Les jeux olympiques (JO) sont devenus des manifestations mercantiles aux coûts exorbitants ayant pour alibi le sport. Théoriquement symbole de paix et de fraternité, ce sont désormais des divertissements médiatico-politiques et commerciaux qui exacerbent les rivalités entre les nations et excitent des chauvinismes primaires. « Paris 2024 » peut-il échapper à ces dérives ?
Par Jean-Paul Briand
La Cour des comptes alerte le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (COJO) des prochains JO parisiens sur les nombreuses dépenses oubliées. Ainsi les budgets de la sécurité et des transports n’ont pas été intégrés. Dans leur rapport les conseillers de la Cour des comptes rappellent que « la prise en charge de la sécurité des sites de compétition, du village des athlètes et du village des médias et de leurs abords immédiats incombe au COJO ». Au vu des tensions internationales, mais aussi nationales avec les très nombreuses manifestations parfois violentes, les attentats islamistes meurtriers et les dernières émeutes, la sécurité n’est pas le moindre des problèmes à prendre en charge !
Les conseillers, inquiets, préviennent : « Avec treize millions de touristes attendus, 600 000 spectateurs et 200 000 personnes accréditées à transporter chaque jour, l’organisation des transports constitue un défi majeur ». Ce défi sera-t-il gagné et à quel prix ?
Les pertes financières sont constantes
Pour « Paris 2024 », le budget prévisionnel était de 6,2 milliards d’euros. À l’été 2021 il est passé à 7,3 milliards pour être aujourd’hui à 8,8 milliards. Les dérapages financiers s’aggravent et l’enveloppe devrait allègrement atteindre, voire dépasser, les 10 milliards. Les organisateurs surévaluent les retombées économiques et les bénéfices sociaux des jeux. Ils oublient un peu vite, qu’à l’exception des JO de Los Angeles en 1984, les pertes financières sont constantes. The Oxford Olympics Study 2016 démontre que la moyenne des dépassements des Jeux olympiques est de 156 %. C’est le dépassement moyen le plus élevé de tous les types de mégaprojets. Ce n’est pas un problème puisque le contribuable est là pour mettre la main à la poche afin de compenser les déficits.
Au-delà des débordements financiers chroniques, les Jeux olympiques modernes sont devenus un spectacle démesuré aux mains des sponsors où la marchandisation est reine. Le passage de la flamme olympique, initié en 1936 par le sinistre Joseph Goebbels pour faire la promotion de l’Allemagne nazie, est aujourd’hui facturé 180 000 euros. Avec une dizaine d’autres départements, l’Indre-et-Loire refuse le ruineux passage de la mythologique flamme olympique. Evoquons succinctement le prix prohibitif des billets : il faudra débourser 2 700 € pour assister à la cérémonie d’ouverture, en bonne place, le long de la Seine.
Une arme afin de régler des affrontements géopolitiques
Les JO, soi-disant compétition entre individus et non entre nations, sont une arme afin d’interpeller l’opinion internationale et de régler des affrontements géopolitiques. Les nombreux boycotts en témoignent : à Melbourne en 1956, les Pays-Bas, l’Espagne et la Suisse, puis l’Italie, l’Egypte, l’Irak et le Liban refusent de participer ; en 1976, à Montréal, 21 pays africains sont absents ; en 1980, les États-Unis et 64 autres délégations boycottent les Jeux de Moscou ; en 1984, la délégation soviétique ne se rendra pas à Los Angeles avec dix-sept autres pays communistes ; en 1988, à Séoul, Cuba et la Corée du Nord ignorent les Jeux. Pire, en 1972 à Munich, les JO vécurent un séisme avec l’assassinat de onze sportifs de la délégation israélienne par des membres de l’organisation terroriste palestinienne « Septembre noir ».
Le nombre de médailles obtenues est ausculté fébrilement. C’est un inventaire infantile et étriqué cherchant à prouver de prétendues supériorités nationales. Les attentes des spectateurs, des médias et des pays d’origine exercent une pression énorme sur les participants. La quête d’un podium à tout prix l’emporte sur l’esprit sportif et le fair-play. A leurs corps défendant, souvent martyrisés, les athlètes devenus porte-drapeaux confortent les rivalités entre les pays participants et les préjugés nationalistes, voire racistes.
Pourquoi la ville de Paris a-t-elle voulu organiser un tel ruineux et insensé événement ?
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