Sculpture de toute beauté de Sylvie Desmoulin, le buste en bronze représentant Maurice Genevoix sera officiellement installé à Orléans le 8 septembre prochain, date anniversaire de la mort de l’écrivain. L’œuvre trouvera place sur l’allée piétonne rebaptisée « Promenade Maurice Genevoix » située le long du quai Barentin, à équidistance entre le Pont George V et le Pont Joffre.
Par Jean-Dominique Burtin
Sylvie Desmoulin à la Fonderie Delmas. Photo : AO.
Genèse d’une belle aventure culturelle
Pour mémoire c’est le 6 février 2023 que le conseil municipal d’Orléans a accepté la donation, par les Artistes Orléanais, d’un buste en bronze de Maurice Genevoix créé par la sculpteur Sylvie Desmoulin. En effet, la Société des Artistes orléanais après avoir rendu hommage à l’écrivain en exposant cette œuvre d’art mémorielle, alors en terre, lors de son 113e salon a souhaité en faire don à la ville d’Orléans afin qu’elle trouve sa place dans l’espace public. Rappelons que Maurice Genevoix fut le premier président des AO. La remise de cette œuvre, fondue par le fondeur Julien Delmas à Châteaudun s’est déroulée en mars lors d’une cérémonie en l’Hôtel Groslot en présence de Serge Grouard et de Julien Larere-Genevoix qui, avec émotion, s’est attaché à rendre hommage à la figure de son grand-père. « En ces temps troublés, dans une société fracturée qui cherchent des repères, de tels monuments ont une fonction pédagogique et mémorielle auprès du corps social, au travers de toutes les générations » devait déclarer quant à lui Benoit Gayet, président des Artistes orléanais. Sylvie Desmoulin, peintre, sculpteur, architecte diplômée DPLG vivant et travaillant à Meung-sur-Loire : « La sculpture est un travail solitaire. Cette fois, j’ai vécu cela comme une aventure émanant d’une volonté commune ». Le 8 septembre, la ville inaugurera cette création en présence de nombreuses personnalités dont Madame Dominique Bona, écrivaine et académicienne.
« Avec lui, tout devient fort par la force de sa pensée »
Voici, avec ce buste de Maurice Genevoix, une œuvre grave et profonde évoquant un être apaisé plongé dans sa mémoire, une présence recueillie, à l’écharpe comme un peu de cette Loire passée autour du cou. Dès le premier regard, cette œuvre et ce visage ne peuvent que rester gravés dans la mémoire du passant.
Sylvie Desmoulin, membre des Artistes Orléanais : « Lorsque Benoit Gayet nous a proposé de rendre hommage à Maurice Genevoix, cet écrivain illustre qui fut le président des AO et qui allait entrer au Panthéon, je lui ai proposé un buste avec aucune certitude de réussite.
Pour parvenir à cette création j’ai réalisé, des dessins, des portraits, des études, et visionné des vidéos car si je connaissais l’œuvre je n’avais pas rencontré l’homme. Il me fallait le sentir, le connaître, effectuer des arrêts sur image, écouter ses propos, mesurer sa façon de s’exprimer, son expression, voir comment son visage s’animait quand il se passionnait dans son propos. Avec lui, les traits sont fins, non affirmés, tout est en nuances, tout devient fort par la force de sa pensée.
Lorsqu’un modèle vient poser dans mon atelier, c’est peut-être plus simple, je tourne autour de la personne, nous discutons, je la vois vivre et je la veux vivante. Il faut que je la comprenne, que j’entre en elle, qu’elle entre et passe aussi en moi ».
« J’ai découvert l’homme au fil de mon travail »
Dans son atelier de Meung-sur-Loire, Sylvie Desmoulin travaille grandeur nature et, lorsque pour réaliser cette œuvre elle attaque la motte de terre de trente à quarante kilos avant de procéder par petites touches, elle dispose tout autour des documents amassés durant deux mois représentant le visage de face, de profil, de trois quarts et de dos, des photos en plongée et en contre-plongée.
Sylvie Desmoulin : « J’ai découvert l’homme au fil de mon travail. Sur une sculpture, il faut être modeste, essayer de s’approcher le plus près de la vérité. Si l’on arrive à cent pour cent ce n’est que par hasard. Là, et c’était mon défi, je ne voulais que parvenir au respect de la personne, à évoquer la grandeur de sa pensée et de son âme qui s’impose. Durant ce travail je suis totalement absorbé, je n’entends plus ce qui m’entoure et parfois même je ne m’entends plus. C’est un combat, il faut aller au rythme de la terre qui n’en finit pas de sécher. En une semaine il faut avoir sorti l’essentiel car on ne peut pas aller au-delà de trois semaines pour œuvrer. Oui, durant tout ce travail, on se soumet à la terre, ce matériau vivant. Si l’on est bien en musique on tire profit de sa malléabilité, il ne faut être à contretemps. »
« Des traces qui nous survivent et surtout nous dépassent »
Après deux semaines de séchage et avoir protégé l’œuvre en terre avec de la cire, Sylvie Desmoulin travaillera de concert et de manière ponctuelle avec le fondeur, Julien Delmas (atelier La fonte du bronze, AFB, Châteaudun) jusqu’à la patine finale.
Sylvie Desmoulin : « Quand je repars de la fonderie avec le bronze dans ma voiture, je suis très exaltée, c’est un moment émouvant, très étrange. C’est une autre matière… A chaque fois c’est une naissance. Savoir cette œuvre à Orléans face au fleuve me ravit car je ne voyais pas meilleur endroit pour elle. Maurice Genevoix, je le sais amoureux de la Loire et je sens que cet emplacement correspond à sa façon de respirer. Oui, l’endroit est magnifique, je ne pouvais rêver mieux. Si vous saviez comme je suis heureuse de cette aventure car les sculptures sont des traces, des symboles qui vont marquer l’histoire, qui nous survivent, et surtout nous dépassent. »
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