurs propres destinées. Elles s’appuient sur leurs propres structures et moins sur les associations pour faire perdurer les manifestations culturelles. La faute aux paramètres économiques du moment mais aussi à une forme de frilosité envers l’univers culturel hors schéma trop classique. La faute aussi à un public devenu plus consommateur, et qui doit aussi compter sur une réduction de la portion consacrée aux loisirs dans son budget. La faute à un marché du spectacle vivant qui a peut-être vécu son âge d’or voilà quelques années – quoique ce soit encore à voir – et n’a pas encore trouvé un nouvel équilibre entre les coûts réels, ceux appliqués, et les potentielles marges si elles peuvent exister. La faute à l’environnement des manifestations. Tout le monde ne tire pas toujours dans le même sens… Par exemple, à l’occasion du récent festival de blues de La Charité-sur-Loire, il était très compliqué de dîner après les concerts. La faute à tout le monde et à personne à la fois, donc. Une certitude, sur le métier il va être temps de remettre l’ouvrage.


Cet été, dans l’hexagone, le Festival des Casseroles sera loin d’être le seul à ne pas avoir été au bout du projet. Il n’est pas certain que, à l’avenir, et pas seulement pour la période estivale, d’autres manifestations, d’autres compagnies encore ne viennent compléter une collection que, pour une fois, on voudrait beaucoup moins garnie.

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Commentaires

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  1. Même situation pour la Ruche en Scène à Orléans, dont la subvention municipale a été supprimée ! Passé le 31 décembre, gros risque de clé sous la porte…

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